FREE PALESTINE
11 septembre 2008

Conférence de Haïfa

Conférence de Haïfa

pour le droit au retour et l’État laïque démocratique en Palestine.

publié le samedi 6 septembre 2008.

Rapport initial par Yoav Bar (*) http://www.ror1state.org/drupal/ ?q=en/node/93

En matière d’excuses Les vendredis 20 et samedis 21 juin 2008 – après un an où nous avons rêvé et travaillé pour que cela ait lieu – la conférence de Haïfa a été un tel succès que nous avons peine à croire qu’elle fut réelle… Mais le samedi soir, sur les cinq minutes de route entre el-Midan vers Hallisa, un quartier pauvre à l’est de Haïfa, majoritairement arabe, l’État raciste et non-démocratique d’Israël était là, clairement et vigoureusement – les rues se remplirent de police et d’unités spéciales « anti-émeutes », arrêtant les gens et les battant au hasard. Nous avons passé la semaine suivante à réunir les faits et à organiser une manifestation contre la violence policière… Tous ceux d’entre vous qui avez cherché à suivre les préparatifs de la conférence, ou qui vous préoccupez de voir les résultats, ont peut-être été frustrés par la réalisation chaotique du comité d’organisation. D’autres nous ont critiqué pour avoir détourné l’effort de la lutte urgente contre l’occupation vers des rêveries chimériques d’un lointain futur… Une chose particulière de la conférence de Haïfa, c’est qu’elle a été conçue et organisée par des militants politiques de base, au milieu d’une intense période de lutte, sans budget. Ce fut notre moment pour relever la tête de l’épuisante lutte quotidienne et pour promettre à nous-mêmes et au monde que la souffrance du peuple palestinien peut-être stoppée et qu’il peut y avoir un futur brillant pour tous en Palestine après que nous nous soyons débarrassés du désordre raciste sioniste.

Qui était la ? Rencontre des jeunes Rassemblement de militants politiques travaillant pour le futur, nous avons commencé par la jeunesse. La prolifération de mouvements de jeunesse indépendants palestiniens dans les territoires de 48 est une preuve que la nouvelle génération n’est pas satisfaite des offres politiques traditionnelles. Au théâtre Midan, le 20 juin à 17 heures, la conférence a débuté avec des rencontres de jeunes – pas des discours aux jeunes mais des militants de différents mouvements de jeunesse discutant entre eux de leur vision du futur. Il y eut deux sessions parallèles, une pour les collégiens et l’autre pour les « Shabab », étudiants à l’université et jeunes travailleurs, en majorité dans la vingtaine.

La session inaugurale Lors de la session inaugurale, la salle de 300 sièges du théâtre Midan était presque pleine. Il y avait plusieurs équipes de télévisions arabes, y compris Al Jazeera, interviewant les leaders politiques, et des journalistes des journaux locaux arabes. Plusieurs drapeaux palestiniens étaient à la tribune, de même qu’un panneau en arabe, hébreu et anglais déclarant : « Conférence de l’Haïfa pour le droit au retour et l’État laïque démocratique en Palestine ». Sahar Abdo, le présentateur, appela Hanan Wakeem à chanter “Mawteni” (ma patrie), et le public se leva pendant le chant et observa une minute de silence pour les martyrs. Rajaa Zo’abi ‘Omari adressa la bienvenue au public au nom du comité organisateur, et présenta les idées maîtresses de la conférence. La partie principale de la cérémonie d’ouverture a inclut des discours politiques par les secrétaires généraux de trois partis des territoires de 48 : Ayman ‘Odeh du front démocratique pour la paix et l’égalité (Hadash – un front qui inclut le parti communiste), Awad Abed El-Fatah de l’alliance nationale démocratique (BALAD) et Muhammad Kana’ane d’Abnaa el-Balad, le mouvement à l’origine de la coalition qui a formé le comité d’organisation.

