FREE PALESTINE
16 juin 2008

Colonisation Juive

Al-Ahram Hebdo  Semaine du 11 au 17 juin 2008, numéro 718
Evénement

Colonisation Juive
Un symbole de la lutte populaire

Israël a donné le coup d’envoi à de nouvelles colonies à Jérusalem en
violation des accords internationaux. La judaïsation des territoires se
poursuit. Bil’in, village de Ramallah, résiste à cette politique et
symbolise toute la lutte en faveur de la terre palestinienne.

L’AIPAC mène le jeu

En réitérant sa volonté de construire de nouvelles colonies à Jérusalem
et de considérer la ville unifiée comme sa capitale éternelle, Israël
lance un défi à la communauté internationale, dont une Amérique au cœur
de l’embarras et où le dernier mot semble appartenir au lobby sioniste.

Al-Ahram Hebdo  Semaine du 11 au 17 juin 2008, numéro 718
Colonisation Juive. Israël a donné le coup d’envoi à de nouvelles colonies à Jérusalem en violation des accords internationaux. La judaïsation des territoires se poursuit. Bil’in, village de Ramallah, résiste à cette politique et symbolise toute la lutte en faveur de la terre palestinienne.
Un symbole de la lutte populaire

http://hebdo.ahram.org.eg/arab/ahram/2008/6/11/leve1.htm

C’était un jour de 2005 ... Bil’in, un village palestinien comme beaucoup d’autres. Un village situé à l’ouest de Ramallah et habité juste par un peu plus de 3  000 personnes. Jusqu’à ce jour, il n’était qu’inconnu. Depuis, il représente un problème pour la colossale entreprise coloniale israélienne, voire un emblématique centre de résistance pacifique contre le mur de l’apartheid.

Bien que la colonisation juive ait englouti la majorité de la Palestine historique et se soit étendue pour comprendre les territoires occupés en juin 1967 et notamment Jérusalem-Est, ses banlieues Hébron et Bethléem, Bil’in est autre.

Depuis l’arrivée des premières pelleteuses sionistes dans ce village venues sur décision israélienne pour s’emparer de 75 % de sa superficie pour la joindre à une colonie voisine et construire une partie du mur de séparation, la résistance s’est déclenchée et sans le moindre coup de feu. Ce territoire qui ne dépasse pas les 1 000 feddans (un feddan : 0,42 ha) a organisé sa première campagne contre les tentatives sionistes, et depuis cet instant, il a joui d’une célébrité mondiale. Tous les vendredis se déroule une campagne de résistance pour attirer l’attention du monde sur son drame. La participation à la marche du vendredi est devenue une partie intégrante de la visite de tout responsable international neutre. Ainsi, pendant plus de trois ans et demi, ce village, pôle des activistes des droits de l’homme de Palestine voire du monde entier, dérange les forces d’occupation israéliennes.

A Tel-Aviv, l’annonce se faisait : « Nous allons construire 121 logements à Har Homa, et 763 autres à Pisgat Zeev, des quartiers de colonisation érigés à Jérusalem-Est », a indiqué le porte-parole du ministère de l’Habitat, Eran Sidis. De plus, le ministre de l’Habitat, Zeev Boïm, a annoncé au gouvernement la publication la semaine d’après d’appels d’offres en ce sens. Il a précisé que cette annonce a été faite à l’occasion de la célébration du « 41e anniversaire de la réunification de la ville » ... C’est-à-dire la conquête et l’annexion de sa partie orientale par Israël en juin 1967. Le 30 juillet 1980, une « loi fondamentale » votée par le Parlement israélien a proclamé Jérusalem « réunifiée et capitale éternelle d’Israël ».

A Bil’in, le symbole, la participation du vice-président du Parlement européen Luisa Morgantini et d’un juge italien de renommée, Guilio Toscano, et le Nobel de paix Mairread Corrigan, en plus des dizaines d’activistes palestiniens n’a pas empêché les Israéliens de tirer des gaz lacrymogènes contre cette marche opposée à la colonisation. Des blessés tombent, mais sans annuler pourtant pas un match de football entre activistes palestiniens et autres européens.

Ce vendredi se tenait la troisième conférence internationale de la résistance populaire ... Occasion d’afficher la détermination des Palestiniens de rester attachés à leurs terres en dépit de toutes les mesures israéliennes de colonisation, de judaïsation et de changement de la géographie.

