!! ATTENTION!! Le 'retour à la normale' n'augure rien de bon + Infos du jour
'Israël' rappelle aux Arabes israéliens qu’ils sont Palestiniens
Face à la révolte de sa minorité arabe, 'Israël', régulièrement confronté au même dilemme – la traiter comme un ensemble de citoyens à part entière ou appliquer une répression arbitraire et massive – a systématiquement opté pour la seconde option
À Beer-Sheva, Jaffa, Haïfa, Kafr Kanna, Lod, Nazareth ou Umm al-Fahm, les Palestiniens d’Israël ont massivement pris part à l’un des plus importants soulèvements dans l’histoire de cette population, tant par son intensité que sa violence.
Face à un régime d’apartheid qui fragmente le peuple palestinien et le confronte à des situations d’oppression de différents niveaux, la jeunesse de cette minorité qui compose 18% de la population israélienne a rappelé son attachement et son appartenance au peuple palestinien.
En octobre 2000, déjà, parallèlement au début de la seconde Intifada dans la bande de Gaza et en Cisjordanie occupée, des jeunes Palestiniens d’Israël avaient manifesté leur solidarité et s’étaient attaqués aux symboles de l’État.
Face à une révolte inattendue au sein même de leurs frontières, les autorités israéliennes avaient opté pour la manière forte en faisant abattre treize d’entre eux par des snipers.
Cette fois, la police israélienne a d’abord tenté de juguler les émeutiers et manifestants à l’aide de grenades assourdissantes, gaz lacrymogènes et arrestations arbitraires de plusieurs centaines de personnes.
Des députés d’extrême-droite au ministre de l’Intérieur Amir Ohana, beaucoup ont appelé plus ou moins directement les miliciens d’extrême-droite à venir prêter main-forte.
Arrestation massive pour les Palestiniens contre inculpation ciblée pour les juifs
Ainsi, en quelques jours, le mythe des "villes mixtes" comme laboratoire du vivre-ensemble israélien a pris un sérieux coup.
Les Palestiniens de ces municipalités organisant à la hâte des patrouilles pour prévenir les descentes de colons venus de Cisjordanie, ou de jeunes fascistes prêts à en découdre, assurés de leur supériorité car autorisés à porter des armes.
La suite est connue: aux émeutes de jeunes Palestiniens succèdent des marches d’extrémistes juifs appelant à «tuer les Arabes» et multipliant les lynchages. Aux restaurants ou magasins juifs attaqués répondent des boutiques et épiceries palestiniennes pillées et incendiées.
Les affrontements entre Arabes et juifs se multiplient. À cela s’ajoute le déploiement de l’armée pour organiser la répression d’une population considérée théoriquement comme des concitoyens.
Dimanche 16 mai, la presse israélienne annonce 116 premières inculpations suite à ces événements. Tous sont Palestiniens.
Par la suite, moins d’une dizaine de juifs sont interpellés, accusés d’avoir participé au lynchage d’un automobiliste arabe, sous l’œil des caméras de télévision du pays, la retransmission de l’acte sur les chaînes d’information l’empêchant de demeurer impuni.
Une semaine plus tard, les autorités israéliennes annoncent des centaines d’arrestations parmi la minorité palestinienne. Tandis que les militants kahanistes et autres extrémistes n’ont pas été inquiétés après leurs ratonnades à Jérusalem ou dans plusieurs villes mixtes, l’opération 'loi et ordre' doit rappeler aux Palestiniens d’Israël leur statut de sous-citoyen.
Au lendemain des élections de mars 2021, pour lequel l’électorat palestinien d’Israël a été courtisé par l’ensemble du champ politique – extrême-droite comprise – nombre de commentateurs plus ou moins sympathisants de l’État d’Israël notaient une claire volonté, parmi cette communauté, de se mobiliser autour de leurs problématiques au détriment des enjeux liés à la Cisjordanie et à la bande de Gaza.
La scission de l’islamiste Mansour Abbas de la 'Liste unifiée', dirigée par le communiste arabe Ayman Odeh, au profit de sa propre formation, devait être le point d’orgue de cette démonstration.
En menant campagne essentiellement sur des enjeux propres aux "Arabes israéliens" et en refusant lors de ses meetings de s’affirmer comme "Palestinien", Mansour Abbas aurait bénéficié d’un soutien inattendu d’une part considérable de la classe moyenne arabe.
Une discrimination systémique
Après la "palestinisation" des années 1980 et 1990, la minorité arabe d’Israël serait en voie d’"israélisation". La presse israélienne relaie ces chiffres éloquents: en douze ans, le nombre d’Arabes dans les universités du pays a doublé, avec + 104% entre 2012 et 2018.
