Conversation avec Gilad ATZMON
Conversation avec Gilad ATZMONJe ne me considère pas comme juif. Je me considère comme un Palestinien de langue hébraïque. Ma Patrie, c’est la Palestine
LesOgres.Org, le 22 août 2007
Face à cette interview de Gilad Atzmon - à la pensée OGRES - les défenseurs de l’inadmissible et de l’intolérable : l’Apartheid Géographique, Réligieux, Ethnique et Sociale n’auront en guise de raisonnement valide, une fois de plus, que leurs insultes à nous opposer.
Giald Atzmon en tant que Musicien, subi, tout comme notre Dieudonné National, le boycott des ennemis de la liberté...
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Né en Israël, Gilad Atzmon a reçu une éducation juive laïque. Il a effectué son service militaire à l’époque de la guerre du Liban (1982), et cet événement l’a rendu extrêmement sceptique en ce qui concerne tant le sionisme que la politique israélienne. Dix ans plus tard, il a quitté son pays natal, avec un aller simple. Au Royaume-Uni, où il s’est installé, il a étudié la philosophie. Mais après l’obtention de la licence, il a opté pour la carrière musicale. Il vit à Londres et se considère comme un exilé.
Manuel Talens [MT] : Qui êtes-vous, M. Atzmon ?
Gilad Atzmon [GA] : Excellente question ! Je suis probablement le dernier à le savoir de façon assurée. Je présume que je suis un musicien de jazz, ce qui veut dire que je suis voué à me réinventer en permanence. Je suis avant tout engagé dans des considérations qui me concernent moi-même. Une bonne question, pour commencer, c’est celle de savoir qui je pourrais bien être. Beaucoup de mes écrits et de mes critiques du sionisme et de l’économie mondialisée sont alimentés par ma tendance à réfléchir à qui je suis et à me remettre en permanence en question.
MT : Jouons, alors, si vous voulez bien, au psychanalyste et à l’analysé. Je déduis que si vous avez besoin de vous réinventer vous-même, c’est parce que vous n’êtes pas satisfait de ce que vous êtes ? Dites-moi, s’il vous plaît, si cela vous pose un quelconque problème, d’être juif ?
GA : Je dis toujours que le fait d’accorder des interviews me permet d’économiser le fric que, sans ça, je devrais donner aux psys ! Je pense que le besoin de se réinventer n’est pas nécessairement une échappatoire. C’est plutôt une quête de son essence véritable. De fait, le processus de réinvention tire son pouvoir d’une agression sans fard contre l’ego. Vous commencez à jouer [de la musique] seulement quand vous avez cessé de réfléchir. Pour recourir à la terminologie lacanienne, vous pouvez dire : «Vous êtes là où vous ne pensez pas.» Cela peut résonner bizarre, mais je réalise, maintenant, que c’est ma passion pour le jazz qui m’a rendu de plus en plus critique vis-à-vis de l’identité juive et du sionisme. A l’âge de dix-huit ans, alors que j’étais supposé devenir un judéo soldat suprématiste, je suis tombé follement amoureux de Coltrane et de Bird. C’est alors que j’ai pris conscience du fait que la culture qui m’inspire (la culture afro-américaine) n’avait strictement rien à voir avec la culture pour laquelle j’étais supposé combattre.
MT : Mais cela ne répond pas à ma question. Tout au moins pas à ce que j’avais en tête. Permettez-moi de vous rappeler que cette conversation s’adressera au premier chef à des lecteurs non juifs de langue espagnole qui ne sont pas nécessairement très au fait des idiosyncrasies du peuple juif. J’ai besoin de savoir si vous vous sentez bien dans votre peau de juif - en prenant en compte le fait que personne ne choisit ses origines - et si j’ai besoin de savoir cela, c’est parce que certaines des questions que je m’apprête à vous poser auront trait aux questions sensibles de l’antisémitisme et de la soi-disant haine juive de soi-même. Je répète, donc, ma question : «Le fait d’être juif vous pose-t-il un quelconque problème ?»
GA : En aucune manière, car je ne me considère pas comme juif. Ceci dit, je sympathise avec les juifs croyants et avec tout groupe spirituel ou toute foi religieuse, mais beaucoup moins avec l’identité laïque juive. Je soutiens qu’une fois que l’on dépouille la judéité de son contenu spirituel, ce qui reste est pur racisme. Vous voyez donc que, n’étant ni juif religieux ni juif laïc, je ne peux me considérer comme juif.
MT : Eh bien ! Voilà une déclaration plutôt directe, à laquelle je ne m’attendais pas. A dire vrai, si nous acceptons le concept sémiotique selon lequel la langue est ce monde intérieur dans lequel nous vivons, un monde qui n’est jamais neutre et qui conditionne notre manière de penser ; après vous avoir vu et vous avoir entendu parler hébreu avec votre épouse et vos enfants, je m’attendais à ce que vous vous sentiez à l’aise - tout en étant critique, bien entendu - à l’intérieur du champ linguistique avec lequel vous avez grandi. Il convient de rappeler que l’hébreu n’est pas une lingua franca plus ou moins dénationalisée comme peuvent l’être l’anglais ou l’espagnol, mais bien la langue ressuscitée des juifs d’Israël. Donc, puisque vous avez été élevé en juif laïc, mais que vous n’acceptez plus d’être tel, qu’êtes-vous, là, maintenant : Une homme acculturé ?