Jebril Rajoub, ancien chef de la sécurité préventive, tire le premier ballon, à côté de lui la parlementaire européenne ... le jour même a été lancé l’Euro 2008. Le message est clair : il y a ici un peuple qui est privé de jouer sur son propre terrain, qui lui est sans cesse confisqué. Quelques minutes après le sifflet de l’arbitre annonçant le début du match, le terrain est inondé de bombes lacrymogènes et le match est finalement suspendu.

Le lendemain, la parade a défilé jusqu’au mur. C’était l’occasion pour Salam Fayad, chef du gouvernement palestinien, de lancer aux Israéliens : « La politique de colonisation et du fait accompli ne réalisera pas la sécurité d’Israël ». D’autre part, le chef du cabinet de la présidence palestinienne Rafic Al-Hosseini a mis l’accent sur l’importance de l’action populaire et de la mise au point de nouvelles méthodes pour faire face à la politique de colonisation. « La libération de Jérusalem, la destruction du mur, le démantèlement de la colonisation, la libération des Palestiniens retenus dans les prisons israéliennes, la réalisation des droits du peuple palestinien garantis par la légitimité internationale passe par Bel’in ». Dans un message adressé par l’ancien président Jimmy Carter qui a provoqué l’ire d’Israël et de l’establishment américain, pour ses récentes rencontres avec le Hamas, il a souligné : « Vous êtes l’expression du fait que le rêve palestinien ne pourra être détruit ... la poursuite de la politique de saisie des terres palestiniennes est l’un des plus dangereux obstacles face à la paix ». Un autre message de soutien, celui de l’ancien directeur général de l’Unesco, Frederico Mayor, sans oublier des interventions d’activistes israéliens et d’autres pays du monde. Pour eux, la résistance populaire doit être adoptée comme dans le cas de la première Intifada.

Malgré un jugement de la Cour suprême israélienne en septembre 2007 demandant au ministère israélien de la Défense de modifier le tracé du mur parce qu’il passe au milieu des terres de Bil’in, rien dans ce contexte n’a avancé. En fait, le mur sépare les colonies de Metityahu Mizrah, Modi’in Elite et Hashmonaim des villages palestiniens de Bil’in, Deir Qedis et N’ilin occupant ainsi environ 260 donèmes (un donème=1 000 mètres carrés) des territoires palestiniens outre un terrain de 1 600 donèmes entre le mur et ladite zone verte. Le tracé du mur dévoile sans équivoque que l’objectif est d’assurer la sécurité d’une colonie qui n’est pas encore construite, il permet en autre d’élargir les colonies en place.

Ce jugement avalisait cependant de facto le vol de la moitié des terres de Bil’in, puisqu’il a rejeté la demande du conseil du village et du mouvement « la paix maintenant » demandant de suspendre le projet du « quartier colonial » qui prend place sur les terres palestiniennes. Ce qui signifie concrètement que les colons qui ont fait maison dans le village palestinien ne seront pas sommés d’abandonner les terres à leurs propriétaires. Du coup, la première phase de la colonie Metityahu Mizrah restera inchangée, seule la seconde phase sera suspendue. L’armée n’a pas jugé bon de modifier jusqu’aujourd’hui le tracé du mur ni le départ des colons. La prétendue démocratie israélienne se soumet au bon vouloir de l’armée d’occupation.

Un exemple de courage

Une situation qui n’a fait que motiver plus les résistants ; tel ce récit qui nous provient de l’héroïque village. Achraf Abou-Rahme prend une initiative personnelle. Il vit dans un « avant-poste » du village, une petite cabane sur la terre des villageois, derrière le mur, près de la colonie. Il se tient prêt, là, pour tenter d’empêcher toute construction sur la terre confisquée, pour prouver que cette terre n’est pas « disponible » ni « abandonnée ». La colonie de Modi’in Elite est actuellement en expansion, en violation de tous les accords et de toutes les promesses du gouvernement israélien à Annapolis pour arrêter ces champignons illégaux. Les colons apportent des mobil-homes chargés sur des camions et utilisent une énorme grue pour les mettre en place. Achraf voit là une occasion unique et il n’hésite pas une seconde, il se précipite et escalade la grue, placée en plein milieu du chantier des colons : « Quand j’arrive à trois heures avec Neta Golan, co-fondateur d’ISM (International Solidarity Movement), 4 militants israéliens d’anarchistes contre le mur sont sur les lieux depuis une demi-heure ». Achraf a déjà passé trois heures sur la grue, perché au plus haut qu’il a pu grimper. Son drapeau palestinien flotte au vent, on le voit de loin, message on ne peut plus clair : « Arrêtez d’étendre les colonies sur notre terre palestinienne ».

