FREE PALESTINE
28 juillet 2007

Entretien avec Hatem Qafisheh, membre Hamas du Conseil législatif palestinien

Entretien avec Hatem Qafisheh,
membre Hamas du Conseil législatif palestinien

vendredi 27 juillet 2007

Alternative Information Center

Le 22 juillet 2007, le Centre d’information alternative (AIC) s’est entretenu avec Hatem Qafisheh, membre éminent du Hamas au Conseil législatif palestinien, à son domicile à Hébron, en Cisjordanie.

Qafisheh a étudié la politique contemporaine au Moyen-Orient et l’islamologie à l’université, il dirige une agence de tourisme organisatrice de pèlerinages à La Mecque.

Longtemps prisonnier politique, il a été déporté à Marj a-Zuhour et est l’un des survivants du massacre à Hébron, en 1994, où 29 fidèles palestiniens ont été tués par un citoyen américano-israélien, Baruch Goldstein, lors de la prière du matin. Qafeisheh a été arrêté après ces évènements.

Il est l’un des leaders de « l’Intifada des prisonniers administratifs », en grève de la faim pour revendiquer les droits des prisonniers dans les prisons de Megiddo, Damoun et Telmond, dans le milieu des années 90.


AIC : Pouvez-vous nous parler de vous et nous dire quelle est votre situation personnelle ici à Hébron ?

HQ : Je m’appelle Hatem Qafisheh, je suis né et je vis à Hébron. J’ai été élu par mon peuple au Conseil législatif en janvier 2006.

AIC : Vous avez été prisonnier politique, récemment libéré. Pouvez-vous nous dire ce qu’est votre situation actuellement et pourquoi vous avez été emprisonné ?

HQ : Au total j’ai passé 19 mois en prison, sur différentes périodes. Lors de la première Intifada et aussi durant la seconde. J’ai été arrêté par l’Autorité palestinienne pour 3 mois et demi pour avoir refusé l’accord de Wye Plantation à l’époque d’Arafat (23 octobre 1998 - ndt).

AIC : Le Hamas a pris le contrôle de Gaza il y deux mois. Quel est le contexte dans lequel le Hamas a décidé d’assurer la sécurité à Gaza ?

HQ : Tout d’abord, je veux insister sur l’unité géographique que nous devrions avoir pour Gaza et la Cisjordanie. Après ce qui s’est passé dans Gaza, à mon avis, la situation palestinienne exige une discussion et une enquête sérieuses pour examiner ce qui est arrivé durant les affrontements il y a deux mois. J’appelle aujourd’hui tous les Arabes de l’extérieur à engager une telle étude pour savoir ce qui est faux et ce qui est vrai. La responsabilité échoit à l’occupation : les Israéliens ont besoin du Hamas pour contrôler Gaza et qu’il soit faible, et du Fatah pour contrôler la Cisjordanie, et qu’il soit faible aussi. C’est contre les Palestiniens en général.

Je lance un appel maintenant à tous les partis en Palestine pour qu’ils maîtrisent la situation et commencent à enquêter pour découvrir ce qui s’est réellement passé dans Gaza.

AIC : Voulez-vous dire que le Hamas a dû prendre le contrôle de la situation dans Gaza parce que l’Autorité palestinienne ne le pouvait pas et que le Fatah était trop faible ?

HQ : Ce qui est arrivé à Gaza a été dû à des questions de sécurité. Avant les affrontements et avant les problèmes actuels, Gaza était dans une situation sécuritaire très difficile. Tous les citoyens vivaient dans une situation très problématique. La plupart des Palestiniens ne voulaient pas que le problème soit résolu d’une façon militaire. Quand cela s’est produit j’étais encore en prison, mais beaucoup de détenus ont écrit des lettres et fait des déclarations sur leur refus de la violence, et lancé des appels à tous pour que le problème soit résolu par le dialogue. Maintenant, on voit mieux que jamais que la seule façon de préserver l’unité du peuple palestinien est de s’asseoir à une table et de discuter.

AIC : Les médias internationaux ont appelé cela un coup d’Etat. Selon vous, que s’est-il produit exactement, et comment le définiriez-vous ?

