FREE PALESTINE
13 novembre 2017

La honte et son contraire

Source: Externe

Le documentaire « Derrière les fronts – résistances et résiliences en Palestine » porte sur les aspects psychologiques de l’occupation en Palestine. Il incite entre autres à s’interroger sur le rôle de la honte et de l’humiliation dans les situations d’oppression politique, ainsi que sur les divisions, les hiérarchies et les dispositifs de conditionnement mis en place par le système d’occupation.

Derrière les fronts - Le nouveau film documentaire d’Alexandra Dols aborde la question palestinienne à partir de perspectives, de thèmes et d’enjeux rarement mis en avant. Il montre l’occupation israélienne sous ses aspects souterrains, psychologiques et spatiaux, qui sont les moins spectaculaires mais peut-être aussi les plus dévastateurs, qui constituent le lieu où elle cherche à s’imposer à même le sensible, comme situation « normale », quotidienne, ordinaire... Il en dévoile ainsi les effets insidieux, lents, déterminants bien que non-mesurables ou presque, à travers des analyses et des témoignages qui rendent compte de l’impact psychologique de l’occupation sur les Palestiniens, des manœuvres qu’elle multiplie pour les séparer et les diviser, de cette véritable ingénierie de l’offense qu’elle a mis en place pour les briser et des stratégies qu’ils parviennent à développer pour y faire face.

Intitulé Derrière les fronts, résistance et résilience en Palestine, ce documentaire expose les ressorts d’une catastrophe qui se prolonge bien au-delà des arrestations massives, des expulsions, des meurtres et des bombardements, qui continue de hanter les vies palestiniennes après les « cessez-le-feu » et les soi-disant retours au calme, qui s’éternise comme un hiver sans fin. Le film rompt heureusement avec les trop nombreux discours qui, même chez les « pro-palestiniens », se focalisent uniquement sur l’horreur des morts et les destructions soudaines et visibles des moments de crise. Car si compréhensibles que puissent être l’émotion et l’indignation qui accompagnent ces moments, cette focalisation finit par installer le spectateur pris dans le fil de l’actualité, même sympathisant de la cause palestinienne, dans un sentiment de monotonie, dans l’idée que quelque chose recommence encore, et par susciter chez lui des questions du type: « Tiens, qu’est ce qui leur arrive encore ? Qu’est-ce qui se passe encore là-bas ? Qu’est-ce qui leur tombe encore dessus ? ». Et en un sens, dès qu’elles traversent l’esprit, ces questions contribuent à imposer une approche solidaire du discours sioniste, pour laquelle il y aurait des « accalmies », des « négociations », des phases pacifiques à opposer aux « escalades de violence », selon laquelle il existerait pour la Palestine occupée, dans les périodes pacifiées, une normalité acceptable, préférable en tout cas à la violence et à la lutte.

En France, les discours des media de masse, lorsqu’ils ne se contentent pas de dénoncer le « terrorisme » des Palestiniens et la menace qu’ils font peser sur la « sécurité » d’Israël (comme si la menace, réelle ou fantasmée, n’était pas pour Israël un oxygène), font mine de plaindre leur malheur extrême sans jamais dire clairement quelle en est la cause. Tout semble fait pour rendre la « tragédie du Proche-Orient » infiniment obscure et inextricable. On complique artificiellement la situation, on disserte à n’en plus finir sur la « complexité » du conflit, sur son caractère « délicat », « épineux », on déplore « l’impasse politique » et « les escalades de violence »... Si à chaque guillemet correspondait un check-point, je pourrais faire de ces discours une autre Cisjordanie.

Or, la cause de ce malheur est très simple à identifier: c’est l’occupation.

Ce mot désigne une réalité que les Palestiniens subissent tous les jours très concrètement, et pas seulement à travers le risque d’être arrêtés, brutalisés, tués par des soldats, ou de voir leurs champs et leurs maisons détruits, confisqués par « représailles » ou pour assurer la « sécurité » de trois préfabriqués fraîchement posés sur la colline d’en face et qu’Israël projette de transformer en colonie. Ils y font face aussi, plus quotidiennement, lorsqu’ils doivent passer un check-point ou obtenir de l’administration israélienne une autorisation rien que pour pouvoir bouger dans un rayon de quelques kilomètres. Pour certains, aller travailler le matin, voir ses parents ou se faire soigner implique déjà de se heurter au pouvoir occupant.

