FREE PALESTINE
9 février 2009

Boycotter ou ne pas boycotter les élections ?

Boycotter ou ne pas boycotter les élections ?

Telle est la question

Zohir Andreus

Ynet (Yediot Aharonot), 4 février 2009

www.ynet.co.il/articles/0,7340,L-3665560,00.html

Pour pouvoir rester sur ma terre natale, j’ai dû prendre un passeport israélien. Mais savoir si participer aux élections sera utile ou nuisible n’est pas encore clair.

Il ne reste que quelques jours jusqu’aux élections et j’en suis encore à considérer la question fondamentale : les boycotter ou voter pour l’un des partis arabes ? Je suppose que beaucoup de Palestiniens vivant en Israël (par droit et non par grâce) doivent aussi mariner dans semblable hésitation.

La situation optimale du point de vue de la minorité arabe nationale palestinienne dans l’Etat des Juifs, serait un boycott collectif, les trois partis arabes déclarant boycotter les élections en signe de protestation contre la politique du gouvernement israélien à Gaza, qui a tué plus de 1300 Palestiniens, des gens de notre peuple, des enfants pour moitié, et contre la politique de discrimination raciste qui est notre lot depuis la création de cet Etat sur les ruines de nos villages et par l’expulsion d’une partie de notre peuple.

Si les dirigeants palestiniens en Israël prenaient cette décision radicale et amenaient les électeurs à rester à l’écart et à ne pas se rendre aux urnes, ils démontreraient publiquement une maturité nationale et morale, et lanceraient un message tranchant comme un rasoir à ceux qui tiennent la barre de l’Etat : nous sommes capables de nous organiser et de prouver, pour qui a les yeux en face des trous, que l’idéologie importe plus que les sièges. Mais l’absence d’accord général entre les Palestiniens en Israël impose de redoubler de précaution dans le processus de prise des décisions : le ventre dit de voter, la tête demeure péremptoire et refuse un compromis qui irait en deçà d’un boycott des élections législatives sionistes.

La section nord du Mouvement Islamiste, dirigée par le cheikh Raed Salah, a fait savoir qu’elle avait décidé de boycotter les élections. Le Mouvement a attaqué de front les partis arabes avec ce mot d’ordre clair : il n’est pas possible qu’alors qu’à Gaza on compte les cadavres des martyrs, on compte des voix à l’intérieur de ce qu’on appelle la Ligne Verte. Le mouvement, nationaliste et laïc, Benei Hakfar a déclaré lui aussi boycotter les élections, pour des motifs idéologiques.

A l’inverse, il y a ceux qui soutiennent qu’on ne peut pas abandonner le Parlement à Avigdor Lieberman et ses semblables, et qu’il faut y être pour le freiner, lui et les autres racistes. Le boycott des élections conduirait précisément à un résultat lourd de menace pour les Palestiniens d’Israël et renforcerait la droite et l’extrême droite.

Mais, à mon humble avis, il n’y a pas de différence entre le nouveau Meretz, considéré comme la Gauche sioniste, et Habayit Hayehoudi [le Foyer Juif (1)] qui est tenu pour un parti extrémiste. Le soutien en faveur de cette guerre démente contre Gaza s’est vu chez tous, d’un bout à l’autre.

Les partisans du boycott affirment qu’avec tout le Parlement contre eux, les députés arabes font office de « présents absents », que leur influence est pour ainsi dire imperceptible du fait de leur poids relativement faible et de la mobilisation de tous les partis sionistes pour faire échouer toute proposition de loi déposée par eux. Ou encore, les partisans du boycott soutiennent que participer au processus électoral en Israël donne une légitimité au Parlement sioniste qui n’arrête pas de promulguer des lois anti-arabes et fait tout ce qu’il peut pour enraciner la politique de discrimination raciste.

Entre les boycotteurs et leurs contradicteurs existe un accord sur le fait que les partis sionistes, dont les dirigeants ont pris la décision de démolir la Bande de Gaza, ont déjà commencé ce qu’on appelle l’entreprise d’occupation du secteur arabe avec l’aide obligeante des récolteurs de voix et de gens influents.

Si nous boycottons les élections, ces partis profiteront de l’aubaine. D’un autre côté, même si nous participons aux élections, il n’y a aucune garantie que les partis sionistes n’obtiendront pas une part des voix arabes palestiniennes d’Israël. C’est joué d’avance et nous ne pourrons pas triompher des faiseurs de voix qui profitent des élections à des fins personnelles.

En attendant, je reste parmi les indécis et s’il m’est permis, j’ajouterai une note personnelle : sur le site officiel du parti Yisrael Beitenou a été diffusé un texte que j’ai écrit et qui y est suivi de la demande que la citoyenneté israélienne me soit ôtée, parce que « Pas d’allégeance, pas de citoyenneté ». Je dois l’avouer : mon acceptation de recevoir la citoyenneté israélienne découle d’une absence de choix. Pour pouvoir rester sur ma terre natale, j’ai dû prendre le passeport israélien. Si Lieberman n’est pas d’accord avec cela, j’ai pour lui une proposition alléchante : levez-vous et retournez d’où vous venez.

* Zohir Andreus dirige le journal arabe israélien « Ma-Alhadath » et le bureau israélien de l’Institut Arabe de Recherche sur les Médias, basé en Grande-Bretagne.

(Traduction de l'hébreu : Michel Ghys)

(1) Voir la notice de Wikipedia, en anglais (ndt)

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