L’apparition de Muhammad Kana’ane fut très significative parce qu’en mai 2008 il fut libéré de quatre ans et demi dans les prisons israéliennes, après une condamnation pour des rencontres avec des militants Palestiniens en Jordanie. Dans la deuxième partie de la session inaugurale, il y eut trois discours en hébreu : Yehuda Kupferman du « comité pour un État laïque et démocratique sur toute la Palestine”, le Dr Uri Davis « du mouvement contre l’apartheid israélien en Palestine » – tous deux du comité d’organisation, et le Dr Anat Matar, un militant actif dans le soutien pour les droits des prisonniers Palestiniens et pour le droit des jeunes Israéliens de refuser de servir dans l’armée. Il y eut aussi des félicitations écrites pour la conférence, surtout venant de militants des territoires occupés en 67 et de la diaspora palestinienne aux idées proches, qui ne pouvaient pas venir. La participation la plus significative est venu du secrétaire général du Front populaire pour la libération de la Palestine, le camarade Ahmad Sa’adat, de la prison de Nafha dans le désert du Naqab.

Qui n’était pas là ? Le professeur Bhim Singh du Cachemire, qui devait représenter la délégation internationale à la session d’ouverture n’a pas pu obtenir un visa de l’ambassade d’Israël en Inde. Un groupe d’universitaires Palestiniens (avec des passeports étrangers) de l’université de BirZeit était dans le bus entre Jérusalem et Haïfa pour prendre part à la conférence, quand le bus fut intercepté à mi-chemin à Kfar Saba par les forces de sécurité israélienne. Ils furent détenus pendant plusieurs heures et forcées de repartir à Jérusalem. Le Mouvement Islamique fut invité à prendre part à la conférence, comme partenaire dans la lutte contre l’oppression israélienne, en accord avec la croyance des organisateurs que l’État laïque démocratique est un cadre pour la défense des droits de tous et pour assurer le plein respect de toutes les religions. Ils ne rejetèrent pas officiellement l’invitation et la tâche de construire une coopération avec eux est laissée au comité de suivi qui a été formé pendant la conférence.

Un samedi d’ateliers. La véritable attraction de la conférence fut le programme d’ateliers, trois ateliers en parallèle dans chacune des trois sessions. Dans les neuf ateliers, il y eut 41 contributeurs enregistrés, en plus des animateurs, tous des militants et intellectuels actifs. La liste de noms des participants, plus de 50, sur le papier d’invitation, a constitué une base de soutien pour la conférence, et ce fut au probablement la raison principale pour laquelle, alors que nous nous attendions au départ à une participation réduite pour la seconde journée de longues discussions, nous arrivâmes samedi matin pour trouver les abords de el-Midan pleins d’une atmosphère festive, avec de nombreux militants Palestiniens de différents mouvements politiques, de partis et de nombreuses organisations de la société civile. Il y avait aussi une présence très significative de militants Juifs, probablement la plus vaste participation de tous les temps à un événement politique palestinien (sauf, bien sûr, les grandes manifestations, où tout le monde vient mais il n’y a pas beaucoup d’interactions). Il y avait aussi une présence significative de mouvements internationaux de solidarité – la plupart, des jeunes militants volontaires dans différents programmes de soutien au peuple palestinien qui sont venus le week-end à Haïfa pour soutenir la conférence. En tout, de 300 à 400 personnes prirent part aux différents ateliers du samedi, avec une discussion animée sur beaucoup d’aspects du problème, de la lutte et de la solution. L’atmosphère enthousiaste créa les conditions de la discussion très sérieuse qui a caractérisé les ateliers. Les participants firent de leur mieux pour clarifier leurs positions, et l’audience prit une part active à la discussion. De nombreuses approches furent proposées, mais ceci ne fit que contribuer à la confiance que nous pouvons faire des choses importantes ensemble.

Que s’est-il passé à la conférence ?

Détails du compte-rendu. Je n’ose pas tenter de donner ici une brève description du contenu de quelque 20 heures de discussions dans les ateliers et les sessions plénières. Près de la moitié a été filmée et devrait être bientôt mise en ligne. Nous avons aussi demandé à tous les participants d’écrire leur contribution, et une partie est déjà sur le site de la conférence : www.ror1state.org Il y a aussi des contributions écrites de nombreux auteurs qui n’ont pas pu venir à la conférence. La liste complète des participants est sur l’invitation, et est visible sur le site Web. Introduire chacun d’entre eux et écrire un peu sur leurs expériences de lutte, leurs écrits et autres réalisations demanderait un gros livre – seul Internet peut apporter les réponses pratiques à cette question.