Comme l’explique le docteur Samah Jabr, psychiatre palestinienne et figure centrale du film, la Nakba, la catastrophe qui s’abat sur les Palestiniens depuis soixante-dix ans, doit être comprise comme un processus plutôt qu’un événement, un processus en cours, maintenu et prolongé par les négociations dilatoires, occulté par les discours fallacieux des media dominants et de l’auto-proclamée « communauté internationale ». Il ne s’agit pas d’un cataclysme passé, de quelque chose comme un désastre climatique dont il ne resterait plus que les dégâts et qu’il s’agirait désormais de réparer et d’oublier. Pour les Palestiniens, la Nakba a lieu sans cesse depuis 1948, l’occupation est son éternel recommencement. C’est comme une « destruction continuée », au sens où on parle en théologie de « création continuée ».

Dans l’une des rares séquences du film où elle s’exprime en français, le docteur Jabr explique: « La différence entre un tremblement de terre et l’occupation, c’est que le tremblement de terre ne peut pas vous humilier ».

Ce point mérite qu’on s’y arrête. Derrière les fronts évoque plusieurs fois l’humiliation et la honte que l’occupant (compris en un sens global, comme système, comme fonctionnement, tel qu’il se manifeste par exemple à travers les check-points et le contrôle de l’espace) travaille à faire éprouver aux Palestiniens.

En Palestine comme ailleurs, mais en Palestine plus nettement et plus cruellement qu’ailleurs, la honte prend une dimension politique tout à fait déterminante. Loin d’être un simple sentiment subjectif, une affaire individuelle et « simplement psychologique », elle est ce qui écrase et paralyse, elle est le liant des rapports de pouvoir. Elle les installe et les renforce, elle fait qu’on s’y résigne, qu’on les oublie, qu’on s’y habitue, qu’on finit même parfois, désespoir ou faiblesse, par les soutenir et les justifier.

Concernant les séquelles psychologiques des victimes de torture dans les prisons israéliennes, le docteur Jabr précise: « Ce qui amène des sentiments de crainte ou d’angoisse, plus on en parle, plus cela allège la crainte, mais ce qui amène un sentiment de honte, il arrive qu’en en parlant la honte augmente ». Comme l’oubli, la honte a cette structure de sable mouvant. Ce qui fait le plus honte c’est souvent la honte d’avoir honte, tout comme l’oubli véritable est oubli de l’oubli.

À plusieurs reprises, le film parvient à mettre l’accent sur ce type de phénomènes que le vocabulaire de notre époque peine à saisir, à cause de son obstination à séparer ce qu’il identifie comme aspects psychologiques (sous-entendus seconds, subjectifs, apolitiques, individuels et abstraits) et les questions proprement politiques, économiques et matérielles (donc supposées effectives, objectives et plus concrètes).

Dans la longue offensive menée par l’occupant contre les Palestiniens, dans son acharnement à les faire plier, l’humiliation est tout sauf un dégât collatéral. Il y a toute une technologie de l’offense, une offense planifiée et organisée politiquement dont l’objectif est double.

Il s’agit d’une part d’affaiblir moralement les Palestiniens, de leur inoculer la résignation, la honte et le mépris d’eux-mêmes, la lassitude et l’abandon de la lutte; de leur rendre la Palestine invivable, de faire en sorte qu’ils en viennent à préférer la mort ou l’exil, ou qu’ils cessent d’être ce qu’ils sont en se résignant à un statut subalterne, un inoffensif indigénat, quelque chose comme la vie en réserves des Américains natifs. L’occupant, dans sa grande mansuétude de seule-démocratie-du-Proche-Orient et d’armée-la-plus-morale-du-monde, ne renonce pas complètement à la perspective de transformer les Palestiniens en consommateurs précaires et passifs, leur soumission économique et leur dépendance assurant alors une adhésion forcée au système qui a la bonté de leur revendre le pain et l’eau qu’il leur confisque.

