Plus que jamais, soutenir l'auto-détermination de la Palestine exige une clarté de position
Bruxelles: Non à la 'normalisation' et au racisme, oui au retour et à la libération!
Le peuple palestinien est aujourd’hui confronté à une attaque multiforme à l’intérieur et à l’extérieur de la Palestine occupée. Les Palestiniens sont assiégés, sont la cible d’assassinats quotidiens, de démolitions de maisons, de bombardements sur Gaza, de confiscations de terres, d’arrestations massives, de construction de colonies et leur droit au retour est dénié depuis plus de 75 ans.
Cette réalité signifie qu’il est plus important que jamais de s’organiser pour la justice en Palestine sur la base de principes clairs qui défendent le droit du peuple palestinien à résister, à revenir et à libérer sa terre de la mer au Jourdain. Ces principes ont été affirmés par la révolution palestinienne il y a près de 60 ans.
La rhétorique et les actions fascistes flagrantes de responsables israéliens comme Itamar Ben-Gvir, Bezalel Smotrich et Benjamin Netanyahu ont été accompagnées par l’émergence de manifestations “sionistes libérales” à Tel-Aviv et dans toute la Palestine occupée en 1948, dont l’écrasante majorité a pris le drapeau colonial israélien comme symbole.
Cette situation a amené certaines organisations concernées par la justice en Palestine à appeler à travailler avec certains sionistes opposés au gouvernement d’extrême-droite. C’est une erreur fondamentale, la plupart de celles et ceux qui manifestent sur les ruines de villages palestiniens sont les héritiers des responsables des crimes contre notre peuple depuis la Nakba.
En Belgique, nous en avons été témoins le jeudi 2 mars lorsque de multiples organisations (dont l’Association Belgo-Palestinienne–ABP, le CNCD 11.11.11, Intal, Palestina Solidariteit, Viva Salud et d’autres) ont organisé un événement avec un orateur palestinien et un orateur israélien, intitulé “Palestine/Israël, sommes-nous proches de la fin du jeu?”. Si le nom de cet événement est en soi problématique et insultant, car 75 ans de colonialisme et de crimes ne sont pas un «jeu», les problèmes de l’événement vont bien au-delà de son titre.
Les acteurs d’une lutte anticolonialiste, les Palestiniens, sont placés dans un “dialogue” avec des Israéliens, les colons qui occupent leur terre. En l’occurrence, un ancien vétéran de l’armée israélienne ne proposant rien d’autres qu’une colonisation à «visage humain» en faisant la promotion de la solution à «deux États». En d’autres termes, reconnaître comme légitime le nettoyage ethnique contre le peuple palestinien depuis 1948 et le vol de la majorité des terres de la Palestine historique.
De son côté, l’orateur palestinien invité à cet événement a publié à plusieurs reprises des travaux dans des publications sionistes et a critiqué publiquement la résistance palestinienne. Quel peuple qui vit sous occupation et lutte pour son droit à l’autodétermination peut accepter un tel procédé inique et violent? Pourquoi des organisations qui se revendiquent de gauche trouvent légitimes d’organiser une conférence avec les bourreaux du peuple qu’ils disent soutenir? Accepterions-nous un tel procédé dans les luttes antiracistes ou contre les violences sexistes et sexuelles?
En tant que soutien au peuple palestinien, il est primordial de ne pas se faire le porte-parole du discours d’Israël. Il est donc grand temps de présenter la solution à un état non pas comme une impossibilité (comme c’est sous-entendu par de nombreuses ONG payées pour soutenir la lutte palestinienne) mais comme un manque de volonté politique claire, venant directement du soutien inconditionnel de l’Union Européenne à Israël.
Au lieu d’intensifier la lutte pour exposer la nature raciste et illégitime de l’occupation coloniale sioniste de la Palestine, ce type d’événement ne sert qu’à normaliser Israël en tant que projet de colonisation de peuplement construit sur un nettoyage ethnique. Un projet qui continue encore aujourd’hui. Une fois de plus, les atrocités de la colonisation ne sont reconnues (et encore) qu’en Cisjordanie, dans la bande de Gaza et à Jérusalem, tandis que la Nakba, le colonialisme et ses conséquences pour des millions de Palestiniens en Palestine de '48 et en exil restent méconnus et non discutés.
