FREE PALESTINE
3 novembre 2008

Une troisième Intifada palestinienne en gestation

Une troisième Intifada palestinienne en gestation
Par Ramzy Baroud
Ramzy Baroud est écrivain et rédacteur en chef du PalestineChronicle.com. Ses travaux ont été publiés dans de nombreux journaux et revues du monde entier. Son dernier livre est intitulé the Second Palestinian Intifada: A Chronicle of a People's Struggle (Pluto Press, London).

Les soulèvements palestiniens sont souvent une réponse collective à des questions difficiles. Les chances sont que la prochaine Intifada – puisqu’il y en aura sûrement toujours une aussi longtemps que l'occupation durera – trouvera encore un rejet populaire des maux qui ont affligé la cause palestinienne.
Elle réaffirmera une fois de plus la pertinence, si ce n'est du premier rôle des Palestiniens en tant que véritables propriétaires de leur destin et gardiens de leur propre lutte.


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Les soulèvements palestiniens sont souvent une réponse collective à des questions difficiles

Source : http://palestinechronicle.com/


Lors d'une récente conférence, j’ai été interrogé à plusieurs reprises sur les perspectives d’un troisième soulèvement palestinien, ou Intifada. La question, bien que simple en apparence, est à la fois insidieuse et importante et on ne peut pas y répondre en deux minutes.

Une «troisième Intifada» impliquerait que la deuxième soit déjà terminée. Mais l’est-elle? Ou a-t’elle tout simplement perdu son ampleur, son sens d'orientation et de direction, ou a-t’elle gaspillé son énergie – en tant que soulèvement populaire - dans les conflits entre factions et les divisions internes?

Certains de ses premiers dirigeants ne sont plus impliqués, et un soulèvement unificateur ne peut pas exister si un trop grand nombre de ses acteurs ont changé de camp, changé de rôle, ou sont absents. Pour aborder ce sujet plus pratiquement, la première Intifada de 1987 doit être soigneusement examinée.

Les révoltes collectives palestiniennes ne sont pas une réponse aux problèmes singuliers causés par des étrangers, par exemple le Mandat Britannique, les projets coloniaux sionistes, l'occupation israélienne, et ainsi de suite. Ce qui est souvent oublié, ce sont les facteurs internes qui provoquent la colère des masses palestiniennes, tels que les échecs de leurs dirigeants, les divisions, les voltefaces, la corruption, le népotisme, et ainsi de suite.

Le soulèvement de 1987 concordait avec ce modèle, mais il a certainement inspiré un changement radical. D'une part, il s'agissait d'un cri collectif pour la justice et une tentative sincère de mettre fin à une occupation israélienne des terres palestiniennes occupées en 1967. Mais il représentait aussi le désir instinctif de reprendre la lutte palestinienne, qui avait été longtemps gérée depuis l'étranger: en Jordanie, au Liban, puis, plus ou moins, en Tunisie.

Il y avait une large prise de conscience parmi ls Palestiniens des territoires occupés que leur sort s'était transformé en luttes de pouvoir entre différentes factions dans plusieurs capitales arabes, et que leurs différends n’étaient guère idéologiques, mais plus liés aux questions de contrôle, d'argent et de statut.

Le premier soulèvement a rapidement formulé ses propres idées, mécanismes et symboles, reflétant tous l'unité de l’objectif parmi les Palestiniens. En fait, l'accent manifeste sur "l'unité nationale» dans les symboles et les slogans de l'Intifada était un signe clair de la dénonciation des Palestiniens de la désunion et de l’esprit de discorde.

Bien que la réponse israélienne à la première Intifada ait été mortelle, elle n’est pas comparable à la réaction bien plus violente au deuxième soulèvement de 2000. Le gouvernement israélien a voulu écraser la révolte avant qu'elle ne se développe et se transforme en un engagement populaire à long-terme.
Israël a également agi en se basant sur l'hypothèse erronée que l'insurrection avait été fabriquée par le défunt leader de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP), Yasser Arafat, pour obtenir des concessions politiques.

Le fait est qu’Israël et l'Autorité Palestinienne (AP) - réunis suite aux Accords d'Oslo de 1993 comme une alternative à l'OLP - ont été pris par surprise lorsque les Palestiniens sont descendus dans la rue, non seulement contre l'occupation israélienne, mais également contre les attitudes défaillantes et la corruption effrénée qui étaient omniprésentes chez leurs propres dirigeants.

Si nous devons accepter que la deuxième Intifada est terminée, ou a pris fin avec les différends internes entre le Fatah et le Hamas, alors un examen de ses résultats est nécessaire.
Bien que la deuxième Intifada n’ait pas mis un terme à l'occupation israélienne, elle a certainement eu un sérieux impact sur les institutions politiques en Palestine. Elle a donné lieu à une autre direction, celle du Hamas, et a forcé le mouvement dirigeant d’autrefois, le Fatah, à repenser entièrement sa stratégie.

Le deuxième soulèvement a fortement ébranlé l'Autorité Palestinienne, et donc les accords d'Oslo qui lui avait donnée vie, en soulignant la nécessité de trouver d'autres - et véritablement représentatives - institutions politiques, comme une nouvelle version de l'OLP.

En effet, chaque grande révolte palestinienne a, dans le passé, abouti à de nouvelles réalités imprévisibles, et malgré toutes les tentatives, le statu quo qui définissait les périodes d’avant la révolte était souvent insignifiant après. De nouveaux visages, de nouveaux noms, de nouvelles priorités, slogans et symboles sont souvent introduits dans la combinaison, bien que toujours définis par un éternel désir de justice, de paix et de liberté.

Les méthodes d’Israël pour soumettre les Palestiniens et écraser les soulèvements ont également produit des nouvelles réalités, limites et relations. Des méthodes telles que d'énormes murs, de nouvelles colonies de peuplement et des armes de répression massive ont souvent compliqué l'existence déjà pénible des Palestiniens vivant sous occupation et ont engendré de nouvelles révoltes.

La première Intifada a porté la lutte à domicile, et a présenté des dirigeants locaux, qui ont concouru avec la vieille garde sur tous les fronts, y compris sur le droit de définir les exigences et les aspirations des Palestiniens.

La deuxième Intifada a considéré l'accord d'Oslo et sa "culture de la paix» comme un processus sans valeur qui a échoué à améliorer la terrible réalité sur le terrain - bien qu'il ait réussi à donner les moyens de s’assumer financièrement et politiquement à une catégorie spécifique de Palestiniens.

Maintenant, les Palestiniens se trouvent dans une période de transition qui a une issue incertaine. Il y a plus de questions que de réponses :

Où mènera la confrontation entre le Fatah et le Hamas? Le Fatah continuera-t’il tout en maintenant sa structure actuelle? Pour combien de temps?

Est-ce que les Palestiniens continueront à adhérer à la demande autrefois incontestée d’une solution à deux États?

Et comment cette formule est-elle crédible dans les circonstances actuelles où une claire séparation est compliquée, si ce n’est totalement irréalisable?

Que deviendra la division géopolitique entre la Cisjordanie et la bande de Gaza dans les années à venir?

Les soulèvements palestiniens sont souvent une réponse collective à des questions difficiles. Les chances sont que la prochaine Intifada – puisqu’il y en aura sûrement toujours une aussi longtemps que l'occupation durera – trouvera encore un rejet populaire des maux qui ont affligé la cause palestinienne.
Elle réaffirmera une fois de plus la pertinence, si ce n'est du premier rôle des Palestiniens en tant que véritables propriétaires de leur destin et gardiens de leur propre lutte.

Traduction : MG pour ISM

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