FREE PALESTINE
17 janvier 2007

lettre de Holood Badawi aux "internationaux"

Contre la politique de boycott contre le peuple palestinien, une lettre de Holood Badawi aux "internationaux"

Plus que jamais,

Solidarité Internationale !

Comme dans un scenario préparé de longue date, la guerre menée par Ehud
Barak et Ariel Sharon contre la direction de l’OLP dans les territoires
occupés, a provoqué la victoire du Hamas, dans des élections dont personne
ne met en question le caractère démocratique, et cette victoire du Hamas a
donné à la communauté internationale le prétexte de se joindre ouvertement à
la politique de boycott et de blocus mis en place dans les Territoires
Occupés Palestiniens par l’Etat d’Israël.

La mise en échec, par Israël, du processus politique comme moyen de résoudre
le conflit, l’exclusion des négociations de l’ordre du jour politique
israélien, la répression de la lutte non-violente palestinienne par les
forces d’occupation, la politique systématique et continue d’humiliation et
de chantage à la faim, l’élargissement des colonies, la construction du mur
qui devient petit à petit une sorte de frontière, la transformation du
peuple palestinien tout entier, et pas seulement sa direction politique,
comme entité illégitime, et à plus forte raison comme non-partenaire pour la
paix - tout ceci pousse la grande majorité des Palestiniens à perdre espoir
dans la perspective d’une fin de l’occupation, et d’une solution à un
conflit qui dure maintenant depuis plus d’un siècle.

Un des grands succès des gouvernements israéliens au cours de la dernière
décennie, est la neutralisation de la communauté internationale, qui a
démissionné de ses responsabilités morales et politiques envers le peuple
palestinien occupé. Pire : au lieu de mettre en œuvre le droit international
et les centaines de résolutions de l’ONU contre la politique d’occupation
israélienne, la communauté internationale impose un boycott... contre les
victimes de cette même occupation. Un boycott international car la
population palestinienne occupée a eu le culot d’élire une « mauvaise
direction », dans le cadre d’élections que tous les nombreux observateurs de
cette même communauté internationale ont considéré comme un exemple de
démocratie et de participation populaire massive.

Comme militante Palestinienne qui combat l’occupation israélienne, mais
aussi comme citoyenne de l’Etat d’Israël, je suis particulièrement
préoccupée du recul, percevable depuis quelques années, dans la mobilisation
du mouvement de la paix et des mouvements sociaux internationaux, en
particulier en ce concerne la politique des gouvernements occidentaux envers
le conflit israélo-palestinien. Ce souci qui est le mien se transforme chez
un nombre grandissant de Palestiniens dans les territoires occupes en une
véritable rage.

L’enlèvement d’internationaux dans les territoires occupés, en particulier à
Gaza, au cours des dernières années (y compris déjà à l’époque où Yasser
Arafat était encore en vie), et l’appel lancé il y a quelques jours par un
groupe de Palestiniens aux étrangers de quitter au plus vite les territoires
occupés, ne s’adresse pas aux diplomates et autres représentants des Etats
étrangers, mais aux militants des droits de l’homme qui, pour la plupart
s’identifient au peuple palestinien et à sa lutte légitime contre
l’occupation. Un nombre grandissant de Palestiniens ne veut plus de la
présence de ces étrangers, non parce qu’ils les considèrent comme des
ennemis ou les soupçonnent d’agir contre eux. A travers ces internationaux,
ils s’adressent en fait à vos pays et à vos gouvernements qui non seulement
ne font rien pour mettre fin à l’occupation, mais osent même sanctionner les
victimes de cette occupation. Aux yeux de nombreux Palestiniens, la
communauté internationale, et en particulier les pays européens, sont
devenus les exécutants de la politique de boycott et d’asphyxie des
Territoires Occupés Palestiniens par l’Etat d’Israël.

En outre, ces internationaux ne représentent plus un mouvement de solidarité
puissant et massif, arme d’une ligne politique claire, sans équivoque ou
ambiguïté. La plupart de ceux qui viennent dans les territoires occupés le
font à titre individuel. Il semble que l’époque des grandes missions civiles
internationales est révolue, composées de représentants de syndicats et
d’organisations de masse, dont la présence était fortement ressentie,
précisément à cause de leur représentativité et leur caractère massif. On a
aujourd’hui le sentiment, dans les territoires occupés comme en Israël,
qu’il n’y a plus de camp politique et civil international digne de ce nom,
qui exprime une voix alternative à celle des gouvernements.

