FREE PALESTINE
18 avril 2008

Palestine 47 : un partage avorté

Palestine 47 : un partage avorté

par Alain Gresh

Les éditions André Versaille republient le livre que nous avons écrit, Dominique Vidal et moi-même, Palestine 47 : un partage avorté.

Ce livre retrace l’histoire de la décision de l’Assemblée générale des Nations unies du 29 novembre 1947 de créer deux Etats sur le territoire de la Palestine mandataire.

Je reproduis ci-dessous la nouvelle préface que nous avons écrite :

La fin d’un rêve ?

Flushing Meadows, à New York, le 29 novembre 1947. Réunie en session spéciale, l’Assemblée générale de la toute jeune Organisation des Nations unies adopte, à la majorité requise des deux tiers des Etats présents, sa résolution 181. Que prévoit-elle ? D’accorder l’indépendance à la Palestine sous mandat britannique depuis près de trente ans. Et, pour surmonter le conflit entre les deux communautés revendiquant le même territoire, de la partager en un Etat arabe et un Etat juif. Jérusalem – où s’enchevêtrent le mur des Lamentations, le chemin de Croix et la mosquée Al-Aqsa – serait régie par un statut international conforme à sa vocation universelle. Rêve pour les uns, cauchemar pour les autres, le projet se noya dans le sang abondamment répandu par la guerre de 1948-1949.

S’intéresser à ces événements ne procède pas seulement d’une légitime curiosité intellectuelle, car les conflits les plus brûlants qui ravagent le Proche-Orient contemporain s’y enracinent. Voilà soixante ans que l’enterrement du plan de partage structure l’histoire de la région. Car seule une partie de la résolution 181 se matérialisa. Elle procura au mouvement sioniste l’Etat juif qu’il réclamait depuis un demi-siècle et conféra à Israël sa légitimité internationale : pour l’unique fois de toute leur histoire, les Nations unies portèrent un Etat sur les fonts baptismaux. En revanche, l’Etat arabe palestinien ne vit jamais le jour. Israël, la Jordanie et l’Egypte s’en répartirent le territoire, par les armes et la négociation. Une grande partie de la population palestinienne fut poussée sur le chemin de l’exil, entamant un long calvaire que le Proche-Orient devait payer d’un cycle infernal de guerres et de terreur, un cycle qui est loin d’être achevé. Que le lecteur n’attende pas ici un récit chronologique, a fortiori une « histoire » de l’après-guerre en Terre sainte. Notre démarche est autre : éclairer, avec la documentation disponible, les ressorts de la pensée et de l’action de chacune des parties en présence (sionistes, Arabes palestiniens, Etats arabes, mandataire britannique, Etats-Unis, Union soviétique, ONU). A travers ces prismes, le livre aborde les grands moments de la crise palestinienne, de la Seconde Guerre mondiale aux armistices israélo-arabes de 1949, sans omettre l’indispensable retour en arrière dans les décennies précédentes.

Soixante ans, c’est beaucoup. Et la mémoire s’est estompée. Le lecteur sera peut-être surpris de découvrir l’engagement inconditionnel de l’Union soviétique aux côtés d’Israël ; ou bien l’incohérence systématique d’une politique américaine écartelée entre Maison Blanche, favorable au mouvement sioniste, et département d’Etat, beaucoup plus hésitant ; ou la force étouffée du courant sioniste partisan d’un Etat binational ; ou encore les accords secrets unissant l’Agence juive et le roi Abdallah de Transjordanie. Sans doute se demandera-t-on pour le présent, au terme de ce voyage dans le passé, si Israël et les Palestiniens peuvent encore puiser l’inspiration d’une solution réaliste et durable du drame proche-oriental dans l’idée du partage. Le « processus d’Oslo » a échoué. Les rêves nés le 13 septembre 1993 à Washington du sommet en Yasser Arafat et Itzhak Rabin se sont transformés en cauchemar. Non seulement toute confiance entre les deux parties a disparu, mais la situation sur le terrain s’est profondément modifiée. La colonisation accélérée de Jérusalem-Est et de la Cisjordanie (avec, au total, près de 500 000 Israéliens installés sur les territoires occupés par Israël en 1967), la reconquête militaire de la Cisjordanie, la construction du mur de séparation qui empiète très profondément sur le territoire palestinien et le morcèle, l’embargo américain et européen contre le gouvernement palestinien, les affrontements entre le Hamas et le Fatah à Gaza ainsi que les attaques de l’armée israélienne semblent rendre le partage illusoire.