Mais d’autre part, l’acharnement à rabaisser et humilier les Palestiniens s’adresse également aux Israéliens, et même peut-être davantage. Il s’agit pour le pouvoir occupant de dresser sa jeunesse à un certain rapport aux Arabes sans lequel l’État sioniste ne pourrait exister, de lui enseigner l’étrangeté de cette population et l’évidence de son infériorité. Il faut lui inculquer un certain mépris, une certaine hostilité, une certaine disposition qui ne se résument pas à un banal racisme, à une « haine de l’autre » ou de l’étranger, qui est certes en partie une affaire de privilèges mais qui comporte aussi le maintien d’une étrange et perverse proximité.

Il faut que les Arabes soient toujours pour eux cette masse informe, indistincte, en file, à laquelle il ne vient pas à l’esprit de s’identifier, que l’on doit commander, arrêter, contrôler, qu’il faut mépriser tout en s’en méfiant, comme un bétail perfide d’où se détache parfois le bouc terroriste qui refuse la soumission et qu’il faut alors abattre sans réfléchir. Dans ce cirque sinistre, c’est peut-être d’abord le soldat qui est dressé, c’est-à-dire le jeune Israélien générique, absolument quelconque, puisque le service militaire est obligatoire pour tous et dure trois ans.

Ainsi, l’offense apparaît comme la forme même de la domination israélienne. On dirait parfois que pour Israël le but suprême n’est pas d’effacer les Palestiniens mais de les maintenir dans l’infériorité et l’humiliation. On dirait qu’ils ne doivent pas simplement incarner l’ennemi, l’obstacle fâcheux qu’il serait préférable de pouvoir écarter sans bruit, mais ce qui doit exister pour être nié, ce qui doit être amoindri, rendu faible, pauvre et nu, pour qu’Israël soit fort et prospère, ce qui doit être désigné comme arriéré, sous-humain, barbare, sauvage et terroriste pour qu’Israël puisse se reconnaître comme avancé, civilisé, démocratique et moderne – en un mot, européen.

Derrière les fronts présente entre autres le témoignage d’un boulanger palestinien, Khodr Adnan, qui fut emprisonné dans le cadre de la détention administrative – une mesure qui permet à Israël d’incarcérer n’importe quel Palestinien pour une durée de six mois indéfiniment renouvelable, sans même qu’il soit besoin pour cela d’inculpation ou de jugement. Il a fini par être libéré après une grève de la faim de plus de soixante jours, et parmi les raisons qui l’ont poussé à cette résolution, il cite l’humiliation et les offenses des interrogateurs. Au moment où j’écris ce paragraphe, d’autres prisonniers palestiniens, hommes et femmes, se sont mis en grève de la faim pour protester contre leurs conditions de détention. Des Israéliens ont alors organisé un barbecue près de la prison pour les narguer...

L’anecdote pourrait paraître insignifiante si elle ne témoignait pas de l’admirable inventivité israélienne en terme d’offense et d’insulte. Ce barbecue n’est pas une simple réplique sur le terrain de la guerre psychologique ou médiatique. Si le but était de contrer la mauvaise image d’Israël que donnent ces grèves de la faim, le mieux, du point de vue israélien, eut été de ne pas en parler... Mais ce que visent ces petites atteintes et tant d’autres phénomènes apparemment minimes, c’est d’abord la dignité des Palestiniens, comme si cette dignité se confondait avec la terre, comme s’il était tout aussi essentiel pour Israël de la leur ravir.

Les Israéliens semblent parfois moins attentifs à leur situation propre qu’à ce qui les distingue des Palestiniens – j’entends évidemment les Israéliens pris comme ensemble et non individuellement. Être Israélien paraît même conditionné par la possibilité d’offenser le Palestinien, comme pour conjurer une ressemblance primordiale inavouable, comme si c’était d’abord en tant que double, plutôt qu’en tant qu’ennemi, qu’il incarnait pour le sionisme le plus grand danger [1].

L’idée qu’Israël ne survit que grâce à l’hostilité, cultivée et entretenue, des Palestiniens spoliés et des Arabes voisins, qu’il s’est dès le départ défini par la négative en se créant des ennemis et en les entretenant pour consister, est un lieu commun que même un premier ministre israélien a pu formuler.