Certes, nombreux sont les Palestiniens qui n’attribuent plus aucune
importance à l’action des internationaux dans les territoires occupés, alors
qu’aucune action efficace et digne de ce nom n’est menée dans les pays
d’origine contre la complicité de vos gouvernements avec la politique de
punition collective et de boycott qui a transformé le peuple palestinien en
double victime : victime de l’occupation israélienne soutenue par les
Etats-Unis et victime du boycott criminel des autres pays du monde
occidental. Mais ne vous y trompez pas : vous, militants internationaux de
la solidarité et de la paix, serez les prochaines victimes de cette
politique de boycott qu’Israël a réussi à imposer à vos gouvernements.

Après que l’Etat d’Israël eut fermé devant vous les portes de Gaza, il va
maintenant fermer les portes de la Cisjordanie. On parle actuellement en
Israël d’une nouvelle politique d’entrée en Cisjordanie, qui exigera des
internationaux un visa spécial, en plus du visa d’entrée en Israël. Quand,
prochainement, le Mur sera achevé, avec ses nouveaux check-points centraux -
« Terminaux » dans le jargon israélien - il y aura alors un contrôle total
des entrées en Cisjordanie. Même ceux qui seront munis d’un visa d’entrée en
Israël n’auront pas la garantie de pouvoir entrer dans les territoires
occupés. Si nous ne nous opposons pas, dès maintenant, à cette nouvelle
politique, vous serez donc les prochaines victimes de la politique de
boycott et d’enfermement et, contre votre propre volonté, vous deviendrez
complices de ce boycott à l’encontre des Palestiniens.

Chers amis, chers camarades de lutte, sans sous-estimer en rien la gravité
de la situation, la détermination de nos ennemis, et la complicité de la
communauté internationale, reconnaissons pourtant nos propres
responsabilités et notre incapacité à définir une nouvelle stratégie de
lutte susceptible de répondre aux nouveaux défis. En d’autre mots, les
formes de protestation qui ont été les nôtres ne suffisent plus face à la
gravité de la situation : la vente d’huile d’olive palestinienne, les
meetings contre l’occupation, l’invitation de militants palestiniens et
israéliens à ces meetings, l’hébergement de groupes d’enfants, le soutien
aux familles nécessiteuses, les communiqués, manifestations - petites ou
grandes - tout cela est certes important et doit se poursuivre, mais est
tout à fait insuffisant dans la nouvelle conjoncture.

Il faut impérativement mettre en place un combat commun,
palestino-israélo-international contre cette nouvelle politique dont le but
est de transformer les territoires occupés en zone militaire fermée, dans
laquelle l’armée d’occupation pourra faire ce qu’elle veut, loin du regard
des citoyens du monde, comme elle le fait d’ailleurs déjà dans la Bande de
Gaza.

Quand Israël est sur le point de décider de vous retirer le droit de vous
rendre en Cisjordanie, vous devez mener une action politique ferme à
l’encontre de vos gouvernements et dans vos propres sociétés, pour démasquer
la véritable nature de ce boycott. Il est inacceptable qu’alors que les
citoyens israéliens peuvent entrer dans votre pays sans visa ou autre
autorisation spéciale, votre entrée en Israël ou dans les territoires
occupés soit soumise aux conditions imposées par les services de sécurité
israéliens ! Avant même les nouvelles régulations concernant l’entrée dans
les territoires occupés, de nombreux militants internationaux ont été
refoulés aux frontières d’Israël.

Vous devez exiger de vos gouvernements de mettre en œuvre le principe de
réciprocité : tout Israélien qui arrivera en Europe devra recevoir un visa
après un interrogatoire serré sur ses activités, et en particulier, sur son
service militaire. Une telle éventualité peut provoquer un changement de la
politique israélienne envers les internationaux, et permettre à des milliers
de militantes et de militants de servir d’« anti-boycott » pour les
Palestiniens. Nous devons tout faire pour que se reconstituent des missions
de solidarité massives qui contournent les barrages et les blocages dans le
but d’exprimer, dans les territoires occupés et en Israël, une voix
alternative à celle de vos gouvernements.

Votre présence massive, ici à nos côtés, est la réponse que vous pouvez
donner à la politique de boycott contre le peuple palestinien.

Nous, organisations et mouvements de la paix, militantes et militants contre
l’occupation, nous nous organisons dès à présent ici avec les mouvements
palestiniens, pour protester contre cette politique qui va nous interdire
d’entrer en Cisjordanie.

Nous vous attendons !


Holood Badawi
Militante dans la gauche israélienne contre l’occupation
Ta’ayush - partenariat Judéo-arabe
Coalition des Femmes pour la Paix
Bat-Shalom
Fédération des Etudiants Arabes en Israël
Membre du Bureau du parti Hadash

Transmis par CCIPPP

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