Pourtant, l’autre solution, une Palestine où coexisteraient tous ses citoyens, quelle que soit leur religion ou leur origine, est-elle plus crédible ? Car l’idée d’Etat binational, chère à certains intellectuels juifs dès les années 1920, comme celle de Palestine démocratique des dirigeants palestiniens des années 1960 supposent une approbation des deux peuples. On en est loin…

Jimmy Carter et le Hamas  

L’ancien président américain se rend en Syrie dans les prochains jours. Il doit rencontrer Khaled Meshaal, chef du bureau politique du Hamas (lire les déclarations de Meshaal, dans « ce que dit le Hamas »). Cet entretien a provoqué une levée de boucliers en Israël et aux Etats-Unis. Le gouvernement israélien a même boycotté l’ancien président lors de sa visite et lui a interdit de se rendre à Gaza. Pourtant, dans un éditorial du quotidien Haaretz (15 avril), « Our debt to Jimmy Carter », on peut lire :

« Le gouvernement israélien boycotte Jimmy Carter, le 39e président des Etats-Unis, durant sa visite cette semaine. Ehoud Olmert, qui n’a pas été capable de réaliser le moindre accord de paix durant sa vie et qui a même essayé de saboter toute négociation dans le passé, n’a "pas pu trouver le temps" de rencontrer le président américain, qui est signataire de l’accord de paix avec l’Egypte. Le président Shimon Peres a accepté de le voir mais a fait savoir qu’il réprimanderait son hôte sur sa rencontre avec Meshaal, comme si les réalisations du Centre Carter n’étaient pas au niveau du Centre Peres pour la paix. Carter, qui s’était fixé comme objectif quand il a pris ses fonctions de président, de réaliser la paix entre l’Egypte et Israël, qui a travaillé de manière forte et qui a réussi en deux ans, a été déclaré persona non grata par Israël. »

Rappelons que le président Carter avait déjà été violemment critiqué pour avoir osé utiliser le mot d’apartheid à propos d’Israël.

http://blog.mondediplo.net/2008-04-16-Palestine-47-un-partage-avorte

Palestine 1947

Un partage avorté

Un classique qui permet de mieux comprendre la situation actuelle au Moyen-Orient.

Par ailleurs, on célèbrera en 2008 les 60 ans de l'État d'Israël, créé dans la foulée du partage de 1947, le 14 mai 1948.


Date de publication : 01-04-2008
ISBN 978-2-87495-007-0 - 208 pages - 19.90 €

Argumentaire

Le 29 novembre 1947, l’Assemblée générale des Nations unies se prononce pour le partage de la Palestine en deux États, l’un juif, l’autre arabe.
Alors que les combats font rage sur le terrain, l’État d’Israël est proclamé le 14 mai 1948. Les armées de cinq pays arabes réagissent immédiatement en envahissant la Palestine. Mais elles ne viendront pas à bout du jeune État juif. Un an plus tard, des armistices sont signés entre Israël et ses voisins.
Le premier round du conflit israélo-arabe est terminé : il a sanctionné la naissance d’Israël, mais il a empêché l’État palestinien de voir le jour et provoqué l’exode de dizaines de milliers d’Arabes.

À l'heure où l'État d'Israël célèbre le 60e aniversaire de sa naissance, la lecture de cet ouvrage, qui explique tous les débats qui ont amené au plan de partage de 1947, permet de comprendre la genèse d'une situation géopolitique particulièrement complexe.

Consultation en ligne

Téléchargez gratuitement un extrait (34 pages) de Palestine 47, contenant l'introduction, les annexes, la chronologie, les cartes, la bibliographie et l'index.

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Extraits de presse

Une précédente édition de ce livre, parue aux éditions Complexe, a été saluée par la critique :

« Essentiel à la compréhension des interminables crises du Proche-Orient : le récit rigoureux, complet et objectif de ce qui fut le point de départ. »

(Paul-Marie de la Gorce, Le Monde diplomatique)

« Ce livre dense et d’une scrupuleuse honnêteté intellectuelle est une réussite. »

(L’Histoire)

« L’ouvrage fourmille de citations, souvent surprenantes. Ce remarquable travail s’accompagne de plus d’une sincère recherche d’objectivité, pourtant bien difficile à trouver sur un sujet aussi passionnel. »

(Politique étrangère)

Interview

– Pourquoi un livre sur le partage – avorté – de la Palestine ?

