FREE PALESTINE
28 septembre 2020

Pénuries, promiscuité, coronavirus: la triple peine de Gaza en 2020

Source: Externe

En réduisant l’approvisionnement en électricité, les sanctions israéliennes du mois d’août ont négativement affecté la gestion de l’épidémie dans l’enclave palestinienne

 

Le petit miracle de la bande de Gaza n’est plus. Après avoir repoussé l’épidémie de Covid-19 pendant plus de six mois, la courbe gazaouie ressemble désormais à celle des autres pays. Les autorités locales faisaient état à la mi-septembre d’un funeste record: 108 nouveaux cas détectés, portant le nombre total à 1927, dont 15 décès et 243 guérisons.

Tout avait pourtant bien commencé. En mars, l’Organisation mondiale pour la santé (OMS) déclare que la diffusion du coronavirus a atteint le stade de pandémie. Alors que les pays du monde entier se mobilisent pour lutter contre le virus et font l’apprentissage de la vie en quarantaine, les 13 années de siège et de blocus semblent donner une longueur d’avance à Gaza.

L’épidémie paraît de surcroît s’être arrêtée aux frontières. Comme si l’enclave palestinienne avait retourné à son avantage le blocus aérien, terrestre, et maritime dont elle fait l’objet depuis 2007. Comme si l’épidémie représentait aussi un moindre mal aux vues des peines locales. «Il y a des virus bien plus grands», confiait à la mi-mars un habitant de ce territoire à 'L’Orient-Le Jour'.

Les autorités mettent en place une stratégie de prévention qui semble fonctionner. Parmi la série de mesures, l’isolation des nouveaux venus dans des centres de quarantaine implantés à proximité des postes-frontières.

Mais le 24 août, les premiers cas sont enregistrés en-dehors des centres, lorsque quatre personnes d’une même famille sont testées positives au coronavirus.

Les autorités réagissent en imposant un confinement général, un couvre-feu, la fermeture des écoles et une séparation des cinq régions qui composent le territoire. Trop tard, le bilan sera désormais exponentiel. Comme ailleurs, la peur d’une contamination en chaîne fait aujourd’hui partie du quotidien.

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Conséquences du blocus

Cette nouvelle phase de propagation n’alarmerait pas autant si les circonstances propres au contexte politique et sécuritaire ne préparaient pas le terrain à une catastrophe humanitaire de taille.

«Les gens savent que nous n’avons pas les moyens d’y faire face», observe Salah Matar, un jeune Gazaoui de 27 ans.

Les restrictions dues au siège entraînent une série de carences qui rendent la population particulièrement vulnérable: eau polluée à 96%, pénurie alimentaire… Le système immunitaire des habitants s’est fragilisé au fil des années.

Sur le plan collectif, c’est l’infrastructure médicale et sanitaire qui est insuffisante, déjà qu’elle l’est en temps normal. «Les carences impliquent que certains doivent aller se faire soigner en Cisjordanie pour des maladies comme le cancer, mais la fermeture régulière des points de passage complique la situation», témoigne Salah Matar.

Lorsqu’une pandémie fait flancher les systèmes de santé parmi les pays les plus développés au monde, le tableau est donc forcément plus sombre à Gaza. Kit de dépistage, matériel de protection, appareils respiratoires et médicaments: la plupart des équipements de base manquent.

«La majorité des services disponibles viennent en réalité des aides et soutiens extérieurs ou des autorités de Ramallah», admet le Dr Hassouna, exerçant dans un hôpital local. Les hôpitaux n’ont pas la capacité d’accueillir tous les nouveaux cas, et la réallocation des ressources existantes pour le Covid-19 affecte le traitement des autres malades.

Au-delà des conséquences du siège, les conditions de vie locale empêchent de faire barrage au virus comme c’est le cas ailleurs. Les méthodes de confinement ou de distanciation sociale sont difficiles à mettre en place compte tenu de la forte concentration de la population: une moyenne de 30.000 habitants par km², soit l’un des territoires les plus denses au monde.

Dans le camp de Shati, plus de 85.000 réfugiés cohabitent sur un peu plus d’un demi-km². La promiscuité, les rues étroites et la rareté des infrastructures rendent chimérique tout confinement.

Les salaires, souvent journaliers, impliquent également que chaque journée confinée est une perte difficilement soutenable lorsque les revenus sont à la base déjà insuffisants.

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Au mois d’août, s’ajoute une difficulté supplémentaire: la pénurie de carburant, due à des mesures israéliennes visant à sanctionner des incidents sécuritaires avec le Hamas, réduit de manière drastique la quantité de fuel importée et pénalise directement la population, qui ne bénéficie plus que de quelques heures d’électricité par jour.

Les hôpitaux ne peuvent plus fonctionner normalement. «La suspension de certaines machines médicales, les dialyses ou bien les appareils respiratoires, a causé des morts», remarque Salah Matar.

Dans le cadre de la lutte contre l’épidémie, les coupures «augmentent le niveau de dangerosité de la maladie», estime pour sa part le Dr Marwan Homs, en charge de l’unité Covid-19 au sein de l’hôpital turc, tout en incitant les habitants à ne pas respecter le confinement en raison de la chaleur du mois d’août.

Cinq ONG israéliennes réagissent fin août en adressant une requête à la Cour suprême israélienne afin de mettre fin aux restrictions imposées. «Une série de mesures qui visent à nuire délibérément à la population», estiment les organisations de défense des droits de l’homme qui considèrent les sanctions comme une forme de punition collective contraire au droit international.

Un accord, début septembre, permet de lever les sanctions. Mais l’électricité continue de manquer dans les foyers jusqu’à 12 heures par jour.

Stéphanie Khouri -

21.09.20

Source: OLJ

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