Des colons furieux arrivent de la colonie voisine Matiyahu East, ils n’arrêtent pas de pousser des cris, de hurler, d’écumer, cherchant à se saisir des appareils photo et nous attaquant à jets de pierres. Après un moment, la police israélienne écarte les colons bagarreurs sur le côté et nous laisse entrer sur le chantier où policiers, soldats, ouvriers et colons sont en pleine discussion. Achraf est plus que content de voir Neta et d’autres amis au milieu de cette foule hostile. Donc, nous sommes là, vilipendés par les colons, mais exprimant physiquement notre solidarité, soit directement en étant proches de la grue, soit à quelques mètres derrière une fois que les soldats nous aient obligés à nous écarter. Seul, un rabbin réussit à convaincre les colons juifs de quitter le chantier … Quelques mots lui ont suffi.

Mohamad Khatib, militant bien connu et habitant Bil’in, rejoint Neta, et ensemble, ils exigent un traitement juste pour Achraf, le négocient avec la police. Quand la police assure qu’un professionnel de l’équipe de négociations va venir et qu’Achraf sera protégé de la violence des colons, celui-ci accepte finalement de descendre de la grue, plus de 4 heures après l’avoir escaladée. Durant tout ce temps, il n’a eu que son drapeau ; pas de nourriture, pas d’eau.

Quand la grue est baissée, les colons s’approchent, tapent des mains et se mettent à railler. Je ressens une profonde colère et une grande déception. Evidemment, il n’y a pas de place pour la compréhension. Mais, comme le dit Neta, pour son action symbolique, Achraf « mérite d’être considéré comme un héros ».

Qu’il s’agisse des colonies en tant que telles ou du mur de la honte, de l’apartheid, les violations israéliennes s’inscrivent dans le cadre d’une même logique, voire d’une véritable croyance. Cette idée de retour vers une terre « biblique » rend aléatoire tout dessein politique, c’est-à-dire la négociation pour parvenir à une solution conforme aux
différents accords. Résister, c’est ce qui reste aux Palestiniens.

Achraf Aboul-Ho

Une violation permanente

Les colonies ont toujours été l’obstacle principal quant à mettre en application tout accord de paix. Oslo, Camp David, Wye Plantation, Feuille de route, à chaque fois, Israël signe une série d’engagements incluant de geler les colonies, mais ce sont des engagements que jamais, au grand jamais, il n’a pas remplis. Et sa politique de colonisation, poursuivie toujours envers et contre tous les accords signés.

Accord d’Oslo 1993

C’est Israël, lui-même, qui a dit approuver l’accord d’Oslo avec son 7e paragraphe, où il est écrit : « Nous nous sommes engagés à ce qu’aucune des parties ne prenne de mesures unilatérales modifiant la situation sur le terrain, avant l’achèvement des négociations sur un statut définitif ». Paradoxalement, au lendemain de la signature des accords d’Oslo en 1993, la colonisation s’est fortement accélérée. Un effort particulier a été déployé pour encercler Jérusalem-Est et l’isoler des territoires palestiniens. Entre l’accord d’Oslo de 1993 et l’automne 2000, le nombre de colons a quasiment doublé. 80 000 colons se sont installés en Cisjordanie depuis les accords d’Oslo.

Accords de Wye Plantation 1998

Sur la question des colonies, Wye Plantation était assez obscur. Cet accord prévoyait un redéploiement de 13 % de la Cisjordanie, mais ne fournissait aucune garantie sur l’arrêt de la colonisation. Un mois après l’approbation les accords de Wye Plantation, Benyamin Netanyahu a d’ailleurs annoncé le lancement des travaux de construction de logements à Har Homa à Jérusalem-Est.

