FREE PALESTINE
14 septembre 2008

Les sombres stratagèmes d’Israël pour appâter les collaborateurs palestiniens

Les sombres stratagèmes d’Israël

pour appâter les collaborateurs palestiniens

Par Jonathan Cook > jcook@thenational.ae

La perpétuelle utilisation par Israël de collaborateurs palestiniens pour enraciner l'occupation et détruire la résistance palestinienne était autrefois le grand tabou du conflit au Moyen-Orient.
Lorsque le sujet a été abordé par les médias internationaux et locaux, cela le fût uniquement dans le cadre des défauts du système judiciaire de l'Autorité Palestinienne qui permettait l'exécution sommaire des collaborateurs par des lynchages de foule et des tribunaux populaires.


Cela commence à changer avec une série de reportages indiquant l'étendue de l'utilisation de collaborateurs par Israël et les techniques malsaines qu'il utilise pour les recruter. Il est devenu évident que la «coopération» est la base du succès d'Israël dans son maintien de l’occupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza.

La collaboration prend diverses formes, avec entre autres, des revendeurs de terres qui achètent des terres appartenant à des Palestiniens pour les revendre à des colons ou au gouvernement israélien, des agents armés qui aident les soldats israéliens dans leurs rafles et des infiltrés dans les organisations nationales et leurs branches armées qui font échouer les opérations de la résistance.

Mais la base de la collaboration est le système d’informateurs de bas niveau qui fournissent des informations sur leurs voisins et les dirigeants de la communauté sur lequel est basé le système de contrôle israélien.

Par exemple, des récents reportages parus dans les médias israéliens donnent à penser que le retrait de la bande de Gaza en 2005, loin de réduire les possibilités de collaboration, pourrait les avoir effectivement augmentées. L'actuel siège de la bande de Gaza – grâce auquel Israël gère en réalité tous les mouvements d'entrée et de sortie de la bande de Gaza - a fourni un moyen de pression pour encourager la connivence.

Le cerveau derrière cette stratégie est la police secrète israélienne, le Shin Bet, qui a récemment tourné son attention vers les malades de Gaza et leurs familles qui doivent quitter la bande de Gaza. Avec le manque d’hôpitaux et de médicaments, certains malades ont peu d'espoir de guérison sans traitement à l'étranger ou en Israël.

Selon la branche israélienne des Médecins Pour les Droits de l'Homme, le Shin Bet a exploité la détresse de ces familles en faisant pression sur eux pour accepter de collaborer en échange d'un permis de sortie.

Le mois dernier, le groupe a dévoilé les détails de 32 cas de malades de Gaza qui ont admis avoir été privés de laissez-passer après avoir refusés de devenir des informateurs.

L'un d’eux est Shaban Abu Obeid, 38 ans, dont le stimulateur cardiaque a été installé dans un hôpital israélien et a besoin d'entretien intermittent par des médecins israéliens.

Un autre, Bassam Waheidi, 28 ans, est devenu aveugle d'un œil après avoir refusé de coopérer et n’a pas pu obtenir de laissez-passer.
Mais ces cas ne sont que le sommet d'un énorme iceberg. Les Palestiniens qui refusent de collaborer ont tout intérêt à rendre public leurs problèmes. En revanche, ceux qui acceptent de devenir des informateurs n'ont pas intérêt à le faire.

Comme les autres régimes d'occupation, Israël a longtemps compté sur le mode de recrutement des collaborateurs le plus traditionnel : la torture. Même si une décision de la Cour suprême israélienne en 1999, a interdit la torture, les faits suggèrent que le Shin Bet a tout simplement ignoré la décision.

Deux groupes des Droits de l’Homme israéliens, B'Tselem et Hamoked, ont constaté l'an dernier que sept méthodes d'interrogatoire "spéciales" équivalant à de la torture sont encore régulièrement employées, dont les passages à tabac, les liens douloureux, les torsions du dos, les étirements du corps et les privations prolongées du sommeil.

