Alors que les cas augmentent, le principal labo de Gaza pour le Covid-19 à l'arrêt par manque de matériel
On ne connaît pas le véritable nombre de cas à Gaza en raison du faible taux de tests, mais environ 30% des tests sont positifs
Le principal laboratoire pratiquant les tests du coronavirus dans la bande de Gaza a cessé d’agir dimanche en raison d’un manque grave de matériel et de produits nécessaires, a déclaré le Ministère de la santé de Gaza.
C’est le dernier d’une série de signaux sur l’état de la situation sanitaire liée à l’augmentation continue du nombre de patients atteints du coronavirus. Ainsi que l’a rapporté Haaretz la semaine dernière, autour de 30% des tests sont positifs, sur la base d’un nombre quotidien de tests compris entre 2000 et 2500.
726 nouveaux patients ont été diagnostiqués au cours des dernières 24 heures, portant le nombre de cas actifs de coronavirus à 10.591.
375 sont hospitalisés et 157 en assistance respiratoire. Le ministère a indiqué qu’il a récemment fait en sorte d’accroître le nombre de lits d’hôpitaux pour le coronavirus à 170 et qu’il espère obtenir du matériel dans les prochaines semaines pour faire monter ce nombre à 200.
Des sources ministérielles ont dit que le nombre effectif de porteurs du virus dépasse probablement les chiffres officiels, étant donné le faible taux de tests journaliers et le fait que le laboratoire d’analyses a cessé de fonctionner.
Au cours du week-end, 10 médecins israéliens ont constaté en direct la situation à Gaza lors d’une visite organisée par Médecins pour les droits humains (PHR). C’est la première fois que des médecins israéliens entrent sur ce territoire depuis le début de la pandémie. Ces médecins sont restés sur place de jeudi à dimanche et ont accompli des opérations complexes dans deux hôpitaux – Nasser dans le sud de la bande de Gaza et Shifa dans la ville de Gaza.
Un des médecins en visite, le professeur Iyad Khamaysi, qui est directeur de l’unité d’endoscopie au centre médical Rambam de Haïfa, a dit «qu’alors que tout le monde est maintenant focalisé sur le coronavirus, la gravité de l’état du système de santé de Gaza n’est pas due qu’à la pandémie. De nombreux patients souffrant de maladies chroniques dans le territoire, dont des malades du cancer, ont besoin d’urgence de traitements mais sont laissés de côté à cause du virus».
«Il faut se rappeler que la main d’œuvre est limitée et que les hôpitaux ont eux-mêmes des ressources limitées. De façon générale, Gaza a souffert d’un grave manque de médicaments et le système de santé était déjà déficient avant le coronavirus. J’ai constaté un très grand nombre de cas où les patients avaient besoin d’urgence d’un traitement mais où il n’y avait personne pour l’assurer», a-t-il dit.
«Par exemple, l’hôpital européen de Gaza à Khan Younis a été transformé en hôpital pour les malades du coronavirus. Tous les autres patients ont été envoyés dans d’autres hôpitaux et cela a juste encore davantage pesé sur le système. Je me suis trouvé face à des cas très graves tels que ceux de patients transplantés qui nécessitaient un traitement et une médication mais il n’y avait personne qui puisse les fournir» a ajouté le Professeur Khamaysi.
Un autre membre du groupe, le Dr Jamal Dakdouki, est psychologue et a pratiqué des ateliers pour des professionnels palestiniens de santé mentale sur la façon de faire face au coronavirus d’un point de vue de santé mentale. Il a dit que la détresse de Gaza dépasse largement le système de santé.
Le Dr Dakdouki a dit qu’il a vu jeudi soir des foules de gens se rassembler devant les agences bancaires ATM (Banque de Jordanie) pour retire l’argent des salaires qu’ils venaient de déposer. «On voit la détresse chez chacun et il est clair que la pression économique est très forte. Les gens préfèrent passer des heures devant leur agence bancaire même s’il y a un monde fou, pour pouvoir retirer quelques centaines de shekels. Si l’on met en balance la santé et les moyens de subsistance, on voit clairement où est la priorité».
Les médecins israéliens ont dit, sur la base de conversations avec leurs homologues palestiniens, que la pression grandit sur la direction Hamas de Gaza qui veut imposer un confinement total plutôt que le couvre-feu nocturne imposé la semaine dernière. Le Dr Dakdouki a parlé d’une forte préoccupation quant au nombre de patients hospitalisés, qui risque de s’envoler du fait d’une affluence de malades de la grippe aussi bien que du coronavirus et qui conduirait à discuter d’imposer un confinement de deux semaines à partir du 15 décembre.
La délégation a apporté du matériel médical et des médicaments pour divers traitements, pas seulement pour le virus. L’essentiel a été livré directement à des hôpitaux et le reste à la division pharmaceutique du ministère de la santé de Gaza.
«Le système de santé de Gaza connaît une crise grave depuis des années, et encore plus depuis l’apparition du coronavirus» a dit Salah Haj Yahye qui coordonne l’activité de PHR à Gaza. Il a ajouté que cette visite n’était pas une simple opération humanitaire mais aussi un rappel du blocus prolongé dont souffre Gaza, qui nuit aux patients, au personnel médical et à la totalité de la population.
[Cette information via Haaretz est confirmée par Amjad Shawa, directeur du PNGO (Palestinian Non-Governmental Organisations Network) que nous avons rencontré plusieurs fois à Gaza lors des Missions civiles, et qui nous a envoyé un courriel il y a quelques jours demandant que tous les amis et associations qui soutiennent la Palestine mettent tout en oeuvre pour organiser l'acheminement urgent d'un maximum de matériel médical, tant la crise est sévère-ndlr MCP]
Jack Khoury -
07.12.20
Source: Aurdip