FREE PALESTINE
27 avril 2023

Quand la vérité fait peur... en France, en Belgique et ailleurs...

Source: Externe

"Les interdictions des conférences d’Amnesty International sur Israël s’apparentent à des atteintes répétées à la liberté d’expression"

 

Le président d’Amnesty International France, Jean-Claude Samouiller, regrette, dans une tribune du Monde, le manque de soutien du ministère de l’intérieur alors que l’ONG est confrontée à un déchaînement de haine et de menaces parce qu’elle a qualifié d’«apartheid» le système de répression de l’Etat israélien à l’égard des Palestiniens.

Semaine après semaine, mois après mois, la liste des refus d’accueillir nos conférences sur la situation d’apartheid en Israël et dans les territoires palestiniens ne fait que s’allonger. A Montpellier, l’autorisation d’utiliser une salle municipale nous est retirée en mai 2022. A Aix-en-Provence, une conférence est annulée à l’université le 23 novembre 2022. A Marseille, Lyon, puis Toulouse, c’est le prêt de salles municipales qui nous est refusé.

Parfois, les raisons semblent factices (un «chauffage non branché»). Plus souvent, il est invoqué un «risque de sécurité» ou de «troubles» par des autorités locales ou responsables de salles pour annuler des événements prévus de longue date. Seul point commun à ces refus de débattre: ces rencontres portent directement ou indirectement sur les agissements des autorités israéliennes.

Pour la plupart de ces rencontres, il s’agit en effet de discuter du système de discrimination et de répression en cours en Israël, que nous avons qualifié juridiquement d’«apartheid», après plusieurs années d’enquêtes sur le terrain. A chaque fois, la méthode semble la même. Une mobilisation des soutiens du gouvernement israélien sur les réseaux sociaux, soutenus par des organisations françaises, parvient à convaincre les responsables de salles que la tenue de cette réunion ne pourra qu’entraîner des problèmes, et risque implicitement d’avoir des conséquences politiques sur l’élu local qui en serait tenu responsable.

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A chaque fois ou presque, les organisateurs ont trouvé une solution de repli, et les réunions ont pu se tenir dans d’autres locaux. Mais ces interdictions à répétition s’apparentent à des atteintes répétées à la liberté d’expression et constituent une dérive sans précédent. C’est particulièrement flagrant lorsqu’il s’agit d’empêcher un citoyen libre d’apporter son témoignage. A Lyon, le 1er février, l’avocat franco-palestinien Salah Hamouri devait ainsi participer à une conférence à l’invitation du maire (Europe Ecologie-Les Verts) de la ville, Grégory Doucet.

La présence de ce défenseur des droits humains, libéré et expulsé par l’Etat d’Israël après neuf mois de détention administrative sans preuves ni charges ni procès, a provoqué les foudres de «haters» (militants agressifs, violents et le plus souvent anonymes sur les réseaux sociaux). Après des menaces physiques et injures proférées à l’encontre d’une adjointe au maire, ce dernier a préféré annoncer l’annulation et le report sine die de cette table ronde.

Un déchaînement de messages haineux

A noter dans ce dossier que le ministre français de l’intérieur, Gérald Darmanin, avait lui-même pris la parole alors, pour affirmer que si cela n’avait pas été le cas, il aurait lui-même fait interdire la table ronde par la préfecture. Sous quel motif? Nul ne le sait.

Plus récemment, encore, c’est à Nancy, le 15 mars, que le préfet de Meurthe-et-Moselle a interdit une conférence devant également accueillir Salah Hamouri pour «risques de troubles à l’ordre public». L’autorité reprochait aussi aux organisateurs «l’absence d’anticipation des mesures d’encadrement et de sécurité nécessaires pour un tel évènement».

Saisie par l’avocat franco-palestinien et par plusieurs ONG de défense des droits humains, dont Amnesty International France, la justice a suspendu l’interdiction, permettant ainsi à la conférence de se tenir. Ce lundi 10 avril, encore, une interview de Salah Hamouri accordée au site de Radio France internationale a de nouveau suscité un déchaînement de messages haineux et des menaces, tant à son encontre qu’en direction du média lui-même.

Nous n’acceptons pas de laisser le champ libre à des personnes malintentionnées, qui souhaitent démonter, pour des raisons politiques, un travail documenté de quatre années de recherches. Nous n’acceptons pas de laisser ces mêmes personnes bâillonner les défenseurs des droits humains sous prétexte qu’ils ne seraient pas légitimes, selon eux, à évoquer les exactions qu’ils ont vécues dans leur chair.

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Libre information du public

Nous n’acceptons pas les menaces qui pèsent sur les militants d’Amnesty International alors qu’ils tentent simplement d’ouvrir la discussion sur un sujet avec d’autres citoyens de leur commune. Les pressions exercées n’ont qu’un seul et même but: empêcher l’exercice de la liberté d’expression d’un individu ou d’une organisation, qui devrait être garantie dans un Etat de droit.

Et de ce point de vue, les textes internationaux sont clairs. De ce droit découle en effet celui de la libre information du public, essentielle pour se forger une opinion éclairée. Si la répression de l’incitation à la haine et à la discrimination est légitime et nécessaire, elle ne peut se confondre avec la critique tout aussi légitime de la politique d’un Etat.

Il va sans dire qu’aucune conférence donnée par Salah Hamouri, ou à laquelle Amnesty International France a participé, n’a donné lieu à une expression relevant de l’appel à la haine.

A l’inverse, l’actualité de ces dernières semaines en Israël et dans les territoires palestiniens occupés ne fait que confirmer les conclusions et les analyses contenues dans notre rapport concernant le système d’«apartheid» qui y prévaut.

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Une qualification juridique

Cette terminologie n’est pas une provocation, mais une qualification juridique qui est clairement inscrite dans le Droit international. Ce système a été qualifié comme tel par d’autres ONG palestiniennes, israéliennes, internationales, ou encore par des rapporteurs des Nations-unies. De nombreux commentateurs et éditorialistes y font également régulièrement référence dans les médias israéliens.

Il n’y a strictement aucune raison légale – autre que celle d’un hypothétique trouble pour le moment fantasmé – d’interdire ou d’annuler une réunion au prétexte que la dénomination de celle-ci porte sur ce système mis en place par l’Etat d’Israël.

Nous demandons aux responsables de salles dans lesquelles ces rencontres doivent se dérouler de ne pas céder à ces pressions partisanes, et au ministre de l’intérieur de bien veiller à ce que le droit fondamental à la liberté d’expression soit pleinement respecté. Ce n’est pas aux organisateurs de ces rencontres qu’il faut s’attaquer, mais à leurs contempteurs.

Jean-Claude Samouiller -

20.04.23

Source: Aurdip

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