FREE PALESTINE
8 décembre 2007

Voir Gaza et pleurer

Voir Gaza et pleurer


Le 3 decembre 2007

Un Observer

"Lâchez des vivres sur les plages vides de Gaza, dans les eaux territoriales palestiniennes, suspendez tous les accords d'association commerciale tant qu'Israël ne se pliera pas aux résolutions des Nations Unies et aux décisions de la Cour Internationale de Justice, ne mettra pas fin à son occupation illégale et ne se retirera pas derrière les frontières de 1967".
















Le passage d'Erez, l'entrée dans la plus grande prison à ciel ouvert au monde créée par Israel


L'entrée à Gaza par le point de contrôle frontalier d'Erez nouvellement aménagé est comparable à un goutte à goutte, depuis qu'Israël a qualifié l'enclave palestinienne de bord de mer d'"entité hostile".

Le but de notre visite était d'apporter un soutien moral au vieux Père Manuel, qui administre ses ouailles, dirige une excellente école (pour chrétiens et musulmans) et est vénéré comme un héros local.

Qu'il quitte Gaza et les autorités israéliennes ne le laisseront jamais revenir, alors, il s'est laissé incarcérer là depuis neuf ans. Il n'a eu aucune visite depuis février et un collègue nous a dit que lorsqu'il a appris que nous venions, il a fondu en larmes.

Nous voulions aussi montrer notre solidarité à toute la population courageuse, musulmane et chrétienne, et nous excuser pour l'indifférence du gouvernement britannique devant les meurtres de l'armée israélienne, les sanctions économiques malveillantes et l'intrusion de l'Occident dans les affaires démocratiques de la Palestine.

Grâce à notre arrivée bruyante et à vitesse V à travers les rues de Gaza, avec escorte policière et hurlement des sirènes – c'est le traitement des VIP ici – notre petit groupe est rapidement entré dans un cirque médiatique.

Le passage de Rafah vers l'Egypte, maintenant fermé en permanence, fait alors suite au Mur jusqu'à la mer et à la route côtière qui remonte vers Gaza ville. Sur la route, j'ai remarqué les plages désertes et les bateaux de pêcheurs abandonnés. Israël a interdit la pêche au large des côtes de Gaza, ruiné les moyens de subsistance de 3000 pêcheurs professionnels et leurs familles et appauvri l'alimentation locale.

L'armée tire sur les bateaux qui défient l'interdiction. Il est également interdit aux Palestiniens de développer le commerce maritime ou les ressources naturelles à l'intérieur de leurs eaux territoriales.

Gaza ne fait que 365 km² - 45km de long, 12km de large et est entièrement isolée du monde extérieur par une grille israélienne gardée par des tours de contrôle, des snipers et des chars. Israël contrôle l'espace aérien de Gaza, son espace maritime et ses ondes hertziennes. Une vaste prison avec des attaques aériennes, des tirs sur la plage, des troupes, des chars, des bulldozers blindés, indifférents aux victimes civiles.

Alors que tout est réduit à l'état de gravats et de vestiges squelettiques, ce fut, à l'époque, un endroit attirant et beaucoup de beaux bâtiments ont survécu. Ainsi va de cette communauté qui ne baisse pas la tête, bien qu'épuisée par des années d'humiliations et d'occupation. Gaza aurait pu facilement devenir un paradis côtier ; un état prospère, commercialement indépendant, mais la haine d'Israël envers Gaza et son peuple est terrifiante. L'économie est étranglée et pour 1,5 million d'âmes, la vie est un enfer.

Il n'y a plus ni pétrole ni bougies. Les stocks de produits de base sont épuisés, aussi, même l'hygiène devient impossible. Les coupures de courant interrompent les traitements hospitaliers et les rares médicaments ne peuvent pas être gardés au réfrigérateur. Beaucoup font face à la mort parce que l'assistance médicale est effondrée.

Le prix de la farine pour faire le pain a doublé ; le ciment pour le béton pour réparer les maisons et les infrastructures endommagées a augmenté de 1000% !

Certaines écoles ont trois roulements de classes par jour. C'est une véritable crise humanitaire comme l'ONU et diverses associations caritatives ont mis en garde à maintes reprises les gouvernements occidentaux. Un ami m'a envoyé un e-mail : "Aujourd'hui à Gaza… nous n'avons pas de ciment pour construire les tombes de ceux qui meurent."

Un communiqué du ministère de la Santé à Gaza révèle la réalité nue :

Patients atteints d'un cancer : sur 450 malades, 35% sont des enfants et 25% des femmes. Ils sont interdits de quitter Gaza pour un traitement médical ou chirurgical. Pour beaucoup d'entre eux, il n'y a pas de médication parce que les médicaments contre le cancer ne peuvent pas traverser la frontière.

Patients atteints de problèmes rénaux : 400 devraient subir une dialyse 3 fois par semaine, mais la détérioration des machines l'ont réduit à 2 fois par semaine avec des conséquences sérieuses pour les malades.

