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29 novembre 2009

L’Aïd al-Adha et la lutte d’une famille de Gaza pour sa survie

L’Aïd al-Adha et la lutte d’une famille de Gaza pour sa survie

samedi 28 novembre 2009 - Rami Almeghari - The Electronic Intifada

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Rawan, 11 ans, à sa maison du camps de réfugiés d’al-Maghazi à Gaza - Photo : Rami Almeghari

Traditionnellement, les musulmans tuent un agneau (ou offrir de l’argent pour qu’un agneau soit tué pour une famille de pauvres), comme un acte de foi semblable à celui fait par le prophète Abraham. Dans de nombreux pays musulmans, c’est aussi un moment de fête dans l’année, marqué par les visites des familles, l’achat de vêtements neufs, les remises de cadeaux et de friandises et bonbons aux invités.

Daoud Ahmad Suleiman, âgé 48 ans, est un ouvrier du bâtiment sans emploi et cela fait 3 ans qu’il n’a plus trouvé de travail en raison du blocus israélien imposé sur la bande de Gaza. La vie d’Ahmad et de sa famille dans le quartier Al-Maghazi camp de réfugiés est devenue désespérément difficile, une situation qui est particulièrement remis à l’esprit durant l’Aïd.

« Au cours des trois dernières années, j’ai accumulé beaucoup d’amertume au fond de moi-même car j’ai été incapable de suivre les rituels de l’Aïd al-Adha ainsi que [de répondre] aux dépenses quotidiennes de base de ma famille », nous dit Ahmad depuis chez lui, entouré de deux de ses enfants, sa fille Rawan (11 ans) et son fils Ahmad (9 ans).

La maison construite il y a quelques années par l’UNRWA, l’agence des Nations unies pour les réfugiés de Palestine, se compose de trois chambres : une pour Ahmad et son épouse et les deux autres partagées par tous les enfants.

Avant le déclenchement de la deuxième Intifada palestinienne en 2000, Ahmad était un des milliers d’ouvriers qui allaient travailler en Israël. Mais Israël a d’abord chassé les travailleurs venant de Gaza puis a ensuite imposé un siège qui a rendu presque impossible pour Ahmad de gagner sa vie. Ahmad m’a dit que quelques heures avant que je ne le questionne, il s’était querellé avec un de ses fils qui fait des études pour être infirmier. « Je n’avais pas les moyens de lui donner 10 shekels [trois dollars] pour ses besoins de transport, vous rendez-vous compte ? »

Au milieu de ces privations quotidiennes, il est difficile de remplir les obligations sociales de l’Aïd. « J’ai deux sœurs qui vivent à 20 kilomètres au sud de Gaza », explique Ahmad. « Même si je voulais leur rendre visite pour l’Aïd, je ne le pourrais pas parce que je n’ai pas la possibilité d’apporter avec moi un peu de viande d’agneau ou d’autres cadeaux. » Parce qu’il ne voudrait pas rendre visite aux membres de la famille les mains vides, Ahmad n’a pas rendu visite à ses sœurs lors de l’Aïd des dernières années et ne pourra très probablement pas le faire cette année.

La petite maison d’Ahmad est devenue une sorte de prison, et il préfère rester à l’intérieur plutôt que de sortir et d’être confronté aux obligations financières de l’Aïd. « Si je vais dehors, » a-t-il dit,« je devrais chercher des choses pour ma famille et mes enfants que je ne peux pas me permettre pour l’instant. » Ahmad explique que sa famille dépend principalement de l’aide alimentaire fournie par l’UNRWA.

Dans un coin de la maison, Nadia al-Oustaz, l’épouse d’Ahmad, a préparé le riz pour le déjeuner de la famille à l’aide d’un petit réchaud marchant faiblement au kérosène en raison de l’absence de gaz domestique dans Gaza depuis des trois dernières semaines en raison du bouclage israélien].

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Daoud Suleiman Ahmad - Photo : Rami Almeghari

« Quoi que nous fassions, comme vous pouvez le voir, nous ne pouvons qu’acheter de la nourriture pour les enfants, » dit Al-Ustaz, « et je remercie Dieu que nous puissions leur assurer cela. » A propos de l’Aïd, elle dit : « C’est un moment extraordinaire de l’année pour nous. Comme beaucoup d’autres femmes, je souhaitais que mon mari puisse me faire un cadeau, mais je ne veux pas lui causer de souci avec cela, car notre vie est déjà assez difficile et nous ne pouvons pas nous offrir de telles choses. »

Pour les enfants aussi, ce moment de vacances est celui où on attend de nouveaux jouets pour s’amuser avec. Rawan nous dit qu’elle voulait une poupée Barbie, mais qu’elle savait que son père ne pouvait la lui offrir. Le petit Ahmad avait été cruellement déçu lors de l’Aïd de l’année dernière car il n’a pas pu avoir de ballon de football pour jouer avec ses amis.

Ahmad estime que de nouveaux vêtements pour chacun de ses enfants coûterait plus de 200 shekels (55 dollars), par conséquent en acheter de nouveaux pour l’Aïd est hors de question. Son prochain rendez-vous est chez un tailleur à proximité afin d’y apporter de vieux vêtements à recoudre et à ajuster plutôt que d’en acheter de nouveaux.

Ahmad a remis une paire de pantalons de sa fille Rawan à Muhammad al-Rifai, qui tient une petite boutique de tailleur dans le camp de réfugiés d’al-Maghazi. « Plus d’une centaine de ménages ont apporté des vêtements pour la réparation à mon magasin, juste avant l’Aïd », dit Al-Rifai, « et bien sûr je ne suis pas le seul magasin de la ville. » Selon Al-Rifai, qui détenait autrefois une fabrique de vêtements, avant le siège israélien, ce nombre de demandes est nettement en hausse par rapport aux années précédentes.

Sur toute la bande de Gaza, de nombreuses familles comme celle de Daoud Ahmad Suleiman seront dans l’incapacité de marquer l’Aïd de la façon traditionnelle. Selon les estimations locales et internationales, le taux de pauvreté dans la bande de Gaza a atteint un sommet avec plus de 70% des 1,5 million d’habitants - donc la grande majorité des familles comme celle d’Ahmad - recevant une aide alimentaire de l’UNRWA.

« J’ai vu dans mes rêves des fleurs, la paix et la sécurité. » Telles sont les paroles d’une chanson que chantait Rawan. Ces désirs - ainsi que celui d’une vie digne - risquent pour des centaines de milliers de réfugiés dans Gaza, de rester seulement des rêves dans les temps à venir.

* Rami Munir Almeghari est journaliste indépendant et conférencier universitaire à temps partiel ; il vit dans la bande de Gaza.

Il peut être contacté à : rami_almeghari@hotmail.com.

25 novembre 2009 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à :
http://electronicintifada.net/v2/ar...
Traduction : Info-Palestine.net

http://www.info-palestine.net/article.php3?id_article=7709

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