– Alain Gresh : Le partage de la Palestine par les Nations unies et son échec constituent un tournant majeur de l’histoire du conflit israélo-palestinien et israélo-arabe. Pour la majorité des États alors représentés dans la jeune organisation internationale, au mandat britannique devaient se substituer deux États - un État juif et un État arabe – ainsi qu’une zone internationale pour Jérusalem et les Lieux saints.
Mais la guerre déclenchée, le 15 mai 1948, au lendemain de la déclaration d’indépendance d’Israël par l’intervention des armées arabes débouche sur une toute autre carte du Proche-Orient : non seulement l’État juif a vu le jour, mais il a agrandi son territoire d’un tiers et en a expulsé les quatre cinquièmes des habitants palestiniens ; quant à l’Etat arabe, mort né, il est partagé entre Israël, la Transjordanie (qui annexe le reste de la Cisjordanie) et l’Égypte (qui contrôle la bande de Gaza).
Les conséquences de cette catastrophe (en arabe, Nakba) vont être durables : le négation du droit à l’autodétermination des Palestiniens plonge le Proche-Orient dans six décennies de guerres, de terrorisme, et de mal-développement.

– C’est là une page d’histoire relativement connue…

– Dominique Vidal : … moins que vous ne semblez le penser. Comme sur bien des événements, la transmission de la connaissance des conditions de la naissance d’Israël et du problème des réfugiés palestiniens reste problématique, souvent superficielle et confuse, voire biaisée. Il suffit de lire les manuels scolaires ou de suivre les grands médias pour le mesurer. C’est d’autant plus regrettable que, depuis une trentaine d’années, les historiens ont largement réinterprété ce qui s’est passé entre 1947 et 1949 : je pense en particulier à ce que les « nouveaux historiens » israéliens ont découvert dans les archives de leur pays.

– Quelle approche inspire votre livre ?

Alain Gresh : Nous avons essayé, comme dans nos autres livres écrits en commun, de faire œuvre pédagogique. D’où trois efforts : resituer les événements dans leur contexte historique ; démêler les différents facteurs qui ont modelé l’histoire telle qu’elle s’est construite ; présenter chacun des acteurs et sa logique.

– C’est donc un livre objectif ?

– Alain Gresh : Personne ne peut prétendre à l’objectivité : chacun écrit avec sa personnalité, sa vision du monde, ses valeurs, ses engagements. Chacun a aussi sa grille d’analyse, ce qui explique souvent les points de vue différents entre historiens. Mais nous avons essayé de respecter des règles de base.
Dans l’analyse de l’adoption du plan de partage, puis de son échec, nous nous appuyons sur les travaux des historiens les plus compétents, sans jamais écarter une thèse parce qu’elle ne nous conviendrait pas. Et nous les citons abondamment en indiquant chaque fois les références de ces extraits. Notes de fin de chapitre, extraits significatifs de la résolution du partage, chronologie, bibliographie, cartes, index représentent autant de moyens mis à la disposition du lecteur pour qu’il puisse se faire sa propre opinion.

– On a quand même l’impression d’être loin, très loin de l’impasse actuelle ?

– Dominique Vidal : C’est une impression trompeuse. Ce qui est en jeu dans l’actualité israélo-palestinienne – réunion d’Annapolis, poursuite simultanée des négociations et de la colonisation, affrontements entre le Fatah et le Hamas alimentés par Israël, etc. –, c’est justement de savoir si un partage en deux États est encore possible. Autrement dit, le remodelage des territoires par Israël permet-elle encore à un État palestinien de voir le jour ? Et, seconde question, y a-t-il encore, sur le terrain et dans la « communauté internationale », des forces à même d’y contribuer.
Aussi belle que soit l’utopie de l’État binational, nul ne saurait ignorer que, dans les conditions actuelles, il s’agirait d’un État d’apartheid, où les Juifs auraient tous les droits et les Arabes aucun. Ce n’est évidemment pas ce que voulaient les concepteurs du partage de 1947…

http://www.andreversailleediteur.com/?livreid=709


Commentaires
S
« Flushing Meadow 29 novembre 1947. Réunie en session spéciale, la toute jeune organisation des Nations unies adopte à la majorité requise des deux tiers des Etats présents, SA résolution 181 ». <br /> <br /> Cet extrait de la première page est une contre-vérité répétée ici pour la quatrième fois en 21 ans <br /> <br /> Il y avait 56 états présents ce qui nécessitait 38 voix por faire deux tiers, or il n'y en eut que 33 qui votèrent "oui" , dont 9 non libres et/ou achetées <br /> <br /> Pourquoi ces deux experts nous condiitionnent avec cette désinformation préalable
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