Entre 2007 et 2016, le nombre d’Arabes disposant d’un revenu équivalent ou supérieur au salaire médian national est passé de 15,9% à 22,6%.
Cela ne doit pas faire oublier que la population arabe d’Israël compte près de trois fois plus d’habitants sous le seuil de pauvreté que les juifs israéliens. Surtout, ces chiffres tendent à cacher la discrimination systémique subie par cette population. Selon 'Adalah', ONG de défense des droits des Palestiniens d’Israël, 65 lois participent à ce racisme institutionnel.
En d’autres termes, l’augmentation des budgets alloués aux communes arabes ou le renforcement de la sécurité dans ces municipalités, où les taux de criminalité sont les premières inquiétudes de leurs habitants, peuvent améliorer la qualité de vie mais ne donnent en rien accès à une égalité pleine et entière.
Pire, la "coexistence judéo-arabe" dans les villes mixtes ne peut effacer ni «le processus de 'judaïsation'», en cours depuis 1948, imposée par la force aux populations palestiniennes, ni le racisme quotidien.
Israël continue de distinguer la citoyenneté de l’appartenance nationale: vos droits en tant que citoyen dépendent du groupe national auquel vous êtes rattaché. Privilèges et accès à l’ensemble des emplois et du pouvoir décisionnel pour les juifs; discrimination et relégation pour les Arabes.
En organisant des arrestations ciblées parmi les extrémistes juifs, contre des inculpations arbitraires et massives parmi la population arabe, 'Israël' donne tout son sens à l’expression martelée par les ONG du pays: «'Israël' est une démocratie pour les juifs, et un État juif pour les Arabes».
Thomas Vescovi -
26.05.21
Source: Aurdip
Dans le même esprit de ce qui précède, Gideon Levy confirme: 'Israël' revient à sa "normalité"
Vendredi dernier, à midi, la piscine municipale a rouvert. Comme la ville craignait que les nageurs ne glissent sur un sol mouillé alors qu’ils se précipitaient vers les abris, la piscine a alors été fermée pendant les récentes hostilités. Les Gazaouis peuvent se fendre de rire ou mourir d’envie, étant donné qu’il n’y a ni piscine ni abri de disponibles là-bas.
Dimanche, les ouvriers palestiniens qui construisent les nouveaux vestiaires de la piscine reprendront le travail. La piscine a été construite sur les ruines d’un bassin d’alimentation en eau desservant le village disparu depuis longtemps de Sheikh Muwanis. Ces ouvriers se lèveront à nouveau à 03h du matin dans leurs maisons en Cisjordanie occupée afin d’atteindre le checkpoint à 05h et leur travail à 06h, afin de construire des vestiaires juifs, dont on ne trouve pas trace dans leurs propres villages.
À 06h, ce samedi, Hayarkon Park était plein de joggeurs et de cyclistes, heureux d’être de retour. Les conversations liées aux questions militaires – “Où ont-ils obtenu des missiles Kornet?” – ont été progressivement remplacées par le discours habituel sur la vitesse, les distances et les mesures de rythme cardiaque.
Sur les courts de tennis d’en face, les derniers fêtards éthiopiens sortaient d’une soirée au club de sport “blanc” qui se transforme samedi soir en discothèque “noire”. Et de Gaza, les photos et les vidéos ont continué à couler: des gens sous le choc des bombes à côté des décombres, des tentes pour le deuil, le bâtiment bombardé abritant le ministère de la Santé, avec un père et un enfant en bas âge debout dans la rue, le père cueillant quelques fleurs d’un buisson et les offrant à son fils dans un moment déchirant et faisant monter des larmes.
K.T., étudiante en médecine à l’université Al-Azhar de Gaza, qui a pris ces photos et clips vidéo, a hésité avant de sortir de chez elle vendredi, pour la première fois en 11 jours, afin de voir les destructions. «J’étais très méfiante à l’idée de sortir, mais ensuite j’ai pensé que c’était l’histoire palestinienne alors qu’elle se fait, et je voulais la voir de mes propres yeux. Je veux me souvenir de ces crimes et alimenter ma rage», a-t-elle écrit.
Les postes de contrôle près de la clôture de Gaza et à Jaffa ont été supprimés vendredi, les abris de Tel-Aviv fermeront dimanche, et Galina, la chienne qui a disparu lors de la première sirène et dont les propriétaires ont posté des affiches en nombre infini dans le parc depuis lors, n’est apparemment pas encore rentrée chez elle: reviens Galina! Il est temps de revenir à la normale!
