FREE PALESTINE
6 juin 2008

Préparez-vous pour la 41e année

Préparez-vous pour la 41e année

Michael Sfard

Haaretz, 5 juin 2008

www.haaretz.co.il/hasite/spages/990344.html

Version anglaise : Welcome to year 41

www.haaretz.com/hasen/spages/990429.html

Le commandant militaire pour la Cisjordanie, le général Gadi Shamni, est un homme occupé. Il a un pays à mener et il n’y a pas chez lui de séparation des pouvoirs. C’est lui qui, tout à la fois, promulgue les lois, juge les transgresseurs, dirige son petit gouvernement composé de ses ministres-officiers âgés d’une vingtaine d’années.

Seule une petite partie de son activité est connue du public, car la direction du territoire occupé implique au jour le jour une infinité de décisions, d’ordres et d’actes. Voici quelques exemples de son activité récente :

Un jour, le commandant déclare la guerre aux handicapés de Kalkiliya. Un ordre signé de sa main place hors-la-loi les organisations qu’il soupçonne d’activité terroriste : « l’Association pour la réhabilitation du handicapé de Kalkiliya », « l’Association des handicapés », « l’Association pour la réhabilitation des handicapés », « l’Association de réhabilitation des handicapés », « l’Association de Kalkiliya pour la réhabilitation de handicapés », « l’Association de Kalkiliya pour les handicapés », « l’Association de soutien et de soins pour handicapés », « l’Association de Kalkiliya pour la réhabilitation du handicapé ». Ces organisations sont ainsi devenues illégales et leurs membres des criminels. Quelques plus tard, il a annoncé la prolongation de l’interdiction, valable pour deux ans, de se rendre à des congrès à l’étranger, pour Shawan Jabarin, directeur de la plus grande association cisjordanienne de défense des droits de l’homme, « Al-Haq ». Lui aussi, dit le commandant, est plongé jusqu’au cou dans le terrorisme.

La semaine dernière, un juge de la cour militaire du camp d’Ofer, le major Samuel Lavie, conseiller du commandant militaire pour les questions juridiques, a décrété que deux Palestiniens qui louaient à Hébron des magasins que des colons du quartier d’Avraham Avinou ont envahis, avaient perdu leurs droits de locataires pour avoir « abandonné » les propriétés. Le juge connaissait les ordonnances émises il y a quelques années par le commandant militaire et qui interdisaient aux Palestiniens d’entrer dans leurs magasins et qu’ils ne pouvaient donc y être ces dernières années, mais il a décrété qu’un abandon forcé était aussi un abandon.

Vendredi passé, comme chaque semaine depuis un mois et demi, le commandant militaire d’Hébron a signé une ordonnance de zone militaire fermée interdisant aux membres de l’organisation « On brise le silence » d’organiser dans la ville des circuits d’information. Les colons de la ville se sont opposés à ces circuits, certains ont agressé leurs organisateurs, et le commandant a trouvé un moyen pour garantir le calme et la tranquillité.

Récemment, le représentant du commandant militaire a été le principal orateur à intervenir lors d’une conférence à l’Université Hébraïque, dont l’intitulé était « Distinction permise ou discrimination inacceptable – L’argument sécuritaire constitue-t-il une différence pertinente ? » Il s’agit effectivement d’une question centrale dans l’activité du commandant militaire qui signe, ces derniers temps, des ordonnances interdisant à des Palestiniens de circuler sur telle route ou telle autre, ou de pénétrer dans telle zone déterminée de Cisjordanie. Il aurait été possible de donner à la conférence-débat un intitulé moins embarrassé : « Apartheid : pour ou contre ? ».

Ce ne sont là que quelques exemples de l’activité du commandant : lutter contre des organisations d’assistance et limiter les démarches des militants des droits de l’homme, ancrer dans la loi une discrimination sur base nationale, déposséder de leurs biens des Palestiniens et autoriser les exactions des colons.

Mais ce n’est pas seulement le commandant militaire qui fait tout cela. C’est nous. Bienvenue dans cette 41e année !

* L’auteur est le conseiller juridique de l’organisation des droits de l’homme « Yesh Din » et il représente des plaignants dans une partie des cas évoqués dans le texte.

(Traduction de l'hébreu : Michel Ghys)

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