GA : De fait, je me considère comme un Palestinien de langue hébraïque. Je parle effectivement l’hébreu et ma Patrie, c’est la Palestine. Contrairement la Palestine La Palestine
MT : Maintenant, dites-moi ce qui vous amène à affirmer que la judaïcité séculière n’est qu’une pure forme de racisme ? Il y a tellement de gens honnêtes d’origine juive [des millions], qui ne sont absolument pas religieux et qui néanmoins se sentent et se considèrent juifs, que votre assertion me surprend. Pouvez-vous l’expliciter ? Et, du même coup, n’oubliez pas d’exprimer clairement et simplement ce qu’est le sionisme : n’oubliez pas que vous êtes en train de dialoguer avec des Gentils, dont les gènes culturels - ces fameux «mêmes» - sont chrétiens, et qui sont bien souvent déroutés quand ils sont confrontés à des notions telles le sionisme, le sémitisme ou leurs antonymes : l’anti-sionisme et l’antisémitisme.
GA : O.K. Vous avez raison : une clarification est nécessaire, à ce sujet. Ce n’est pas son origine juive, qui fait de quelqu’un un raciste ; c’est bien plutôt le fait d’admettre qu’il puisse exister une identité juive séculière qui «peut» avoir ce résultat. Comme je l’ai déjà indiqué, une fois que vous enlevez son contenu religieux à la judaïcité, il vous reste le concept du sang juif. Le sionisme est, en réalité, une perception nationaliste qui donne à la judaïcité la connotation d’une race plutôt que d’une croyance religieuse. En ceci, le sionisme est la croyance que Sion [ la Palestine la Bible
Mais alors, il est loisible de se demander qui constitue le peuple juif ? D’un point de vue sioniste, les juifs sont les gens qui se trouvent être juifs, quant à leur race. De fait, le sionisme est antérieur au nazisme. Les premiers sionistes parlaient déjà de sang juif et d’eugénisme racial, à une époque où Hitler était encore dans ses langes. Le problème étant que le sionisme, bien que mouvement politique marginal et ésotérique fortement critiqué par la plupart des écoles de pensée juives, tant idéologiques que religieuses, est désormais considéré comme l’expression officielle du peuple juif. Je tends à penser que beaucoup de juifs, et ceci inclut sans doute y compris les soi-disant «juifs antisionistes», ne sont en réalité pas autre chose que des crypto-sionistes.
Dans un de mes derniers articles (http://www.gilad.co.uk/hmtl/20fils/3rd.html), j’avance l’idée que ceux qui se qualifient eux-mêmes de juifs peuvent être divisés entre trois catégories principales :
1. Ceux qui suivent la foi judaïque ;
2. Ceux qui se considèrent comme des êtres humains dont il se trouve qu’ils sont d’origine juive et, enfin,
3. Ceux qui placent leur judaïcité au-dessus de tous les autres traits de leur personnalité.
A l’évidence, les deux premières de ces catégories ne me posent aucun problème. Mais la troisième, en revanche, est vraiment problématique. Un juif de la troisième catégorie, c’est, par exemple : un juif qui vit en Amérique (et non pas un Américain, qui se trouve être juif). Pour un juif de la troisième catégorie, l’appartenance raciale est une qualité première et c’est là, de fait, l’essence même du sionisme. Ainsi, être né juif est quelque chose de parfaitement innocent, mais le fait d’être un juif n’a rien de nécessairement innocent. Tout dépend, donc, de la catégorie à laquelle vous vous trouvez adhérer. A moins de correspondre aux deux premières catégories, personne n’est innocent comme, pour ainsi dire, par nécessité.
MT : Excusez mon entêtement, mais je souhaite que vous soyez extrêmement précis. Pour moi, cette expression «personne n’est innocent, comme par nécessité», que vous venez d’utiliser, suggère qu’il est encore possible d’appartenir à la troisième catégorie sans être raciste. Est-ce bien ce que vous voulez dire ?
GA : Si je dis cela, c’est simplement parce que je tiens vraiment à rester poli.
MT : J’y insiste : Etes-vous prêt à accepter l’idée que ces juifs antisionistes , d’après vous, ne sont pas autre chose que des crypto-sionistes, peuvent néanmoins être des personnes magnifiques, pas racistes pour un sou, après tout qui?
GA : Voyez-vous, nous sommes tous «conscients racialement», mais être «raciste», c’est tout à fait autre chose. Je serai très clair, sur cette question. Etre un juif laïc et faire, néanmoins, de votre judaïcité une qualité première, c’est la claire manifestation d’une tendance raciste. Beaucoup de gens, chez les juifs antisionistes, n’ont tout simplement pas conscience des problèmes inhérents à leur approche raciale. C’est la raison pour laquelle j’ai tenté de dialoguer avec eux et j’ai essayé de les pousser vers une plus grande prise de conscience de leur agenda racial erroné. Je les appelle à abandonner leur approche antisioniste racialement exclusive et à rejoindre, plutôt, un appel universel. Inutile de préciser que beaucoup de juifs se rendent compte de cela tous seuls. Je maintiens que si le sionisme est catégoriquement erroné, alors, l’appartenance raciale ou ethnique de ceux qui le combattent n’a absolument aucune importance.