Festival populaire palestinien Certains des auteurs les plus capables qui participaient à la conférence promirent d’écrire des articles spéciaux sur l’atmosphère à el Midan, avant de traiter du contenu politique et social de la conférence. Tout ceci fut organisé selon le principe d’un festival populaire palestinien – en compensant l’absence de budget par les efforts de dizaines de militants, comme la famille pendant un mariage, qui court partout prendre soin des invités. Des dizaines de participants extérieurs à la zone furent invitées à être les hôtes des militants locaux chez eux ; le déjeuner fut fait de plats traditionnels de mariage faits maison, et après que 220 repas furent servis, une institution de bienfaisance locale reçut le reste ; la traduction simultanée en hébreu et en anglais fut faite par les militants politiques, il fut dans de nombreux cas plus approprié que la traduction mécanique de nombreux professionnels.

Rencontre inter-palestinienne La chose la plus importante de la conférence de Haïfa, c’est sa place au sein de l’éveil palestinien vers une nouvelle vision qui proposera des alternatives à l’impasse du processus de paix bidon menée par les impérialistes. Le problème, la lutte et la solution sont toutes communs à toutes les parties du peuple palestinien, comme on le vit au cours de la conférence. Ceci fut souligné pendant l’atelier sur le nettoyage ethnique exposant comment celui-ci est pratiqué par le sionisme depuis avant 1948 jusqu’à aujourd’hui, dans les territoires occupés en 1948 aussi bien qu’à Gaza, en Cisjordanie et dans le Golan syrien. Ceci a été clair dans la focalisation sur le droit au retour de tous les réfugiés palestiniens vers toutes les zones où ils ont été expulsés. Même si peu de Palestiniens des territoires occupés en 1967, la plupart de Jérusalem, purent revenir à Haïfa, la conférence faisait partie d’un mouvement plus large : Ajras el-Awda, une des composantes du comité d’organisation, est un réseau trans-Palestinien. Ajras a publié un magazine spécial pour l’occasion et il l’a distribué dans les camps de réfugiés palestiniens en Syrie. Des réunions spéciales ont lieu maintenant à Ramallah pour pourvoir les mêmes idées, et à Haïfa nous avons écouté la participation écrite de Ahmad Katamesh de Ramallah présentant sa vision vers le futur État démocratique de Palestine. Salame Kelly, un dirigeant militant Palestinien et marxiste arabe de Syrie, envoya la vidéo d’un discours qui devait faire partie de la cérémonie d’ouverture (mais des problèmes techniques nous empêchèrent de la montrer).

