FREE PALESTINE
26 janvier 2009

Changer les règles du jeu

Changer les règles du jeu

Emad Gad

D’intenses efforts diplomatiques sont déployés pour mettre un terme aux agressions israéliennes sur la bande de Gaza. Cependant, les forces israéliennes poursuivent leurs opérations militaires, insistant pour que l’arrêt des agressions émane d’une décision purement israélienne. D’autre part, le Hamas, avec un soutien irano-syrien, a refusé de renouveler la trêve et a modifié ses conditions. Il revendique que le renouvellement de la trêve soit lié à la levée du blocus et à l’ouverture permanente du passage de Rafah, insistant pour que les roquettes lancées par le Hamas sur les villes israéliennes au sud aient pour but de préparer le terrain au changement des conjonctures actuelles. Israël a exploité la période transitoire aux Etats-Unis, le soutien européen et la vive division arabe, afin de changer les règles du jeu dans la région. De plus, il a fort profité du fait que le Hamas a perdu sa vision politique, ainsi que la capacité d’interagir avec les conjonctures actuelles en vertu des règles du jeu politique. Dans le but de confirmer sa force, le Hamas a tenu à paraître comme l’égal des forces israéliennes. C’est ainsi qu’il a refusé la résolution 1860, émise par le Conseil de sécurité, exactement comme l’a fait Israël. De plus, lorsque l’Egypte a proposé son initiative, le Hamas s’est empressé de la refuser. Alors qu’Israël a déclaré que l’initiative portait des aspects positifs et qu’il allait l’étudier, le Hamas s’est empressé de répondre négativement, déclarant même qu’elle ne pouvait constituer un fondement de négociation. Bien plus, le mouvement a confirmé qu’elle avait pour objectif d’étouffer la résistance. Cette expression insinue l’existence d’un complot égyptien avec l’agression israélienne.

Israël a réalisé que les pays arabes étaient divisés autour de sa guerre contre la bande. Il est vrai que tous les pays arabes œuvrent à mettre un terme aux agressions israéliennes, notamment après le nombre croissant des victimes. Cependant, ils ne sont pas d’accord sur les moyens de mettre un terme à ces agressions. L’axe qui soutient le mouvement du Hamas et qui regroupe la Syrie, le Qatar, l’Iran et le Hezbollah revendique la nécessité que le cessez-le-feu englobe le retrait des forces israéliennes de la bande, la levée du blocus et l’ouverture des passages. D’autre part, l’axe qui œuvre avec l’Autorité nationale palestinienne et qui regroupe l’Egypte, l’Arabie saoudite et la Jordanie, estime la nécessité que le cessez-le-feu englobe le retour de l’Autorité à exercer ses missions légitimes. Cet axe juge que tout accord sur la réouverture des passages, et notamment le passage de Rafah, doit se faire avec l’Autorité nationale palestinienne, comme prélude à la réconciliation nationale palestinienne.

La division arabe s’est transformée en un échange d’accusations médiatiques entre les deux axes. C’est ainsi que les médias se sont engagés dans des batailles défendant leurs propres opinions et attaquant l’autre clan. Ceci s’est clairement révélé dans la course à la tenue des sommets et conférences. Le premier axe qui soutient le Hamas a invité, par le biais du Qatar, à la tenue d’un sommet arabe exceptionnel à Doha, tandis que l’autre axe a tenu à étudier tous les détails en marge du sommet économique de Koweït. Le sommet de Doha n’a pas pu assurer le quorum nécessaire à la tenue d’un sommet exceptionnel. Pourtant, il a été décidé que le sommet se tient avec ceux qui veulent bien y prendre part. L’Arabie saoudite a précédé ce sommet par la tenue d’une réunion rassemblant les dirigeants des pays du Conseil de coopération du Golfe le 15 janvier, qui a transféré le dossier au sommet de Koweït.

Avec le temps, il s’est avéré que les forces israéliennes réalisent de grands progrès sur le terrain sans pour autant subir de pertes humaines comme celles subies durant sa guerre contre le Hezbollah au Liban en 2006. Par conséquent, Israël a commencé à réfléchir, avec la coordination de l’Administration américaine républicaine, à arranger un cessez-le-feu unilatéral ainsi qu’un retrait dans le cadre d’un accord pour des arrangements sécuritaires déterminés garantissant le changement des règles du jeu dans la bande. Ceci s’est reflété dans le mémorandum d’entente, signé entre la secrétaire d’Etat américaine et la ministre israélienne des Affaires étrangères le 16 janvier, soit 4 jours seulement avant l’ascension au pouvoir de la nouvelle Administration américaine. Dans ce mémorandum, les Etats-Unis s’engagent à œuvrer à interdire l’arrivée des armes au mouvement du Hamas par mer. C’est ainsi que la marine de l’Otan s’engage à poursuivre les navires suspectés de transférer les armes au Hamas.

Israël va continuer à arranger un cessez-le-feu unilatéral sans pour autant que cela signifie qu’il ne coordonnera pas avec l’Egypte et l’Autorité nationale palestinienne. Ceci ne signifie pas non plus qu’il ne conservera pas des emplacements déterminés au sein de Gaza pour continuer à poursuivre les dirigeants et les cadres du Hamas. Il est clair qu’Israël œuvrera dans l’avenir proche à arranger les conjonctures à Gaza, afin d’affaiblir au maximum le Hamas et son emprise dans cette partie. Il œuvrera même dans une étape ultérieure à alimenter le conflit interpalestinien afin d’opérer une division dans les rangs du Hamas avec la sortie d’un clan du Hamas de l’intérieur qui estime la nécessité d’exprimer une plus grande flexibilité pour parvenir à un compromis avec l’Autorité palestinienne. Il existe une division dans les rangs du Hamas depuis plus d’une décennie. Des voix ont toujours revendiqué la présence d’une aile politique loin de l’hégémonie de l’aile militaire rigoriste et du bureau politique de Damas. Par ailleurs, il est certain que les résultats catastrophiques de la guerre israélienne contre Gaza affaibliront beaucoup l’aile rigoriste du Hamas et consolideront le courant moins rigoriste qui peut parvenir à un compromis avec l’Autorité palestinienne. Ces réactions prendront un certain temps afin de devenir claires. De plus, la situation sur laquelle s’arrêteront les agressions influencera beaucoup leur cours. Par ailleurs, le soutien qu’obtiendra l’Autorité palestinienne au cours du sommet économique de Koweït et la faiblesse des répercussions de la réunion de Doha y joueront un rôle.

Il est clair que les répercussions de la guerre israélienne contre Gaza renforceront l’orientation pragmatique au sein des rangs du Hamas. C’est ainsi qu’il sera possible,  ultérieurement, de prendre des mesures sur les frontières égypto-palestino-israéliennes pour empêcher le lancement de roquettes contre Israël. Ceci pourra aussi pousser le Hamas à entreprendre davantage d’actions politiques aux dépens de l’orientation armée, à accepter les règles du jeu politique dans la bande d’abord puis en ce qui concerne la cause palestinienne. On s’attend à ce que la nouvelle Administration américaine renforce ces orientations en ouvrant des voies de contact indirectes avec le Hamas et en encourageant le mouvement à s’engager dans la vie politique et à abandonner même si momentanément l’action militaire.

http://hebdo.ahram.org.eg/arab/ahram/2009/1/21/opin4.htm

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