Et c’est en novembre 1998 que plusieurs dizaines d’hectares de terrains seront confisqués près d’Hébron en Cisjordanie pour édifier une route, et douze autres routes de « contournement » tracées en Cisjordanie. De plus, 1 025 logements ont été construits. « Ne peut-on faire la paix avec les Palestiniens et conserver Beil El (une colonie au nord de Ramallah) ? Et Ofra, qui est une implantation située auprès d’un des points les plus stratégiques (...). Eux, ils ont déjà Jénine, Naplouse, Ramallah, Hébron et Bethléem », dit Ehud Barak, le successeur de Netanyahu, qui a demandé que soient introduits des changements dans le texte de Wye Plantation quant au calendrier et à l’ampleur des retraits de Cisjordanie.

Sommet de Camp David 2000

Les négociations du Camp David ont été avortées devant l’insistance israélienne à conserver les colonies et 9 % de la Cisjordanie. Après l’échec de ce sommet et suite à l’éclatement de la seconde Intifada, le rapport établi par la commission internationale, dirigée par le sénateur américain George Mitchell, souligna le fait que les colonies juives ne pouvaient aller de pair avec l’établissement de la paix. La commission en recommanda le gel, présenté comme condition d’un cessez-le-feu et d’une reprise des négociations. Au contraire, Ariel Sharon approuva un budget supplémentaire de 400 millions de dollars pour les colonies.

Feuille de route 2003

La Feuille de route, élaborée par le Quartette, appelle à ce que « le gouvernement d’Israël gèle toute activité de colonisation, conformément au rapport Mitchell, y compris la croissance naturelle des colonies et démanteler les avant-postes non autorisés ». Et que s’est-il passé sur le terrain ? Un afflux de nouveaux colons a eu lieu. « Des colonies peuvent être construites, mais il n’est pas besoin d’en parler et de
venir danser à chaque fois qu’un permis de construire est délivré. Construisons-les mais sans en parler », dit Ariel Sharon à son gouvernement en 22 juin 2003.

Et c’est entre janvier et avril 2003 qu’Israël a émis 134 appels d’offres. A la suite desquels 1 646 logements ont été construits.

Conférence d’Annapolis 2007

Une semaine après le sommet d’Annapolis, le gouvernement israélien annonce de nouvelles constructions à Har Homa et à Pisgat Zeev.

En mars 2008, la mairie de Jérusalem annonce à son tour 600 logements nouveaux à Jérusalem-Est, ce plan faisant partie « d’une initiative globale pour la construction de 40 000 unités de logement dans la ville afin de faciliter à de jeunes couples l’accès au logement ».

Ces jours-ci, Olmert vient d’annoncer la construction de 884 logements juste quelques jours avant sa rencontre avec Bush pour rendre compte des progrès du sommet d’Annapolis.

Aliaa Al-Korachi

Al-Ahram Hebdo  Semaine du 11 au 17 juin 2008, numéro 718


Une véritable machine infernale à terrasser la paix. Tel semble bien être le système israélien en marche. A l’heure où des efforts et médiations tous azimuts sont déployés et que l’exécutif américain tente désespérément de parvenir à la moindre percée avant la fin du mandat du président George W. Bush, Israël enfonce le clou. Ainsi, il a relancé la semaine dernière la colonisation à Jérusalem-Est, occupée et annexée, et délibérément, sans doute à la veille d’une nouvelle rencontre entre son premier ministre Ehud Olmert et le président palestinien Mahmoud Abbass.

Un des principaux négociateurs palestiniens, Saeb Eraqat a aussitôt sévèrement condamné à juste titre cette mesure, comme « toutes celles qui perpétuent la colonisation ». Et de préciser : « Les Etats-Unis doivent y mettre un terme. Il est clair que les efforts de paix vont être affectés par cela ». Et c’est là où le bât blesse. L’Amérique, la superpuissance mondiale, celle qui est pratiquement mandatée par toutes les parties pour trouver une solution ou même une petite issue, est bien loin de remettre son allié à l’ordre. Côté israélien, on a jubilé comme pour mieux défier les Palestiniens et les pays arabes qui, comme l’Egypte, tentent de parvenir à une accalmie. Ainsi, Mark Regev, porte-parole du premier ministre Ehud Olmert, a dit que ces constructions « ne contredisaient nullement le processus de paix, puisqu’elles étaient prévues dans des quartiers juifs de Jérusalem qui feront partie intégrante d’Israël dans tout accord de paix ». Le maire de Jérusalem, Ouri Loupoliansky, s’est pour sa part félicité de la relance de la construction à Jérusalem-Est, estimant qu’elle répondait « aux besoins urgents de logements de la population juive ».

