FREE PALESTINE
10 mars 2009

La conférence des donateurs d’Israël

La conférence des donateurs d’Israël

Amira Hass

Haaretz, 4 mars 2009

http://www.haaretz.co.il/hasite/spages/1068485.html

Version anglaise : The Israel donors conference

www.haaretz.com/hasen/spages/1068553.html

L’importance des sommes promises à l’Autorité Palestinienne par les pays donateurs est à la mesure de leur soutien à Israël et à sa politique. La quote-part du contribuable américain au compte en banque du gouvernement de Ramallah a les dimensions d’un nain, comparée aux sommes énormes que son gouvernement verse chaque année à Israël. Impossible d’être impressionné par la promesse américaine de 900 millions de dollars (dont les deux tiers vont au renforcement du gouvernement de Salam Fayad et le reste à Gaza) et d’oublier les 30 milliards de dollars que les Etats-Unis ont promis d’accorder à Israël en soutien à la sécurité, d’ici à la fin 2017, comme le rappelait la semaine dernière un rapport d’Amnesty.

Il faut voir dans ces 900 millions de dollars promis aux Palestiniens à Charm el-Cheikh une part du paiement fixe de l’Amérique à Israël. En tant que puissance occupante, Israël est tenu d’assurer le bien-être de la population placée sous son contrôle. Mais Israël lui porte atteinte et les Etats-Unis (comme d’autres pays) s’empressent alors de payer les dégâts.

Les administrations Clinton-Bush – et Barak Obama semble leur emboîter le pas – ont effacé la définition « occupation israélienne » de leur dictionnaire et ont contribué à ce qu’Israël se dérobe à ses obligations inscrites dans le droit international. Les milliards de dollars qu’Israël reçoit des Etats-Unis pour son armement et son développement en matière de défense – et qui ont une part non négligeable dans la destruction de Gaza – s’intègrent à la propagande efficace d’Israël selon laquelle les tunnels de Rafah et les roquettes Grad constituent pour lui une menace stratégique et font partie de l’offensive du terrorisme islamiste contre les régimes progressistes.

L’Occident a gonflé le mouvement du Hamas et sa force militaire jusqu’à des proportions mensongères qui ont permis un blocus prolongé et trois semaines de déchaînement militaire israélien. Cette amplification aide le Hamas à se présenter, dans la compétition interne palestinienne et arabe, comme la vraie force patriotique.

Les centaines de millions d’euros donnés ou promis pour Gaza – comme si Gaza était frappé de catastrophes naturelles – sont éclipsés par les liens économiques unissant l’Europe et Israël. Les pays occidentaux, soucieux d’apporter une aide humanitaire aux Palestiniens, achètent aussi à Israël des armes et du savoir-faire en matière de sécurité, le tout développé dans les conditions de laboratoire offertes par l’occupation qui fabrique des crises humanitaires en série.

Et le milliard de pétrodollars ? Tout d’abord, ils ont été créés à partir d’une ressource naturelle et il est simplement logique qu’elle serve aux peuples arabes. Deuxièmement, ils ont été promis lors d’une conférence qui boycottait Gaza (ni le Hamas, ni des hommes d’affaires ou des militants sociaux de la Bande de Gaza n’y ont participé). C’est comme ça que l’Arabie Saoudite contribue au veto américain et israélien à une réconciliation interne palestinienne.

Chaque centime versé aux Palestiniens – tant au budget du gouvernement de Ramallah que pour les soins médicaux à des enfants blessés par les pilotes et les troupes blindées israéliennes – est un signal donné à Israël qu’il peut poursuivre ses efforts en vue d’imposer à l’élite palestinienne un acte de capitulation. « Objectif : capitulation » – on ne peut comprendre autrement le fait que 16 ans après le lancement d’Oslo, un Etat palestinien n’a pas vu le jour. Quand donc Shimon Peres, Ariel Sharon et Tzipi Livni se sont-ils mis à parler de « deux Etats » ? Seulement après que leurs bulldozers et leur bureaucratie militaires furent parvenus à écraser la base physique réaliste d’un Etat palestinien : tous les territoires du 4 juin, y compris Jérusalem-Est, Gaza comme composante inséparable de l’Etat, zéro colonies – sans Gilo et sans Maale Adoumim.

Dans le courant des années 90, il était encore possible de considérer les dons aux Palestiniens comme l’expression d’une confiance et d’un espoir dans les dispositions d’Israël à se libérer du régime d’occupation qu’il avait créé. Mais pas en 2009. On ne peut comprendre que comme un soutien à la politique d’Israël le fait que ces mêmes pays continuent de verser ici des centaines de millions de dollars destinés à éteindre les feux allumés par cette politique, sans éteindre l’origine du feu.

(Traduction de l'hébreu : Michel Ghys)

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