Seulement il faudrait ajouter que le rabaissement et l’humiliation systématiques, loin d’être de simples corollaires, des dégâts collatéraux, les conséquences de la haine ou de la peur, sont tout aussi vitaux au projet sioniste, qu’ils en sont même une pièce maîtresse. Car il s’agit pour l’Israélien de s’assurer de son européanité, de son appartenance à une nation moderne, par opposition à la populace arabe arriérée, misérable, à la fois pitoyable et menaçante, piégée par lui dans cette inexistence étatique, dans cette inconsistance officielle et ce dénuement.

Il est d’ailleurs notable que dans leur propagande, les Israéliens semblent parfois plus soucieux de répéter qu’ils sont puissants, qu’ils ont réussi, qu’ils ont une belle nation moderne avec ses buildings, sa Gay Pride et ses généticiens, qu’à se défendre de l’accusation de voler et d’avoir volé leur terre aux Palestiniens, de les enfermer, de les exiler, de les anéantir. Ces accusations, ou plutôt ces évidences, leur déplaisent bien sûr, mais elles semblent souvent les agacer et les ennuyer plutôt que les scandaliser. Bien sûr que c’est vrai et bien sûr qu’ils le savent... Zeev Jabotinski, le père fondateur de la droite sioniste, le reconnaissait sans problème.

Il faut donc faire attention en traversant le Jourdain : un « c’est pas nous c’est eux » peut en cacher un autre. Lorsque les sionistes répètent « c’est pas nous, c’est eux... », sous-entendu qui déportent, nient, jettent à la mer et exterminent, l’oreille attentive entend à peu près le contraire : « c’est pas nous, c’est eux... » les faibles, les sans-terre, les miséreux, les nomades, les envieux, les arriérés, les victimes. Et s’ils peuvent mentir si effrontément et de façon si grossière en présentant les Palestiniens comme oppresseurs et les Israéliens comme victimes, c’est parce qu’en vérité, leur cri c’est : nous ne sommes pas des victimes – la preuve, nous avons nos victimes.

Le maintien de cette supériorité statutaire au-delà des dispositifs matériels, de la confiscation des terres et de l’eau, des destructions et des arrestations, de tout ce à quoi le sionisme correspond pour les Palestiniens depuis des décennies, est la version psychologique et symbolique (et cependant pas moins politique et concrète) du « mur d’acier » que Jabotinski préconisait dès 1923 – dans un texte édifiant, étonnant de clarté et d’honnêteté quant à la vérité du projet sioniste [2]. On pense bien sûr immédiatement au Mur de séparation érigé par le gouvernement Sharon. Mais cet autre mur diffus et sournois que constituent ce réseau de barrières, ces dispositifs, ce conditionnement, ces autorisations et ces offenses s’est avéré par ses effets encore plus destructeur, et fut tout à fait crucial pour l’établissement et la consistance du projet sioniste. Et comme le Mur matériel, il sert autant à séparer les Palestiniens des Israéliens, que les Palestiniens entre eux.

Près du grand check-point de Qalandiya, on peut trouver parmi les graffitis, les messages de soutien et les grands portraits d’Arafat et Barghouthi qui couvrent le Mur de séparation, le mot somoud inscrit en rouge, en arabe. Une partie du film est consacrée à ce mot. À un moment, l’archevêque de l’église orthodoxe de Jérusalem, après avoir évoqué les provocations, les interdictions, les tentatives de division menées par les Israéliens, leur acharnement à détruire l’identité des Palestiniens et à tout faire pour qu’ils quittent cette terre, déclare en guise de conclusion: « Notre réponse face à tout cela, c’est le somoud ». Ce concept, qui a une importance capitale dans la conscience politique palestinienne, désigne la constance, la résistance au sens de persistance, de volonté indéfectible. Comme l’explique le docteur Jabr, s’il se rapproche de la notion de résilience, il se distingue du sens où celle-ci est parfois employée par son aspect résolument actif, par sa dimension spirituelle et son lien à la communauté – non à une communauté religieuse ou nationale particulière, mais à l’idée de résistance commune et de « faire face ensemble ». Le somoud diffère donc radicalement de toute acception individualiste, dépolitisée et étroitement psychologisante de la « résilience » – notamment de celles qu’affectionne le self-management.