Les Palestiniens dans les territoires de 1948 Pendant longtemps, les Palestiniens des territoires passés sous contrôle israélien en 1948 furent une société écrasée, léchant les plaies de la Nakba de 1948 qui a inclus de nombreux massacres et le nettoyage ethnique de la majorité de la population. Certains ont essayé de poursuivre une lutte pour l’égalité des droits dans le contexte israélien au-dehors d’une perspective nationale palestinienne, mais ils furent toujours frustrés par le racisme systématique sioniste, qui définit le but de l’État comme servant la « nation juive internationale ». Dans les années 90 du siècle dernier, certains ont essayé de présenter une perspective de redéfinition d’Israël comme un État de tous ses citoyens. La conférence de l’Haïfa a été une opportunité d’examiner dans une perspective historique tous ces échecs à réformer le système raciste, et a proposé une solution à la souffrance de l’Apartheid israélien dans le contexte d’une solution globale au problème palestinien. Il a été clair d’après la liste des participants que la discussion sur un État laïque démocratique en Palestine n’est pas confinée à Abnaa el-Balad, qui a toujours promu cette solution, ni aux cercles proches de lui. Salman Natur et Hisham Naffa de Hadash, ainsi que le Dr. Mahmoud Muhareb et Yael Lerer de Balad ne sont que quelques-uns des avocats les plus connus de la solution en un État. Mais aussi, les discours des secrétaires généraux de Hadash et de Balad à la cérémonie d’ouverture ont révélé beaucoup d’états d’âme et de conflits internes par rapport à cette perspective. Il ne faudrait pas aller très loin pour conclure qu’il y a une majorité de Palestiniens à l’intérieur des territoires de 1948 qui préfèrent l’État laïque démocratique, la principale réserve est sur le côté pratique de proposer ce slogan à l’étape actuelle, mais il ne reste pas beaucoup d’illusions sur une quelconque solution pratique au problème palestinien tant que les Etats-Unis et Israël mènent la barque. La présence massive de militants de la société civile palestinienne à la conférence est un autre signe de la maturité de la confrontation de la société avec les dures conditions de l’apartheid israélien. Alors qu’il y a toute une classe de gens qui dédient leur vie à prendre soin des besoins quotidiens du peuple, de l’éducation à la santé, aux droits des travailleurs, aux droits des femmes, au développement économique et social, culturel et bien plus, presque personne n’espère des solutions à ces problèmes hors du cadre d’un changement politique. Nous n’attendions pas des O.N.G. locales qu’elles prennent une position politique claire, et tous les participants présentaient leur vues personnelles sous leur propre responsabilité. Ameer Makhoul d’Ittijah, l’Union des associations communautaires palestiniennes – une organisation parapluie pour les O.N.G. palestiniennes – a fait partie du comité d’organisation dès le début, et nous avons eu la participation de nombreuses personnalités dirigeantes d’O.N.G. couvrant la plupart des domaines de la vie publique. Participation juive Les nombres ne sont pas la seule mesure, et nous n’avons pas encore traité les feuilles d’inscription, mais la participation de militants juifs à la conférence était bien évidente. Elle a couvert tout un spectre depuis les prisonniers palestiniens libérés, en passant par différentes tendances de la gauche traditionnelle, féministes, militants juifs orientaux (juifs arabes), anarchistes, militants anti-guerre, universitaires, militants religieux pour la paix, démocrates, éclectiques et bien d’autres… Mais le point le plus significatif n’a pas été leur présence mais la façon dont ils furent une partie intégrale de toute la conférence, pas comme une entité séparée cherchant à négocier à se mettre d’accord avec une entité palestinienne séparée, mais comme un rassemblement commun imaginant un futur en commun et le moyen d’y parvenir. La déclaration finale Quand nous sommes arrivés à la conclusion plénière, nous étions non seulement fatigués et bien en retard sur l’horaire, mais il était aussi clair que les apports de la conférence étaient trop nombreux et trop importants pour tenter de conclure en une heure de discussions. Le comité d’organisation a décidé de présenter aux participants le projet de déclaration sur lequel nous étions d’accord après une longue discussion interne, un texte nommé « La Déclaration de Jaffa » en hommage à la ville où le comité d’organisation se réunissait quand il discutait du document pendant les premiers mois de l’année.

La déclaration de Jaffa

« L’établissement de l’État laïque démocratique sur toute la Palestine est la solution positive qui accomplira la justice et mettra fin à la lutte sur la terre palestinienne car il :
- Préserve l’unité du peuple palestinien et sa connexion historique à la terre palestinienne.
- Réalise les buts de la lutte de libération de tout le peuple palestinien. Le retour des réfugiés, la liberté, l’égalité et le droit à l’autodétermination.
- Débarrasse la présence juive en Palestine de sa nature colonialiste, liée au projet raciste sioniste, outil de l’impérialisme et du capitalisme mondialisé.
- Sera basé sur le principe de séparation de la religion et de l’État, tout en assurant la liberté de pratiques religieuses aux croyants de toutes les religions.
- Assure la pleine égalité des droits de tous les citoyens sans discrimination basée sur la religion, la race, l’ethnicité, le genre, la nationalité, la classe ou toute autre raison. » Et ensuite ? La déclaration fut lue au public et reçut l’approbation générale comme base pour la déclaration finale de la conférence. Plusieurs commentaires importants furent faits par le public, surtout des prises de position additionnelles à ajouter à la déclaration. De nombreux participants ont demandé de se joindre au comité organisateur pour former un comité de suivi qui continuera le travail pour ces objectifs après la conférence. Des centaines de participants se sont inscrits et ont demandé à être informés des étapes suivantes.


(*) le rédacteur est membre du bureau politique de Abnaa el-Balad et a été actif au sein du comité d’organisation de la conférence de Haïfa.

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