Au cours de cet événement, les Palestiniens qui ont dénoncé le cadre normalisant et violent de l’événement, critiqué les orateurs et défendu la résistance palestinienne ont été priés de se taire. Ils ont été sermonnés sur les difficultés rencontrées par l’orateur israélien en raison du harcèlement sioniste. Ils ont été traités d’une manière fondamentalement raciste, dans laquelle leurs expériences et leurs analyses en tant que Palestiniens ont été dégradées et rejetées. Pire encore, un organisateur a menacé d’appeler la police pour faire sortir les trois Palestiniens qui s’étaient exprimés.
Une autre personne a dit aux Palestiniens qui s’exprimaient – y compris les réfugiés palestiniens exilés de force de leur patrie et privés de leur droit au retour – que la priorité était “d’écouter les Palestiniens en Palestine”. Ce type de propos est fondamentalement raciste et souligne la méconnaissance de ces personnes sur ce que veut dire être un réfugié palestinien aujourd’hui qui se bat au quotidien pour son droit au retour en Palestine dont il a été chassé, y compris par la «gauche» sioniste.
Cette approche raciste est allée de pair avec l’approche de l’événement concernant le rôle de la Belgique et de l’Union européenne vis-à-vis de la Palestine. Plutôt que de reconnaître le rôle destructeur des puissances européennes en Palestine occupée depuis plus d’un siècle, le soutien européen au colonialisme sioniste, la persécution européenne des Palestiniens et la désignation de la résistance palestinienne comme “terroriste” par l’UE, ce cadre tente de situer les puissances impérialistes européennes comme des forces naïves nécessitant d’être «convaincue» et «éduquée».
L’Union européenne est un partenaire de la dépossession, du terrorisme d’État et de la Nakba dirigées contre le peuple palestinien. Cela est fait en faisant la promotion à bon compte de l’illusion de “deux États” et du soi-disant “processus de paix” de Madrid, d’Oslo et au-delà, qui n’a rien apporté d’autre que davantage de guerre, de dévastation et de colonialisme pour les Palestiniens. En faisant la promotion de la «paix», l’UE ne veut rien d’autres que la reddition du peuple palestinien. La Belgique, comme la France, l’Allemagne et l’ensemble des pays impérialistes, fait partie du problème et non de la solution!
Aujourd’hui plus que jamais, la solution réside dans le peuple palestinien et ses capacités à s’auto-organiser et résister pour une véritable justice et la libération de la Palestine et de la région. Cela ne pourra jamais être obtenu par la 'normalisation' ou une alliance avec le “sionisme libéral”, mais par la défaite du projet sioniste dans son intégralité.
Malgré tous les obstacles, les emprisonnements de masse, les exécutions et les attaques violentes, le peuple palestinien continue de résister. La résistance palestinienne et sa lutte armée représentent un véritable espoir non seulement pour le peuple palestinien, mais aussi pour tous ceux qui luttent pour se libérer de l’impérialisme et du colonialisme. Rejeter la résistance palestinienne c’est rejeter le droit du peuple palestinien à se défendre pour arracher ses droits fondamentaux.
Les colonisateurs ont leurs alliances basées sur le racisme, l’impérialisme, l’exploitation et la domination. Nous savons que la lutte palestinienne, comme l’a noté Ghassan Kanafani, “n’est pas une cause pour les seuls Palestiniens, mais une cause pour tout révolutionnaire… en tant que cause des masses exploitées et opprimées de notre époque”. Nous avons besoin d’un mouvement de solidarité avec la Palestine qui construise une alliance internationaliste avec tous les peuples du monde qui résistent au colonialisme, au sionisme et à l’impérialisme, qui soutienne la résistance palestinienne et qui lutte pour une Palestine libre de la mer au Jourdain.
Nous n’y parviendrons jamais par la 'normalisation'. Nous ne resterons pas silencieux et sans voix face aux tentatives de redéfinir la lutte palestinienne ou de nous ramener sur la voie du projet raté des “deux États”. Un projet qui n’a amené rien d’autres que plus de massacres, de démolitions de maisons et de pogroms.
En tant que Palestiniens en exil et en diaspora, Arabes et militants internationalistes, nous appelons toutes les organisations qui recherchent la justice pour la Palestine à prendre une position claire, à rejeter la 'normalisation' et à combattre les politiques qui visent à silencier les Palestiniens en lutte pour leurs droits.
Le sionisme, dans toutes ses variantes et nuances, est une idéologie coloniale et raciste qui doit être intégralement rejetée. «Ce qui est fait pour nous sans nous est contre nous.» De la mer au Jourdain, la Palestine sera libre!
Rédaction Samidoun Bruxelles -
08.03.23
Source: samidoun.net