FREE PALESTINE
19 septembre 2008

Portrait de Tzipi Livni

JERUSALEM |

Portrait de Tzipi Livni, chargée de former le nouveau gouvernement.

Dans six semaines, l’Etat hébreu aura peut-être une nouvelle femme aux commandes.

© | Tzipi Livni est née dans une famille de sionistes actifs dans le mouvement clandestin Irgoun. Garçon manqué durant son enfance, elle a gradé à l’armée et a été en poste à Paris au sein du Mossad. On la dit intraitable sur les frontières, le statut de Jérusalem et les réfugiés palestiniens.

ANDRÉS ALLEMAND | 19.09.2008 | 00:16

Le compte à rebours est lancé. Elue de justesse mercredi soir à la tête de Kadima, Tzipi Livni dispose de quarante petits jours pour réunir une coalition de partis disposés à soutenir son accession au poste de premier ministre. Si elle y parvient, elle sera la première femme à prendre les commandes en Israël depuis le mandat de la célèbre Golda Meir (1969-1974). Mais l’actuelle ministre des Affaires étrangères a-t-elle la trempe de la dame de fer? Ses mâles détracteurs la jugent inexpérimentée, indécise, influençable et trop émotive. Ce n’est pas ce que laisse penser son histoire personnelle. Voyez plutôt.

Tzipora Malka Livni est née il y a cinquante ans à Tel-Aviv, dans une famille au sionisme… disons… musclé. Avant la création de l’Etat hébreu, ses parents étaient des membres particulièrement actifs de l’Irgoun, organisation clandestine connue pour avoir perpétré en 1946 l’attentat de l’Hôtel King David qui fit 91 morts. Figure clé de cette milice juive, son père, Eitan, fut condamné à 15 ans de prison pour avoir attaqué une base militaire de la Palestine britannique. Quant à sa mère, Sarah, elle a récemment raconté à la presse son coup d’éclat: «Déguisée en femme enceinte, j’ai dévalisé un train qui transportait 35 000 livres sterling!»

Agent antiterroriste à Paris

Bref, Tzipi a de qui tenir. On ne s’étonnera donc pas d’apprendre qu’elle était un garçon manqué. Pas plus qu’on ne sera surpris d’entendre qu’elle fut lieutenant à l’armée. Et, finalement, on trouvera presque normal son recrutement par le Mossad en 1980. Mais de ses quatre ans d’activité au sein du service de renseignement extérieur israélien, on ne saura quasi rien. Il semble confirmé qu’elle fut en poste à Paris.

Le secret, c’est bien connu, entretient la légende. Ainsi, on prête à l’agent Tzipi Livni un rôle au moins indirect dans l’élimination de terroristes palestiniens dans diverses capitales européennes. C’est évidemment invérifiable.

En 1983, changement de cap: Tzipi Livni quitte le Mossad, fonde un foyer, finit son droit et lance une étude d’avocats. Epouse du publiciste Naftali Spitzer, elle a deux fils: Omri et Yuval. Ses affaires sont florissantes. Mais la dame ne tient pas en place. Bientôt, elle entre en politique. Surtout, il y a neuf ans, elle est élue au parlement sur la liste du grand parti de la droite israélienne: le Likoud.

Sous l’aile de Sharon

Son ascension est fulgurante, grâce à son mentor de choc: Ariel Sharon. En 2001, à la tête du gouvernement, il la nomme ministre du Développement. Elle sera ensuite en charge de l’Immigration, du Logement, de la Justice,, puis de la Diplomatie. Un poste qu’elle occupe depuis deux ans. A ce titre, elle conduit les négociations avec les Palestiniens depuis le sommet d’Annapolis en novembre 2007. Etonnant pour une politicienne qui jadis militait en faveur du Grand Israël!

C’est que la dame a fait du chemin, suivant les pas d’Ariel Sharon, qui a décidé en 2005 le retrait israélien de la bande de Gaza. Tandis que les camarades de parti traitaient le premier ministre de «traître», elle n’a pas hésité à quitter le Likoud pour rejoindre Kadima, la nouvelle formation de son mentor. Il y a deux ans, elle confiait: «Je crois, comme mes parents, que le peuple juif a droit à toute la terre d’Israël. Mais on m’a aussi appris à veiller à la pérennité de notre pays et à protéger les valeurs démocratiques. S’il faut choisir entre mes rêves et la démocratie, je préfère renoncer à une partie du territoire.» N’empêche, elle est intraitable sur les frontières, le statut de Jérusalem et les réfugiés.

Mais si Tzipi Livni est populaire, c’est moins pour son évolution que pour son image de «Madame Propre». Les derniers chefs du gouvernement ont été entachés par des affaires de corruption. Bref, de cette dame de fer, les Israéliens attendent surtout qu’elle fasse le ménage.

Commentaire: l’éternel casse-tête israélien

On perçoit comme un souffle d’espoir depuis que Tzipi Livni a été désignée à la tête de Kadima. En Israël, on se prend à attendre davantage de probité au gouvernement. A l’étranger, on veut croire que la paix ne serait plus impossible avec l’arrivée au pouvoir de cette amie personnelle de l’Américaine Condoleezza Rice.

Mais rien n’est joué. Et surtout pas la formation d’une coalition autour de sa personne. Car en Israël, aucun parti n’est assez fort pour gouverner seul. Il faut multiplier les alliances de part et d’autre de l’échiquier politique. Celui qui «prend les commandes» fait le grand écart pour ne mécontenter personne. Difficile dans ces conditions de prendre des décisions radicales. Depuis 1992, aucun premier ministre n’est parvenu jusqu’au terme de son mandat. La malédiction des élections anticipées n’en finit pas de frapper la démocratie israélienne.

C’est d’autant plus vrai pour Tzipi Livni, qui a maintenant le couteau sous la gorge. Si elle ne trouve pas de coalition, des élections anticipées seront convoquées. Or elle vient de prendre la tête d’un parti divisé, dont on ne sait pas très bien comment il survivrait à des législatives.

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