Machines à hémodialyse : sur 69 machines réparties dans 4 hôpitaux, 20 sont hors service. Israël bloque la fourniture des pièces détachées prétendant que ce ne sont pas des articles humanitaires. 3 sont hors d'âge.

Malades cardiaques : 4 à 5OO patients souffrent d'un sévère manque de médicaments.

Aucune pièce détachée ne peut entrer pour réparer les équipements thérapeutiques ou de diagnostic qui tombent en panne.

Etat des stocks
• Aucun stock pour 85 médicaments essentiels.
• Aucun stock pour 12 psychotropes essentiels. 2 semaines de stock d'anesthésiques chirurgicaux, après quoi les salles d'opération fermeront.
• Aucun stock de planches de radiographie et de sacs pour la stérilisation.
• Presqu'aucun stock de papeterie, dossiers médicaux et feuilles d'examen. Ils sont réutilisés plusieurs fois au risque d'erreurs dans le suivi médical.
• Pénurie grave de vêtements médicaux, à peine assez de draps et de couvertures d'hôpitaux.
• Aucun stock de nourriture pour les malades hospitalisés.
• 2 semaines de stock de produits de nettoyage.
• Moins de 2 semaines de stock de diesel et de gaz.

Pénurie sévère de fournitures médicales, matériel de laboratoire et banque du sang. "Le nombre total de morts résultant de la fermeture de la frontière depuis juin s'élève à 44. Empêcher les malades de voyager, empêcher l'entrée de la nourriture, du lait et du fuel est un crime organisé commis par l'occupation israélienne pour épuiser et détruire le secteur de la santé, et cela fait partie de la politique israélienne pour tuer et humilier notre peuple", a conclu le Ministre de la Santé.

Médecins pour les Droits de l'Homme (Physicians for Human Rights - PHR) ont essayé de faire sortir de Gaza les malades les plus graves pour un traitement hospitalier adéquat, mais même les demandes pour des cas avancés de cancer ont été invariablement refusées.

Alors, ils ont agonisé. Nail Al Kurdi, 20 ans, a succombé la semaine dernière, attendant toujours la permission de passer.

Depuis 5 mois, PHR a présenté demande après demande pour le laisser sortir et a même envoyé une pétition à la Haute Cour de Justice, mais chaque fois il a été refusé "pour des raisons de sécurité". Il y a 2 jours, un gamin de 8 ans est mort lui aussi en attendant un traitement médical en Israël. On me dit qu'il avait l'autorisation nécessaire mais qu'il a été systématiquement refoulé à la frontière.

On estime à un millier les malades nécessitant un transfert immédiat – des cas avancés de maladies rénales et de cancers ainsi que ceux qui ont été grièvement blessés par les attaques aériennes israéliennes. Entre temps, la chaîne 4 au Royaume Uni rapporte qu'Israël exerce un chantage sur les malades chroniques. S'ils acceptent de donner des informations sur leurs cousins et amis, ils peuvent traverser pour aller se faire soigner… Sinon, ils peuvent "rester à Gaza et mourir".

Le Comité International de la Croix Rouge rappelle systématiquement qu'Israël est obligé, selon la législation internationale, de garantir que les fournitures humanitaires parviennent aux civils palestiniens. Pourtant, j'ai appris que des médicaments achetés avec l'argent de la vente de mon livre "Radio free Palestine", n'ont pas pu être livrés et ont dû passer en contrebande d'une manière ou d'une autre.

Le 11 Octobre, le Parlement européen a voté une résolution demandant au gouvernement israélien de lever le blocus de la Bande de Gaza et de remplir ses obligations internationales garantissant le flux de l'aide humanitaire et des services d'aide essentiels.

Luisa Morgantini, vice-présidente du Parlement européen a dit : "J'ai été à Gaza récemment et j'ai vu combien la Bande suffoque dans une crise humanitaire sérieuse due aux raids et au bouclage imposé par l'armée israélienne : dévastation massive des bâtiments publics et des foyers privés, interruption des hôpitaux, des cliniques et des écoles, déni d'accès à l'eau potable, à la nourriture et à l'électricité, destruction des terres agricoles voulue par Israël, créent une véritable catastrophe pour les civils…"

L'Union Européenne a demandé que le gouvernement israélien respecte totalement les droits de l'Homme et la loi internationale et en finissent non seulement avec l'urgence à Gaza mais aussi avec l'occupation militaire de la Cisjordanie, où Israël continue à voler la terre palestinienne en toute impunité.

Au lieu de se conformer à cette demande, Israël a déclaré Gaza "entité hostile" et a aggravé les souffrances en annonçant que "des sanctions supplémentaires seraient mises sur le régime du Hamas".

Le Hamas a été démocratiquement élu comme gouvernement palestinien en 2006, il est ainsi un pouvoir légitime alors qu'Israël est un occupant armé illégal. Pour ce qui est de savoir si le Hamas est une "organisation terroriste"… vérifions d'abord la définition du terrorisme.