Israël a pour principal but d’assurer sa mainmise sur de grands blocs d’implantations en Cisjordanie et les quartiers juifs de Jérusalem, à la faveur d’échanges territoriaux. Un vrai diktat en quelque sorte. Et l’Etat hébreu, comme il est d’accoutumée depuis la Nakba, veut imposer le fait accompli ; ainsi, plus de 200 000 Israéliens ont été installés depuis 1967 dans une douzaine de quartiers de colonisation érigés à Jérusalem-Est.

Pourtant, la célèbre feuille de route, un plan international de paix lancé en 2003, prévoit notamment la fin des violences et le gel de la colonisation juive. L’Etat hébreu, lui, considère l’ensemble de Jérusalem comme sa « capitale unifiée et éternelle », ce que ne reconnaît pas la communauté internationale, et reste contraire aux différentes résolutions internationales. Les provocations se suivent et se ressemblent : Olmert a affirmé que son pays exercerait sa souveraineté sur Jérusalem « pour l’éternité (...). La souveraineté d’Israël sur la Jérusalem historique et sainte durera pour l’éternité.
Jérusalem constitue le cœur du peuple juif ». Alors que des factions palestiniennes, à l’exemple du Hamas, sont décriées pour un langage intégriste qu’on leur prête, voilà, Israël qui a recours à des arguments tout aussi fondamentalistes.

Passivité américaine

Côté américain, c’est juste une protestation de pure forme. La Maison Blanche a mis en garde Israël contre la construction programmée des 884 logements à Jérusalem-Est indiquant que la construction de telles colonies « exacerbe les tensions » avec les Palestiniens. « Notre position sur les colonies est que nous ne pensons pas que de nouvelles colonies doivent être construites. Et nous savons que cela exacerbe les tensions quand il s’agit des négociations avec les Palestiniens », a déclaré la porte-parole de la Maison Blanche, Dana Perino.

Les Etats-Unis ont toujours condamné la colonisation et l’annexion de Jérusalem, mais sans initiative réelle. De plus, le candidat démocrate Barack Obama, que de nombreux cercles moyen-orientaux concéderaient comme une sorte d’espoir pour une politique américaine nouvelle, a estimé mercredi dernier que Jérusalem devait « rester la capitale d’Israël » et « demeurer indivisible », lors d’un discours à Washington devant les délégués de l’American Israel Public Affairs Council (AIPAC), le principal lobby pro-israélien aux Etats-Unis. Ce discours du candidat démocrate, ouvertement favorable à Israël, a ainsi abordé l’un des dossiers les plus explosifs des pourparlers israélo-palestiniens dans un point de vue plus royaliste que le roi. Et Olmert l’a bien ressenti : il s’est empressé de qualifier les propos du candidat démocrate de « très émouvants ». « Son apparition était très impressionnante. Ses mots sur Jérusalem étaient très émouvants », s’est félicité M. Olmert en proclamant que si « Obama est élu, nous discuterons avec lui de toutes les questions si et quand elles sont soulevées ».

Par souci de neutralité, l’ambassadeur d’Israël à Washington a, lui, fait plus. « Les discours que les trois candidats à la présidence américaine (Barack Obama, Hillary Clinton pour les Démocrates et John McCain pour les Républicains) ont prononcés devant les délégués de l’AIPAC ont été très importants et très encourageants », a affirmé Dan Meridor à la Radio publique. Le diplomate a aussi minimisé la portée des déclarations de M. Obama en rappelant que le « Congrès a reconnu à plusieurs reprises dans le passé Jérusalem réunifiée comme capitale d’Israël, alors que l’Administration américaine faisait preuve de plus de prudence ». Il faisait ainsi allusion au projet souvent évoqué par des présidents américains, mais jamais réalisé, de transférer l’ambassade des Etats-Unis à Jérusalem. Du côté palestinien, le président Mahmoud Abbass ainsi que les islamistes du Hamas ont dénoncé les propos du candidat démocrate.