C’est cette routine qui provoquera la prochaine guerre. Tout ce qui était et tout ce qui sera fournira le carburant pour la prochaine série d’hostilités. Le blocus de Gaza se poursuivra; la botte israélienne continuera d’appuyer sur le cou de la Cisjordanie; et dans les villes mixtes judéo-arabes, les provocations se poursuivront contre les restes de la communauté palestinienne d’avant 1948, tandis que le monde continuera à soutenir 'Israël'.
L’arrogance restera également telle qu’elle était: nous provoquerons et tourmenterons, humilierons et opprimerons, en restant convaincus que nous pouvons continuer à le faire en toute impunité. Il est difficile de croire à quel point 'Israël' est prêt à investir dans chaque guerre sans rien investir pour essayer de l’empêcher. Comment il ne s’inquiète pas des risques de guerre mais tremble de peur à toute tentative de l’empêcher. En Israël, parler avec le Hamas est présenté comme une option bien plus dangereuse que de le bombarder.
Y a-t-il même un Israélien avec un plan pour Gaza? Y a-t-il un Israélien qui sait ce qu’Israël attend de Gaza, autre que le calme pour son propre peuple? Devraient-ils nous jeter du riz en l’honneur de l’étouffement que nous leur imposons? Devraient-ils nous accueillir en l’honneur de la destruction que nous avons semée? Devraient-ils oublier tout ce que nous avons fait à Gaza depuis 1948 et jusqu’à ce jour, sans frais pour nous? Israël a-t-il déjà essayé une méthode différente avec Gaza autre que la méthode unilatérale?
Quelques heures après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu, Israël a fait confiance aveuglément au Hamas, ouvrant des routes et des écoles et fermant des abris. En d’autres termes, il y a un partenaire à Gaza en qui on peut avoir confiance, ils sont à la hauteur de leur parole.
Peut-être devrions-nous essayer de leur parler avant la prochaine guerre, pas seulement après? Le Hamas ne manque pas de courage ni de volonté de sacrifice, bien plus d’ailleurs que nous. Peut-être que ce courage se traduira cette fois par un courage politique? Il y a des gens rationnels là-bas aussi, il faut s’en souvenir.
Mais ce sont des paroles creuses. Galina pourrait rentrer chez elle, mais Israël n’apprendra rien et n’oubliera rien. Le général à la retraite Israel Ziv retournera dans les studios de télévision afin d’expliquer comment nous devrions frapper et détruire, autant que possible, sous les acclamations des téléspectateurs.
Bienvenue à nouveau dans notre routine habituelle.
Gideon Levy -
26.05.21
Source: Chronique de Palestine
INFOS DU JOUR:
- Lors d’une conférence de presse, le chef du Hamas à Gaza, Yahya Sinwar, a déclaré que la récente guerre de Gaza n’a point affaibli la Résistance palestinienne (...) Il a ajouté que la Résistance disposait d’au moins 10.000 hommes dans les territoires occupés et à Quds prêts à tout moment, à mener des opérations anti-israéliennes en réaction à la moindre exaction contre la Mosquée Al-Aqsa (...) «Contrairement aux prétentions de l’ennemi, nous avons encore plus de 500km de tunnels à Gaza et moins de 5% d'entre eux ont été endommagés dans ce conflit», a-t-il déclaré.
- Le secrétaire général du Hezbollah libanais, S.H.Nasrallah, a prononcé le mardi 25 mai un discours à l’occasion du jour anniversaire de la libération du sud du Liban(...): «Je félicite la très grande victoire de la Résistance à Gaza, une victoire à la fois du peuple palestinien et de tous les groupes de la Résistance (...) Cette récente bataille a été marquée par une brillantissime démonstration de force de tous les groupes qui composent la Résistance palestinienne et surtout des commandants de ses branches militaires. J'ai suivi de près les évolutions dès le premier instant et je tiens surtout à rendre hommage a l'impérissable figure de la Résistance, le martyr Soleimani pour ses soutiens à la Palestine et au Liban. Au fait la victoire au Liban n'a été qu'un prélude à la victoire de la Palestine (...) La riposte de la Résistance palestinienne au régime occupant et à ses exactions à Sheikh Jarrah a été décisive, historique même. Or certains pays arabes ont refusé comme toujours de prendre parti et se ranger aux côtés de la Palestine comme il faut, et ce en dépit de tout ce qui s'y passe. Ces régimes ont même cherché à redorer le blason d'Israël. Mais Gaza lui, a pris de court amis et ennemis en mettant à exécution sa menace de riposte», a-t-il déclaré.
Source: presstv.com