FREE PALESTINE
22 décembre 2008

Violences de colons sous le couvert de la Loi

Violences de colons sous le couvert de la Loi

Akiva Eldar

Haaretz, 8 décembre 2008

www.haaretz.co.il/hasite/spages/1045630.html

Version anglaise (partielle) : Israeli legal system going soft on settlers

www.haaretz.com/hasen/spages/1045655.html

Tant du côté du Procureur de l’Etat que du côté des organisations pour les droits de l’homme, on n’a pas été surpris, hier, par la décision de la juge Malka Aviv de libérer le colon d’Hébron, Ze’ev Braude, soupçonné d’avoir ouvert le feu sur des Palestiniens après l’évacuation de la « maison de la discorde ». Il suffit de parcourir le site Internet des tribunaux pour trouver, dans le curriculum vitae de la juge en question, qu’elle est elle-même colon de longue date ; Malka Aviv compte parmi les premiers installés dans le moshav de Gitit, dans la vallée du Jourdain, créé en 1975 par les « Colonies agricoles du Bétar ». En 41 ans d’occupation, des colons et des gens dévoués à la cause de la colonisation juive en Cisjordanie se sont intégrés au sommet de l’armée, ont fait leur place à des postes clés de l’administration civile et gagné une partie de l’appareil judiciaire.

La manière amicale dont le juge Moshe Drori a traité le colon Noam Federman, il y a une semaine, n’était pas non plus exceptionnelle. En dépit du fait que ce colon plein de ressources avait pénétré sur un terrain déclaré « zone de sécurité spéciale », violant une ordonnance du commandant et un engagement donné par le chef du conseil, le juge Moshe Drori avait réprimandé l’Etat pour avoir osé enlever Federman de chez lui, sans prendre soin de frapper à la porte. Le même esprit d’indulgence a régné sur la justice de paix de Jérusalem lorsqu’a été fixée à quatre mois de travaux d’intérêt général, six mois de prison avec sursis et une amende de 300 shekels, la peine de Yifat Elkobi, condamnée pour avoir lancé des pierres contre la maison d’un Palestinien d’Hébron et avoir cassé les vitres de la maison. Yifat Elkobi, rendue célèbre pour avoir produit cette perle de « sharmouta » [salope] à l’adresse d’une voisine palestinienne, a bénéficié de la clémence du tribunal, malgré le fait qu’elle a réussi à cumuler trois condamnations pour rébellion et agression d’un policier. La juge de paix de Kfar Saba, Navah Bechor, a renvoyé chez lui Avri Ran, un colon qui s’était fait une réputation d’être la terreur des Palestiniens et avait même été déclaré criminel en fuite. Bien que Ran ait reconnu plusieurs points de l’acte d’accusation, la juge a décrété que les témoignages des victimes palestiniennes étaient « exagérées et non crédibles ». Deux autres accusés, impliqués dans des échauffourées, ont eux aussi été acquittés. Navah Bechor a également fait libérer Zvia Shariel, une jeune fille d’Alon Moreh, qui était accusée de l’agression d’un Palestinien et qui refusait de reconnaître la compétence du tribunal israélien à juger de son affaire.

Il n’y a bien sûr pas moyen de prouver qu’un juge a prononcé des verdicts cléments assortis de peines légères contre des colons en raison de sa sympathie pour l’entreprise de colonisation. Néanmoins, il y a trop des doigts des deux mains pour compter les condamnations dans les deux tribunaux de justice de paix qui ont à juger des délits commis par des Israéliens à l’encontre de Palestiniens : la justice de paix de Jérusalem et celle de Kfar Saba. L’organisation « Yesh Din » a fait le constat qu’en trois ans, de septembre 2002 à septembre 2005, le tribunal de Kfar Saba avait eu à se prononcer dans 392 dossiers contre des Israéliens ayant commis des actes criminels sur le territoire de Samarie. Une majorité des dossiers (257) s’achevaient par une condamnation. Seuls 11 actes d’accusation traitaient d’atteinte à des Palestiniens, dont sept se concluaient par un acquittement. Le phénomène n’est pas neuf. Il suffit de rappeler les peines ridiculement légères prononcées contre des colons connus comme le rabbin Lewinger et Pinhas Walerstein, condamnés pour l’assassinats de Palestiniens.

Il y a exactement 15 ans, quelques semaines après la signature de l’accord d’Oslo, quand Yitzhak Rabin s’est rendu en visite à Hébron, le colonel Meir Klipi qui commandait du secteur (et qui est aujourd’hui le secrétaire militaire du Premier ministre) lui avait dit : « Ce qui me préoccupe par-dessus tout, c’est l’appareil judiciaire… Nous arrêtons un Juif, il passe au tribunal et le juge le relâche… On n’applique pas la loi et quand on n’applique pas la loi, il ne peut y avoir de dissuasion. »

(Traduction de l'hébreu : Michel Ghys)

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