FREE PALESTINE
2 juillet 2007

Interview de Daniel Voguet

« Pratiquement tous les Palestiniens de plus de cinquante ans ont déjà connu la prison »
Daniel Voguet


Israël doit revenir aux frontières de 1967, démanteler les colonies de Cisjordanie et reconnaître au moins Jérusalem-Est comme capitale d’un État palestinien.

L’ONU a adopté plusieurs résolutions qui reconnaissent le droit à un État palestinien. Celle adoptée en 1967 reste une des plus marquantes...

Daniel Voguet. L’ONU a pour but d’assurer le maintien de la paix et la sécurité internationale. Elle tient ce mandat de la charte des Nations unies qui date de 1945. Or, depuis la création d’Israël (plan de partage de 1947) et la guerre des Six-Jours, un certain nombre de résolutions ont été votées. Celle de 1967 (résolution 242) demeure une base de discussion. Israël doit revenir aux frontières de 1967, démanteler les colonies de Cisjordanie et reconnaître au moins Jérusalem-Est comme capitale d’un État palestinien.

La question des prisonniers et des réfugiés palestiniens s’aggrave ? Quelles sont les solutions ?

Daniel Voguet. Il faut régler le problème des prisonniers, qui sont plus de 10 000 actuellement et qui demeurent tous enfermés sur la base d’une violation des accords de Genève. Ils vivent dans des conditions extrêmement difficiles, la plupart ont été torturés. Aucun n’a d’ailleurs pu bénéficier d’un procès équitable, puisque l’autorisation d’être défendu par un avocat ne leur a pas été donnée. Pour les réfugiés, qui demeurent un problème complexe, il faut en discuter. Si certains veulent revenir, d’autres avoir des indemnités, cela doit se régler lors de véritables négociations.

Tout comme le cas de Jérusalem ?

Daniel Voguet. Bien entendu. Tout cela est prévu par les résolutions de l’ONU et dont les principes sont acceptés par toute la communauté internationale dont l’Europe, la Russie, les États-Unis. C’est-à-dire tous les membres du « quartet ». Et tous les pays arabes, dont les Palestiniens, sont d’accord sur le règlement de la situation portant sur ces bases-là.

Si la communauté internationale s’accorde sur ces principes, pourquoi n’en voit-on pas les effets ?

Daniel Voguet. On ne peut pas attendre d’Israël qu’il applique des résolutions avec lesquelles il n’est pas d’accord : le rapport de forces fait que les Palestiniens ne peuvent pas imposer quoi que ce soit à l’Etat hébreu. Le problème a été créé par la communauté internationale et son plan de partage qui propose la division du territoire de la Palestine de manière à créer deux États. Il faut appliquer ce qui a été décidé, sinon, comme pour le mur, son édification se poursuivra malgré les condamnations internationales.

Comment sortir de l’impasse ?

Daniel Voguet. Sur place on se rend facilement compte de cette politique. Il suffit de remarquer l’impressionnant arsenal militaire israélien (chars, avions, armes nucléaires). C’est la confrontation entre deux mondes dont l’un dispose des moyens d’un pays développé tandis que le peuple palestinien vit comme dans un pays en voie de développement. La sécurité des Palestiniens est bien plus menacée que celle des Israéliens. Il est de l’intérêt de ces deux peuples de parvenir à une paix équitable. Même du côté israélien, il n’est pas normal de vivre dans un contexte de tensions et de guerre permanent.

Est-ce que les droits des Palestiniens sont respectés aujourd’hui ?

Daniel Voguet. Non. Ils vivent dans la crainte des contrôles (check points), des arrestations. Ce contexte est comparable à une population vivant sous une occupation ennemie. N’importe quelle personne qui se rend dans ces territoires ne tient pas deux jours. Il faut savoir que pratiquement tous les Palestiniens de plus de cinquante ans ont déjà connu la prison. À tout cela s’ajoute une situation sociale et économique dramatique pour les Palestiniens. Le problème de la survie est posé : manger, boire de l’eau potable, se soigner. Malgré tout ils résistent.

La dégradation des conditions de vie est-elle due en partie au blocus international après l’arrivée au pouvoir du Hamas ?

Daniel Voguet. C’est l’une des raisons. Le résultat des élections, qui se sont déroulées dans le respect des règles démocratiques, n’a pas été accepté par de nombreux pays occidentaux. On est au bord du chaos, comme le prouvent les récentes violences interpalestiniennes.

Entretien réalisé par Vadim Kamenka

Daniel Voguet se rend régulièrement dans la région. Il est l’un des deux avocats français, avec maître Gisèle Halimi, choisis par Marwan Barghouti pour sa défense.

Publié par l’Humanité http://www.humanite.fr/journal/2007-06-05/2007-06-05-852454

Commentaires
Derniers commentaires
Recevez nos infos gratuites
Visiteurs
Depuis la création 866 079
Archives