Pourquoi les chaînes publiques doivent boycotter l'Eurovision
Le 18 mai, à Tel-Aviv, aura lieu la finale du Festival Eurovision de la chanson, une organisation de l’EBU, la coordination des chaînes publiques européennes. L’événement se tiendra dans un stade à Ramat Aviv, un quartier construit sur les ruines de l’ancien village palestinien de Sheikh Muwanis
En 1947, quelque temps avant ce qu’on appelé la «guerre d’indépendance israélienne», le village avait été attaqué par les troupes de la milice juive de l’Irgun, sous la direction du futur Premier ministre d’Israël et lauréat du prix Nobel de la Paix, Menahem Begin. Les habitants – près de 2000 – avaient été chassés et leurs maisons démolies. Sur le terrain libéré, on avait plus tard construit l’Université de Tel-Aviv.
De 1948 à nos jours, plus de 600 villages palestiniens ont subi le même sort: l’une des plus grandes épurations ethniques du 20è siècle. Quelque 800 000 personnes ont été chassées de leurs maisons et propriétés pour faire place à un État exclusivement juif sur le plan ethnique.
Leur retour et leur dédommagement ont été rendus impossibles jusqu’à ce jour et, selon le droit international, il s’agit d’un crime de guerre.
La propagande israélienne
L’actuel Israël met tout en œuvre pour effacer de la mémoire collective cette naissance par la violence de l’État juif. La culture populaire peut y contribuer.
Pour la propagande israélienne, un événement comme le Concours Eurovision de la chanson est un moyen astucieux de présenter le pays sous les apparences d’un pays européen normal et démocratique. Ce que n’est certes pas l’État juif.
La pensée centrale du sionisme, l’idéologie officielle de l’État d’Israël, c’est que le droit international, les traités internationaux, les droits humains universels et même les jugements des tribunaux israéliens sont subordonnés aux intérêts et à la «sécurité» d’un groupe ethnoreligieux, à savoir les juifs. C’est de l’apartheid – une variante de l’idéologie raciste sud-africaine.
C’est cette idéologie qui met le gouvernement israélien en mesure de justifier des crimes de guerre permanents, une violence exceptionnelle contre Gaza, l’occupation militaire, l’emprisonnement d’enfants, le recours à des armes et munitions interdites, la discrimination de la population non juive, l’assassinat de manifestants sans armes dont des enfants, des paramédicaux, des handicapés et des journalistes.
L’État-nation du peuple juif
L’an dernier, cette idéologie, qui constitue le fondement de l’État d’Israël, a encore été renforcée dans une nouvelle loi définissant Israël comme «l’État-nation du peuple juif».
Récemment encore, l’actuel Premier ministre d’Israël, Benjamin Netanyahu, a expliqué dans des propos sans équivoque ce que signifie cette loi: «Israël n’est pas le pays de ses habitants, mais exclusivement celui des juifs».
Bien que la loi ne propose rien de neuf – uniquement la confirmation de l’idéologie existante – il est à craindre qu’elle ne signifie davantage de répression, de discrimination et d’apartheid pour le 1,8 million de Palestiniens vivant en Israël.
La loi constitue également un encouragement pour les sionistes les plus extrémistes, les «colons» des implantations illégales en Cisjordanie, à réclamer avec plus d’insistance encore l’annexion de territoires occupés. Une exigence qui trouve de plus en plus d’écoute auprès du gouvernement d’extrême-droite de Netanyahu et de son protecteur à Washington, le président Donald Trump.
Dans de telles circonstances, organiser un show de propagande déguisé en festival de la chanson constitue une tantième provocation, un défi à l’adresse de l’opinion publique internationale, de plus en plus consciente du véritable caractère de l’«État juif».
En participant au festival, des chaînes publiques optent pour la partie qui, de façon répétitive, se rend coupable de crimes de guerre et de graves violations des droits humains.
Récemment, encore, le Conseil des droits de l’homme des Nations-unies déclarait qu’Israël pouvait avoir commis des actes ou crimes de guerre contre l’humanité en tuant sans discernement des manifestants sans armes à Gaza.
C’est pourquoi les chaînes publiques en Europe ont le devoir moral d’élever leur voix contre l’apartheid et contre le blanchiment culturel de la discrimination et des crimes de guerre. Qui ne dit mot consent.
Johan Depoortere -
08.05.19
Daan Stuyven conspue l'Eurovision en Israël: "Je suis choqué par l'insouciance avec laquelle nous allons chanter là-bas"
Le musicien flamand Daan Stuyven estime inadmissible que le Concours Eurovision de la chanson ait lieu cette année en Israël et il invite à le boycotter. C’est ce qu’il affirme dans «De afspraak» (émission d’info journalière sur VRT Canvas).
«Il s’agit d’une opération de blanchiment de l’État d’Israël afin de créer une image positive.
Je suis sidéré et choqué par l’insouciance avec laquelle nous allons chanter nos chansonnettes là-bas, dans un pays où des enfants innocents sont abattus, où des citoyens innocents ou sans armes sont assassinés, où l’on impose le silence à certains artistes.
Je suis en fait un fan de ce festival. Par conséquent, je trouve dommage que, cette année, on se serve à mauvais escient de la politique dans un cadre où ce n’est pas de mise.
Il s’agit d’une opération de blanchiment de l’État d’Israël afin de créer une image positive.
Pourquoi d’ailleurs Israël participe-t-il au Concours? Ce n’est pas un pays européen. Il ne défend en aucun cas les valeurs européennes, pas plus qu’ils ne défend celles du festival, d’ailleurs.
C’est la logique même que nous boycottions le Concours de la chanson cette année. Il ne cadre pas avec ce à quoi doit souscrire une chaîne publique en Europe.
Ce message peut bien se faire entendre. On ne peut traiter cela à la légère. Il faut rendre les choses claires de façon radicale et unanime: cela dépasse de très loin les limites de ce que nous pouvons tolérer».
Officiellement, le Concours Eurovision de la chanson est un événement apolitique mais, selon Stuyven, il n’en est rien, ici. «C’est un événement politique gigantesque. Dans le règlement du festival, il est stipulé que les pays participants doivent respecter les droits de l’homme. Et Israël, lui, les viole de façon flagrante. On ne peut pas laisser organiser un tel événement par des criminels de guerre».
09.05.19
Source: Soutien-Palestine