FREE PALESTINE
19 mai 2008

Bâti sur le mensonge et la dépossession des Palestiniens

Dans le monde
L'État d'Israël a 60 ans - Bâti sur le mensonge et la dépossession des Palestiniens

Les soixante ans de la création d'Israël ont été l'occasion de nombreuses célébrations dans le pays. Mais dans les Territoires occupés voisins et au sein de la population arabe d'Israël, c'est aujourd'hui l'amertume, l'humiliation si ce n'est la haine qui dominent.

Si Israël s'est construit pour le peuple juif, comme le proclament ses fondateurs, ils oublient cependant de préciser qu'il s'est aussi construit contre un autre peuple. Car Israël ne s'est pas bâti dans un désert, mais sur un territoire où vivait une population nombreuse, les Palestiniens, bien plus nombreux en tout cas que ne l'était la communauté juive quand le gouvernement britannique appuya la revendication de la création en Palestine d'un foyer national juif en 1917.

Et ensuite toute l'histoire de cette petite région du Moyen-Orient a été celle de la dépossession des Palestiniens, une dépossession qui s'est fortement accélérée en 1948 dès lors qu'elle se fit avec les moyens de l'État israélien qui venait de se créer.

Le 14 mai 1948, quand les troupes britanniques se retirèrent de Palestine, le dirigeant sioniste Ben Gourion proclama la naissance d'Israël, court-circuitant le projet de l'ONU qui prévoyait de partager la Palestine en deux États, l'un juif, l'autre palestinien. Il s'en suivit une guerre avec les États arabes voisins qui se termina par la victoire d'Israël. Les frontières du nouvel État furent tracées bien au-delà de ce qui était prévu par le plan de partage. Et surtout, il ne fut plus question d'un État palestinien.

Israël « fait colonial »

Il est maintenant de notoriété publique que dans les mois qui précédèrent la création de l'État d'Israël, et dans ceux qui suivirent, plus de 400 villages arabes furent rayés de la carte, tandis que 700 000 à 800 000 Palestiniens n'eurent d'autre choix que de fuir ou de mourir, chassés ou massacrés par la nouvelle armée israélienne et des groupes paramilitaires.

Contrairement à ce qui se dit encore aujourd'hui, cette politique impitoyable ne fut pas la conséquence d'un appel à l'exode lancé par des dirigeants arabes, mais plutôt l'application des objectifs sionistes visant à créer en Palestine un État spécifique des Juifs, de préférence débarrassé de ses habitants arabes. Dans la logique de cette politique nationaliste, les exactions contre les Palestiniens avaient d'ailleurs commencé bien avant 1948, quand la Palestine était encore sous domination britannique.

Pour créer leurs colonies de peuplement, les sionistes avaient acheté des terres à de grands féodaux arabes et en avaient expulsé les paysans qui y travaillaient. Leurs entreprises avaient interdiction d'employer des Arabes. Ils avaient implanté ainsi une communauté juive complètement coupée des populations qui l'entouraient. Cette politique sépara physiquement les deux peuples, à tel point que même dans les périodes où les masses arabes se soulevèrent contre la puissance coloniale britannique, dans les années 1930, les sionistes se tinrent à l'écart, quand ils ne fournirent pas des troupes pour participer à la répression des révoltes arabes.

Dans ces conditions, tout le discours soi-disant socialiste dont se para un temps la communauté juive et ensuite la société israélienne, avec ses « kibboutz » et autres « mochavs » égalitaires, n'était qu'un vernis. Il n'eut en fait comme fonction que de tromper les émigrants venus d'Europe et dont beaucoup se réclamaient à l'époque du socialisme. Leur prétendu socialisme qui se construisit à l'écart de la population palestinienne - quand ce ne fut pas contre elle - n'était en fait rien d'autre qu'un élément de ce nationalisme.

Cette politique visant à chasser les Palestiniens de leurs terres s'est poursuivie tout au long des soixante ans d'Israël. En 1967, lors de la guerre des Six Jours, qui vit l'annexion de Jérusalem à Israël et l'occupation militaire de Gaza, de la Cisjordanie, du Golan et du Sinaï, 300 000 Palestiniens furent encore chassés des territoires passés sous domination israélienne. Cette politique se poursuit encore aujourd'hui, avec la construction du mur non encore terminé mais qui a déjà annexé 9 % du territoire de la Cisjordanie, et avec l'extension constante des colonies de peuplement juives qui rongent les lambeaux de territoires palestiniens restants.

Et lorsque les gouvernants israéliens décident, peut-être momentanément, de quitter certains territoires comme la bande de Gaza ou quelques enclaves cisjordaniennes, ils en font des prisons à ciel ouvert, sous le contrôle constant de leur armée, qui n'hésite pas à intervenir quand bon lui semble. La situation dans les Territoires est à ce point difficile qu'à Gaza, sur une population de un million et demi d'habitants, plus d'un million ne survivent que grâce à des dons alimentaires qui leur parviennent uniquement quand Israël, les États-Unis ou l'Europe le décident.

Dans le giron de l'impérialisme

Israël est-il la seule démocratie de tout le Proche et le Moyen-Orient, comme aiment à le rappeler ses laudateurs, alors qu'il n'est tel que pour une partie de ses habitants ? Dictatorial envers les Palestiniens, l'État israélien maintient inégalité et mépris envers les Arabes israéliens mais aussi envers la frange la plus pauvre de la société israélienne, souvent issue d'une émigration juive venue de pays arabes, et dont beaucoup vivent aujourd'hui très pauvrement, quand ce n'est pas sous le seuil de pauvreté.

Ce qualificatif « démocratique » aurait déjà mille fois volé en éclats, s'il n'avait été mille fois véhiculé et répété par tous les dirigeants du monde impérialiste, qui n'ont jamais mesuré leur soutien à Israël. La raison de ce soutien n'est pas à rechercher dans un quelconque sentiment de responsabilité à l'égard des millions de Juifs massacrés par la barbarie nazie. De cela, les dirigeants du monde impérialiste ne sont pas capables. Ce qui les motive est le choix fait par les dirigeants israéliens de se comporter comme leur bras armé dans cette région du monde. De toute façon, en choisissant de construire leur État contre les populations arabes de la région, les dirigeants sionistes ne pouvaient que rechercher l'appui des puissances occidentales. Dès la naissance de leur mouvement, ils l'exprimèrent en prétendant représenter « la civilisation contre le désert ».

Toute l'évolution ultérieure de l'État d'Israël était contenue dans ces choix initiaux. En le bâtissant sur un mensonge : « Une terre sans peuple pour un peuple sans terre », ses dirigeants choisissaient d'en faire l'État raciste et théocratique qu'il est aujourd'hui, même s'il fut, dans les premières décennies de son existence, façonné et dirigé par des partis de gauche. Car ce furent tout de même eux, ces prétendus socialistes et laïques, qui les premiers initièrent la colonisation et s'appuyèrent sur la religion pour alimenter le mythe du retour à la terre de la Bible.

Soixante ans après, le visage qu'offre l'État d'Israël est odieux. Et il le restera tant que la population palestinienne n'aura pas reconquis ses droits bafoués. En ce sens, l'avenir des Israéliens reste et restera intimement lié à celui des Palestiniens.


Georges LATTIER

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