Ce que montre le film, c’est que face aux aspects désintégrateurs de l’humiliation, face à toutes les bombes à fragmentation psychologiques que les Israéliens expérimentent sur les Palestiniens, le somoud apparaît comme le principal remède.

Si l’humiliation et l’offense sont comprises à travers leur pouvoir structurant bien que diffus, avec toute cette force de contrainte, cette capacité à pétrifier, à faire fléchir, à faire renoncer, si la honte qui s’en suit est essentiellement aliénation, abandon de soi et perte de son ancrage, alors le somoud est l’exact contraire de la honte.

À la fin de son article, qui s’intitule Le mur d’acier (Nous et les Arabes), Jabotinski conclut: « Aussi longtemps qu’ils auront le mince espoir qu’ils peuvent se débarrasser de nous, ils ne vendront pas cet espoir, contre aucune sorte de mots doux ou de mets succulents, parce qu’ils ne sont pas des canailles mais une nation, peut-être un peu en loques, mais encore en vie. Un peuple en vie ne fait d’énormes concessions sur des questions aussi décisives que lorsqu’il n’a plus d’espoir. »

Aujourd’hui, la situation des Palestiniens est désastreuse. Une partie des « énormes concessions » a malheureusement eu lieu avec les accords d’Oslo et plus encore avec la politique actuelle d’une « autorité » réduite au rôle de simple sous-traitant d’Israël pour les questions de « sécurité » et de gestion du « problème palestinien » – sans parler de la dépolitisation méthodique et de la mise sous tutelle opérées par les O.N.G. et les « aides » de l’Europe...

Toutefois, près d’un siècle après le texte prospectif de Jabotinski, on peut toujours dire de ce peuple qu’il est « peut-être un peu en loques, mais encore en vie ». Et tant qu’il n’a pas perdu tout espoir, le sionisme n’est pas tranquille. C’est pourquoi, en plus des arrestations et des assassinats en Cisjordanie, en plus des carnages de Gaza, Israël s’emploie quotidiennement et à tous les niveaux à briser la volonté des Palestiniens. Et ceux-ci, loin de se contenter d’une résistance armée, répondent aussi à ces attaques de manière invisible et silencieuse (ou du moins non spectaculaire, qui échappe aux yeux et aux oreilles médiatiques) par des gestes et des plans qui prennent en compte la nécessité de libérer l’esprit et donc le temps, de trouver des interstices d’où les alternatives et l’espoir peuvent émerger.

Le film d’Alexandra Dols montre une part de cette lutte acharnée qui se déroule « derrière les fronts », ce qui ne signifie pas seulement en dehors du combat armé ou des périodes de crises, mais aussi à travers une temporalité qui est le plus souvent occultée parce qu’elle se déploie hors du défilé monotone, blasant, uniforme des informations, hors de la succession désespérante des attaques israéliennes toujours impunies et des répliques palestiniennes suicidaires, de ce que la rhétorique journalistique, dans son acharnement à maintenir le mensonge d’une symétrie, appelait lors de la deuxième intifada « le cycle attentat-représailles ».

Dans cette lutte, la Palestine est certes menacée d’un péril toujours plus grand.

Mais là où croît le péril croît aussi le somoud.

Ali Saber -

11.11.17

- « Derrière les fronts – résistances et résiliences en Palestine » est un film documentaire sur les conséquences invisibles de la colonisation : l’occupation intime, celle de l’espace mental. Espace où l’équilibre, l’estime de soi, le moral et l’âme deviennent des lieux de lutte, de résilience et de résistance.

[1Voir à ce sujet le texte de Giorgio Agamben « Qu’est-ce qu’un peuple ? », dans le recueil « Moyens sans fins ». Un approfondissement de cette idée, que le cadre de cet article ne permet malheureusement pas, pourrait partir de ce texte même s’il n’y est pas (ou peu) question du sionisme explicitement.

[2La Muraille d’acier, Zeev Jabotinsky ;
ZE’EV JABOTINSKY, Writings : on the road to statehood, Jérusalem, Avi Jabotinsky, 1959, pp. 251-260 (en hébreu)

Source: AURDIP (Association des Universitaires pour le Respect du Droit International en Palestine)

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