PHR a enquêté sur les effets des munitions utilisés par la Force de Défense israélienne à Gaza et en Cisjordanie. Ils ont trouvé que les balles à haute vélocité 5,56mm / calibre .223 tirées par les fusils M-16, largement utilisées par les FDI, "visent à se briser au moment de l'impact, causant une tempête dans les tissus, même sans toucher un os… de larges cavités, et un dommage étendu aux muscles, aux nerfs et aux vaisseaux sanguins ainsi que des fractures. La destruction massive des tissus produit un tableau clinique effrayant qui constitue un énorme défi pour les chirurgiens. Lorsque de telles blessures sont nombreuses, on touche la limite des connaissances médicales."

La majorité des victimes de ces blessures auront un dommage permanent sur le membre touché. Des témoignages aux équipes de PHR et des informations à d'autres organisations humanitaires disent que les blessés de cette manière là étaient sans armes et au pire, jetaient des pierres.

En tant qu'invités dans cette communauté très unie de Gaza, on nous a offert du café à la Maison du Fatah et à la résidence du Premier Ministre du Hamas Ismaël Haniya. Les relations entre les factions religieuses et politiques sont amicales et de bonne humeur et ils se tiennent ensemble contre un ennemi sans pitié. Il n'y a aucun problème entre les musulmans et les chrétiens – un petit miracle si on considère que leur bourreau a un soutien chrétien puissant.

Alors que notre visite éclair prenait fin, prendre congé fut un véritable déchirement d'avoir à dire au revoir à ces gens courageux que l'Occident a piétinés et calomniés, et revenir au feu roulant de l'horrible frontière de sécurité d'Israël.

C'était retour à
Erez et au nec plus ultra de la déshumanisation, se traîner à travers un dédale de barrières en acier, de tourniquets métalliques et de sinistres machines à Rayons X, sous commande israélienne et faire interminablement la queue pour être questionnés par les gens les plus grossiers de la terre.

Seulement 50 à 60 personnes avaient passé la frontière ce jour-là, aussi, le braquage de 3 heures ne fut entièrement dû qu'à la volonté israélienne de nous emmerder. Se plaindre au gouvernement de Sa Majesté semble vain : le responsable du Bureau des Affaires Etrangères britannique est l'ancien président des Amis d'Israël.

En dépit de tout, il y a une fierté et une résilience étonnante parmi les Gazans. Toutefois, si vous frappez, assassinez, affamez, et commettez des crimes contre l'humanité suffisamment souvent, vous pouvez arriver à une sorte de victoire. Mais dîtes-nous, Mr Gordon Brown, pourquoi la Grande Bretagne est-elle complice d'un projet aussi bas et lâche ? Nous avons touché le fond en Irak… Jusqu'où pouvons-nous sombrer ?

Gaza fut sous mandat britannique et c'est sûrement une raison suffisante pour ressentir une responsabilité particulière à son bien-être. Pourtant, ce n'est même pas à l'ordre du jour du gouvernement à Annapolis. Pour les Gazans, la "négociation de statut final" était une vaste blague.

Aussi, je demande instamment au gouvernement britannique : "Allez voir par vous-même la détresse, la tragédie humaine et la dévastation dont vous avez accablé ces gens. Ensuite, étonnez-nous. Levez ce siège cruel et mettez fin à 90 ans de trahisons qui ont tellement fait honte à la Grande-Bretagne.

"Lâchez des vivres sur les plages vides de Gaza, dans les eaux territoriales palestiniennes, suspendez tous les accords d'association commerciale tant qu'Israël ne se pliera pas aux résolutions des Nations Unies et aux décisions de la Cour Internationale de Justice, ne mettra pas fin à son occupation illégale et ne se retirera pas derrière les frontières de 1967. Prenez conscience qu'Israël n'est pas une démocratie à l'occidentale mais une ethnocratie impitoyable. Et quand les électeurs britanniques découvriront que la moitié de leurs députés font partie des Amis d'Israël, ils demanderont comment une telle dévotion servile à ce pouvoir militaire étranger peut être possible dans le meilleur intérêt de notre nation chrétienne et de plus en plus musulmane."

A l'administration Bush et à ses admirateurs : "Vous êtes peut-être les plus puissants, mais vous êtes les plus haïs. Faites gaffe, quand des américains décents comprendront finalement à quoi servent les dollars de leurs impôts en Terre Sainte."

Et enfin, aux chefs des églises de la chrétienté occidentale : "Allez-vous continuer à rester assis, là, alors qu'on vole la Terre Sainte sous votre nez ? "


Publié en français sur le site de l'ISM (http://www.ism-france.org/news/), le 2 décembre 2007.
Traduction de l'anglais: MR pour ISM.

Voir également :

Radio Free Palestine

Physicians For Human Rights

International Committee of the Red Cross

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