FREE PALESTINE
12 septembre 2007

La nouvelle tâche du peuple juif

La nouvelle tâche du peuple juif

Par Avraham Burg

Le 10/09/2007

Haaretz Rosh Hashanah (fête du nouvel an du calendrier hébraïque, ndt) est très différente des autres fêtes juives. Un fil d'universalisme passe à travers et ses prières diffèrent de celles du reste de l'année. Le nationalisme et les mémoires collectives de la nation sont marginaux en ce temps ; son essence principale est orientée vers l'extérieur : « une prière… pour toutes les nations ». C'est le seul jour où nous prions pour le bien-être du monde. Nous chantons « aujourd'hui le monde fut conçu », et nous savons que « chacun dans le monde va passer devant Lui », sans distinction et sans discrimination, car tout le monde est égal devant le Créateur du monde. Comme Adam et Eve qui furent nés libres de religion et de fanatisme.

A travers les ans, à cause des problèmes historiques du peuple juif, l'identité universelle des fêtes est devenue brouillée. Elle était difficile pour nous, les persécutés, de s'élever au niveau de l'occasion [de l'identité universelle de la fête] et d'agir pour le bien du monde qui nous a rejetés si violemment. Le comportement comme « une nation qui vit seule » nous est naturellement revenu et nous avons abandonné la responsabilité universelle du peuple juif qui fut une fois « une nation du monde » et est maintenant devenu par trop « une nation de la terre ».

Les résultats de cette fermeture de l'âme nationale sont très tristes. Pour la première fois dans des millénaires, nous ne sommes pas au premier rang de l'influence dans le monde. Considérons Jésus par exemple. Ces enseignements et valeurs ont jailli du cœur de la période du deuxième temple. Parmi ceux qui ont ensemencé la renaissance européenne il y avait les descendants des juifs marranes (de l'espagnol ‘marrano'. Terme qui veut dire ‘porc' et qui était utilisé pour désigner un juif converti au catholicisme mais resté secrètement fidèle à sa religion, ndt) qui ont rapporté à la maison [l'Europe] la sagesse et les œuvres de la Grèce ancienne qui ont été sauvegardés par les philosophes musulmans tolérants et modérés.

Il est impossible de déchiffrer les codes des temps modernes sans Spinoza ou Moses Mendelssohn. Et que serait le siècle précédent sans Marx et son communisme, d'un côté, ou Freud et l'âme seule, de l'autre ? Cette période a aussi produit Trotski, Zamenhof et d'autres avec leurs rêves.

Tout cela est terminé. Il y a soixante ans, l'Europe a échoué le test de « l'autre ». Elle a eu sa chance, elle a craché et a détruit ses juifs qui sont devenus les derniers lépreux.

Aujourd'hui l'Europe affronte le test du nouvel « autre » - les musulmans. Des dizaines de millions de musulmans vivent en Europe et à l'Occident aujourd'hui, et quand la Turquie rejoint l'Union Européenne, elle aura quelque cent millions musulmans. La question. La question, « qu'est ce qu'on va faire avec eux ? » peut être entendue dans les couloirs du pouvoir à Paris ; elle a influencé les élections en Angleterre ; elle a changé les lois sur la religion et l'état en Suède ; elle est reflétée dans les stéréotypes des héros de Hollywood à Washington. Les racistes de l'Occident demandent aussi, « qu'est ce qu'on va faire avec eux ? » Et quand les foules acclament, ils répondent : Ce que nous avons toujours fait – la guerre, l'exil, la restriction de leurs droits. Mais les israéliens et les juifs ne posent même pas cette question.

Quand l'occident se bat dans l'une de ses plus importantes batailles, sur sa santé et sa rectitude, nous sommes absents, à cause d'un complexe compréhensible. Ils se battent sans nous sur l'écologie du ciel et de la terre – contre le fondamentalisme et l'extrémisme, pour les droits de l'homme, contre la terreur internationale, pour le statut des femmes, contre le voile. Un temps où notre acceptation internationale est plus grande que jamais avant, à un temps où le monde a besoin de notre contribution unique, nous sommes absents comme jamais auparavant. Ceci est le paradoxe juif de notre temps. Notre contact, friction, traumatisme, récupération et interface avec l'Occident moderne ont ouvert quelques portes du Judaïsme contemporain vers des nouvelles ailes et des idées excitantes : la pluralité religieuse, l'égalité de la femme juive. Cependant, de l'autre côté, nous nous cachons et nous nous retranchons, avec une peur compréhensible, derrière nos volets nationaux.

L'avenir du monde, à une grande ampleur, dépend sur la capacité de l'Occident à être fertilisé et imprégné par le nouvel Islam ; d'inclure les musulmans au lieu de les rejeter comme il nous a fait ; et puis ensemble de donner naissance à un nouveau discours mondial. Pas le discours « macho » de George Bush et d'autres fondamentalistes chrétiens, pas celui des colons israéliens et des conservateurs locaux, et pas celui des fanatiques islamiques qui interdisent tout contact avec l'Occident comme si c'était une femme impure.

Ce qui est demandé, c'est un dialogue modéré et soigné, semi-féminin, inclusif et acceptant. Un dialogue de grossesse, « concevant le monde », comme celui qui a permis aux juifs occidentaux contemporains de rompre avec le cycle historique et pathologique des juifs er des gentils, et de présenter un nouveau modèle de vie en opposition à celui de Hitler, ses successeurs et le millier d'années d'effusion de sang qui les avait précédés. Tant que le monde s'ouvre à nous comme jamais auparavant et tant que nous changeons pour le rencontrer, nous pouvons nous débarrasser de nos peurs, renouveler l'originalité de la fête et retourner à la responsabilité envers le monde et son bien-être.

Nous pouvons faire pour promouvoir un monde de ce type – un meilleur, un monde plus parfait qui serait bien moins dangereux pour ses résidents et pour nous ? Selon mon raisonnement, nous devons contribuer à partir de notre expérience comme victimes, comme « autres », et ensuite comme ceux qui sont acceptés, pour éviter le sacrifice inutile des « nouveaux autres » de notre génération. La communauté juive moderne avec ses victimes et des leçons doit se proposer comme un pont sur lequel les musulmans et les chrétiens occidentaux peuvent marcher et avancer pour se rencontrer, créer un dialogue chrétien-musulman et institutionnaliser l'Islam occidental.

L'Occident peut et doit embrasser ces citoyens musulmans et les pousser à se voir, voir leur religion et leurs traditions dans une nouvelle lumière – une lumière d'ouverture, de tolérance et de pluralité religieuse. Beaucoup de musulmans à l'Occident s'opposent à l'extrémisme religieux. Tout le monde n'est pas Oussama Ben Laden, tout comme tout le monde ici n'est pas Meir Kahane, Baruch Goldstein ou George Bush. Des musulmans modérés sont en voie d'être les « juifs », les étrangers du 21e siècle, sans avoir rien fait de mal. Les partenaires de l'échec du 20e siècle, les victimes tout comme ceux qui les ont sacrifiés, doivent se rassembler pour leurs intérêts pour qu'ils puissent passer le test cette fois. Car si l'Europe et les Etats-Unis échouent le test des « citoyens de la foi musulmane », alors la vague de l'échec va inévitablement noyer l'Occident. A l'opposé, le succès pourrait donner à l'Occident combattant une nouvelle naissance sur la voie vers la paix mondiale, dont les partenaires incluraient la majorité des croyants dans « le Dieu unique » pour qui nous prions tous.

http://www.haaretz.com/hasen/spages/902516.html

Mercredi 12 Septembre 2007

Avraham Burg


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