« Nous rejetons ces propos. Jérusalem est l’un des dossiers en cours de négociation. Tout le monde sait parfaitement que Jérusalem-Est a été occupée en 1967 et nous n’accepterons pas un Etat sans Jérusalem, cela doit être clair », a affirmé Mahmoud Abbass. Face à la colère des dirigeants palestiniens, Obama a mis le lendemain un bémol au soutien apporté la veille à Israël sur la question de Jérusalem. « Evidemment, il reviendra aux parties de négocier sur ces questions. Et Jérusalem fera partie de ces négociations », a dit le sénateur de l’Illinois sur CNN.

Ahmed Loutfi

La plus grande colonie israélienne

Maalé Adumim est l’exemple le plus flagrant de la volonté israélienne de battre en brèche la population palestinienne.

Maalé Adumim, située à l’est des frontières prolongées de Jérusalem-Est, est la plus grande colonie israélienne. Elle fut bâtie en 1975, sous le premier gouvernement Rabin. Le projet israélien consiste à entourer la population palestinienne de Jérusalem-Est par des colonies juives ; ainsi, la souveraineté juive sera-t-elle légitimée sur l’ensemble de la région de Jérusalem.

Avec une population de 32 000 personnes, la colonie s’étend sur 53 kilomètres carrés, soit une surface plus vaste que Tel-Aviv et équivalante à la moitié de Paris.

Maalé Adumim a été bâtie sur des propriétés prises aux Palestiniens :
Abou-Dis, Al-Izriyeh, Al-Issawiyeh, Al-Tour, Anata
.

Cette colonie possède énormément d’atouts aux yeux du pouvoir israélien, car elle est située sur la route qui relie Jérusalem et Jéricho, le développement de Maalé Adumim isole Jérusalem-Est du reste de la Cisjordanie et bloque les relations interpalestiniennes entre Ramallah et Bethléem, or en prévenant toute continuité territoriale, Maalé Adumim rend problématique la viabilité de l’éventuel futur Etat palestinien.

Classée comme zone de développement hautement prioritaire, la colonie reçut une myriade de bénéfices tels que des subventions au logement, des réductions d’impôts et des prêts à faible intérêt. Par la suite, tous les gouvernements successifs entreprirent des programmes massifs : des développements des infrastructures, des constructions de routes et des transports urbains.

Cette injection massive de ressources favorisa la croissance rapide du nombre de colons. En octobre 1992, Maalé Adumim devint la première colonie à obtenir le statut de ville.

Le bloc de Maalé Adumim, tel qu’il a été conçu, est censé séparer le nord de la Cisjordanie (Ramallah, Jénine et Naplouse) de son sud, Hébron, Bethléem et Beit Jala. Israël a relié Maalé Adumim à Jérusalem-Ouest par des tunnels construits en dessous de la montagne Al-Macharef. L’objectif étant de regrouper toutes les concentrations démographiques arabes à Jérusalem derrière le mur de séparation et, par conséquent, de s’assurer que les Palestiniens ne deviennent une majorité dans la Ville sainte.

Au fil des années, les autorités civiles et militaires ont publié une myriade de lois et règlements concernant les colons. Deux systèmes législatifs coexistent donc sur le même territoire :

— Les colons ont les mêmes droits que ceux des citoyens d’Israël.

— Les Palestiniens, par contre, sont soumis à la loi militaire et jugés le plus souvent par des cours militaires.

En 2004, un plan d’élargissement de la colonie, baptisé le projet « E1 », a été lancé. La construction de la colonie a été annoncée depuis 1994, à l’époque de Ytzhak Rabin. Elle a ensuite été approuvée en 1997, et en 2004 son infrastructure est lancée. Avec 4 000 logements et 3 hôtels. Le plan « E1 » est considéré comme une partie importante de l’ensemble du projet du « Grand Jérusalem », qui est un projet israélien destiné à annexer une énorme portion de la Cisjordanie et à confirmer son annexion en 1967 de la Jérusalem-Est palestinienne.

Le projet du « Grand Jérusalem » a été approuvé officiellement et publiquement par la Knesset le 28 mai 1997.

Chaimaa Abdel-Hamid

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