La détention fournit d'autres possibilités de recrutement. Au cours des 17 dernières années, 150000 Palestiniens ont été poursuivis par le régime militaire. Selon le groupe israélien Yesh Din, 95% de ces procès ont terminé par des négociations, donnant encore une autre chance de convaincre un détenu de devenir un informateur en échange d'une réduction de peine.

Le partage de cellules dans le système pénitentiaire israélien, comme l’a fait observé Salah Abdel Jawwad, un spécialiste politique de Ramallah, est aussi le parfait environnement dans lequel le Shin Bet peut recueillir des données non seulement sur le détenu, mais aussi sur l'ensemble de la société d’où il ou elle vient.

Avec des centaines de milliers de Palestiniens qui sont passés par les prisons depuis 1967, Israël a été en mesure "de contrôler la population à un stade précoce", dit M. Abdel Jawwad, "en particulier parce qu'il est en mesure d'identifier ceux qui sont les futurs dirigeants de la société."
Un exemple de l'usage de pression au cours de la détention est sorti la semaine dernière, lorsque le secret a été levé sur le cas de Hamed Keshta, 33 ans, de la bande de Gaza. Traducteur pour des agences de presse européennes, il a été arrêté en Juillet quand il a essayé d'utiliser un laissez-passer pour entrer en Israël afin de rencontrer ses employeurs européens.

M. Keshta dit qu'il a été mis en garde à vue et qu’on lui a proposé de devenir un collaborateur. Quand il a refusé, les interrogatoires du Shin Bet "ont commencé à devenir sérieux", indique le journal Haaretz. Il a été détenu en garde à vue pendant un mois, accusé de graves chefs d'inculpation comme "atteintes à la sécurité" et conspiration pour commettre «un crime contre la sûreté de l'Etat".

Pendant des décennies, l'occupation a imposé un système de contrôle absolu sur la vie des Palestiniens qui les oblige à demander des laissez-passer soit au régime militaire qui les gouverne, appelé à tort Administration Civile, soit au Shin Bet.

La plupart des Palestiniens ont besoin d'un laissez-passer pour effectuer des tâches essentielles de la vie quotidienne comme la construction ou la modification d’une maison, franchir un checkpoint pour rendre visite à un parent ou aller à l’hôpital, franchir une porte dans le Mur de Séparation d’Israël pour cultiver leurs terres; conduire un taxi, obtenir des licences d’importation ou d’exportation; quitter les territoires occupés, y compris pour les entreprises; rendre visite à un parent en prison; obtenir une résidence pour un être cher, et ainsi de suite.

Il y a peu de Palestiniens qui n'ont pas besoin à un moment donné d'une telle "faveur" des autorités militaires, que ce soit pour eux-mêmes ou pour quelqu'un qu'ils connaissent. Et c'est à ce moment-là que la pression peut être exercée.

Dans son livre, Sharon et Ma Belle-Mère, Suad Amiry décrit ce processus de façon éloquente. En échange de l'aide ou du laissez-passer, une petite faveur est accordée par le régime d'occupation. Une fois acceptée, l’intégrité du bénéficiaire est compromise et petit à petit, les demandes sont plus importantes.

Ce sont ces petits gestes piégeant de larges couches de la population palestinienne - avec les menaces de violence physique contre de plus petites parties de la population - qui s’assurent du fait que la collaboration avec l'occupation soit endémique. Cela, comme le comprend bien Israël, crée un climat qui empêche le succès de la résistance, qui a besoin d’une organisation, d’une coopération et d’un échange de renseignements entre les factions armées. Dès que le cercle s'élargit au-delà de quelques individus, l'un d'eux est susceptible d'être un informateur.

Le résultat peut être vu dans l'échec lamentable de la plupart des actions armées de la résistance, ainsi que dans la facilité avec laquelle Israël assassine les dirigeants palestiniens qu’il "cible".

M. Abdel Jawwad appelle cette approche la «guerre psychologique» contre les Palestiniens, qui fait croire que leur société est "faible, malade et composée de personnages douteux".

En bref, cela encourage la fragmentation sociale, ce qui amène les Palestiniens à penser qu'il est préférable de poignarder dans le dos leur voisin avant d’être eux-mêmes poignardés.

Traduction : MG pour ISM

Source : http://www.antiwar.com/

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