FREE PALESTINE
7 novembre 2008

A propos du boycott des produits israéliens

Article paru dans Points Critiques. Le Mensuel n° 235 (avril 2003)

A propos du boycott des produits israéliens

Ce sujet a été abordé lors de la dernière assemblée générale des membres de l’UPJB[1]. La discussion a débouché sur la décision suivante : l’UPJB continuera à prôner le boycott des produits estampillés « made in Israël » qui sont produits dans les colonies des territoires occupés mais n’appellera pas au boycott général des produits israéliens ; sans pour autant condamner la campagne de boycott actuellement en cours.

Je faisais partie d’une minorité de membres qui auraient souhaité que l’UPJB s’associe publiquement et activement à cette campagne. Je voudrais ici justifier ce point de vue.

L’occupation militaire de la Cisjordanie, de la bande de Gaza et du plateau du Golan dure depuis près de 36 ans. La colonisation juive de ces territoires a été continue durant toute cette période et n’a cessé de s’accélérer. Son corollaire a été la détérioration chaque jour un peu plus importante des conditions de vie des habitants arabes de ces territoires dont la liberté de circulation s’est sans cesse trouvée restreinte. Ce qui a engendré leur appauvrissement dramatique. Aujourd’hui, la vie des Palestiniens de ces territoires est un enfer quotidien bien connu des lecteurs de Points Critiques. Quant aux exilés palestiniens, ils attendent depuis des dizaines d’années (un grand nombre depuis cinquante-cinq ans) que soit reconnus, et réparés autant que faire se peut, les immenses préjudices qu’ils ont subi du fait de la création puis de l’expansion territoriale de l’Etat juif.    

Les gouvernements israéliens successifs n’ont cessé de violer impunément le droit international et les droits de l’Homme. Ils ont été encouragés dans cette voie par la passivité, voire la complicité, des grandes puissances et de l’O.N.U. 

Les dernières élections israéliennes ont amené au pouvoir le gouvernement le plus droitier de toute l’histoire de l’Etat d’Israël. Pendant qu’il procède à la construction accélérée d’un « mur de la honte », source d’encore plus de misère et d’humiliation, donc de rancœur et de colère, ce gouvernement se rend coupable, quasi chaque jour, sous couvert d’« éliminations ciblées », d’assassinats de civils, de plus en plus nombreux et de destructions de plus en plus massives de bâtiments et d’infrastructures.

En avril 2002, le parlement européen a voté la suspension de l'accord d'association entre Israël et l'Union Européenne, mais les ministres des Quinze et le Conseil de l'Europe refusent encore aujourd’hui d'envisager la moindre sanction. Face à cette scandaleuse inaction, c’est la société civile qui doit se mobiliser.

La gravité des crimes commis sur ordre du gouvernement israélien justifie des actions citoyennes résolues.

Le boycott des produits en provenance des colonies ne suffit pas. D’abord parce qu’il est impossible aux consommateurs de différencier les produits provenant des colonies de ceux qui sont vraiment «made in Israël». Ensuite parce que la situation actuelle demande une réponse à la hauteur. N’oublions pas que c’est la majorité des citoyens israéliens qui ont démocratiquement porté au pouvoir, et de manière récurrente, des parlements et des gouvernements qui ont mené dans le passé et qui mènent plus que jamais une politique éminemment condamnable. C’est pourquoi il m’apparaît légitime d’adresser un signal sans ambiguïté à toute la société israélienne et non aux seuls colons.

Au-delà de son efficacité économique, probablement assez limitée, le boycott constitue un message politique à forte charge symbolique. C’est une action tout à fait légale et pacifique, qui offre l’avantage de pouvoir être menée par chaque citoyen individuellement. Une campagne argumentée prônant ce type de boycott incite chacun à la réflexion. J’ai personnellement pu en faire l’expérience en participant, en rue, à une action de promotion du boycott des produits israéliens, organisée par Oxfam. En distribuant des dépliants expliquant le sens de cet appel aux passants, j’ai pu constater à quel point des personnes, qui ne s’étaient jusque là pas senties concernées par le drame du Proche-Orient, se mettaient à poser des questions, à se poser des questions. L’incitation du public à ne pas acheter des produits israéliens tant que l’Etat d’Israël persistera dans le non-respect de la légalité internationale, accompagnée d’une explication bien faite, a d’indéniables vertus pédagogiques et mobilisatrices.

J’écris ces lignes le 20 mars, jour du début de l’agression armée anglo-américaine contre l’Irak. Il est évident que cet événement va encore renforcer le sentiment de profonde injustice ressenti à travers le monde face à l’impunité absolue dont jouit l’Etat d’Israël. Le préjugé antisémite, puissamment ancré dans toutes les couches de la population (et pas seulement - comme on le croit souvent – au sein des populations de culture arabe ou musulmane), selon lequel « les Juifs dominent le monde » va, une fois de plus, se trouver renforcé … et susciter des manifestations agressives à l’égard des Juifs. 

Contrairement à de trop nombreuses autres associations juives, l’UPJB refuse le repli identitaire. Les valeurs qui commandent ses engagements politiques sont celles de la gauche démocratique : défense inconditionnelle des droits de l’Homme, promotion de l’égalité, de la solidarité et du respect mutuel entre les êtres humains et entre les peuples et communautés culturelles. Notre association s’honorerait à mes yeux si, conformément aux valeurs qu’elle défend et au vu de la gravité des crimes commis par les dirigeants politiques et l’armée israélienne, refusant le « deux poids, deux mesures », elle se joignait publiquement à la campagne de boycott des produits israéliens.   

                                                                                                Michel Staszewski

[1] Union des Progressistes Juifs de Belgique.


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