HQ : Nous savons qu’en général les médias à l’étranger n’ont pas respecté le résultat des élections (palestiniennes). Par notre expérience, nous avons pu voir que les médias n’étaient pas objectifs, qu’ils étaient pour Israël et contre nous. Par exemple, alors que toutes les conventions du droit international octroient le droit à tout peuple sous occupation de résister, les médias étrangers ont commencé par nous appeler des terroristes. Qu’ils aient appelé ça un coup d’Etat, cela n’a aucun sens. Le Hamas a 57% des députés, des députés qui ont été élus par des élections libres et démocratiques. Comment pouvez-vous vous emparer de ce qui vous appartient déjà ?

AIC : Pensez-vous que nous verrons en Cisjordanie la même violence que nous avons vue à Gaza ? Qu’il y ait des risques pour que quelque chose de semblable se produise de ce côté des Territoires ?

HQ : Ce qui est arrivé dans Gaza ne se renouvellera pas, parce qu’il y a beaucoup de gens qui veulent le dialogue et la négociation. En Cisjordanie, nous appelons notre peuple à ne pas lancé des actions contre ce qui se produit. Notre situation en Cisjordanie n’est pas aussi favorable car nous y avons beaucoup de prisonniers politiques maintenant et de nombreuses organisations ont subi des dommages. C’est pourquoi nous avons à subir de nombreuses agressions dans les municipalités dirigées par le Hamas.

Par exemple, l’autre jour, ils ont agressé un enfant à l’école parce qu’il était en train d’écrire des choses islamiques sur le mur. Ils ont dit à cet enfant que s’il recommençait ou s’il en parlait à sa famille, ils l’arrêteraient à nouveau.

J’ai personnellement rencontré un grand nombre d’officiers de sécurité et de gens importants à Hébron, et je leur ai demandé de ne pas agir, et ainsi ne pas surenchérir dans la violence.

AIC : Y a-t-il une possibilité pour que les affrontements se reproduisent à Gaza ?

HQ : J’espère que nous ne verrons plus cette situation, « in shalla », et nous mettrons tous nos efforts dans ce sens. Malheureusement, avec ce qui se passe, toutes les arrestations et les hostilités sont de mauvais augure, surtout en Cisjordanie. J’ai essayé de parler à des soldats et à des gens du Hamas leur disant de ne pas répondre à ces provocations, car cela ne peut que conduire à rendre la situation encore plus mauvaise.

AIC : Quel est votre avis sur la décision d’Abbas de dissoudre le gouvernement d’union ?

HQ : Un président a le droit de dissoudre tout gouvernement, ce droit est garanti par la loi fondamentale palestinienne, mais nous savons tous que sa décision fut une décision politique, la question ici n’est pas qu’elle soit légale ou illégale.

Nous voyons combien sont nombreux ceux qui refusent le gouvernement d’urgence. En tant que membre du Conseil législatif, je crois que la décision prise par Abbas n’a pas été discutée sérieusement. A ce niveau, la question est que nous avons besoin, en tant que Palestiniens, d’un consensus entre les partis et les organisations politiques qui nous conduise à une véritable union.

Je pense qu’Abbas a pris une très mauvaise décision.

AIC : Croyez-vous que ce qui s’est passé dans Gaza donnera à Israël un prétexte pour y pénétrer ?

HQ : Il est certain qu’Israël se servira de tous les problèmes des Palestiniens, internes ou externes. Nous avons vu comment Israël a commencé à lancer des attaques dans certains secteurs de Gaza, tuant des dizaines de personnes et en blessant beaucoup d’autres. Une chose est sûre, Israël tirera toujours le moindre avantage de nos divergences et de nos erreurs.

AIC : A propos d’Israël. Comme la démonstration de force du Hamas va-t-elle affecter le soi-disant processus de paix ? Dans quels termes et dans quelles conditions le Hamas discutera-t-il de la paix avec Israël ?

HQ : Je ne vais rien dire de nouveau maintenant. Le Sheikh Ahmed Yassin - assassiné par les Israéliens et fondateur du Hamas - l’a déclaré, le Hamas est prêt à un cessez-le-feu à long terme et en même temps à s’engager dans un processus politique qui donne leurs droits aux Palestiniens. Ceci n’est pas nouveau, comme je l’ai dit, et nous avons fait une déclaration à ce sujet. Je peux parler de la paix comme cela, s’ils sont prêts à donner aux Palestiniens la Cisjordanie et Gaza et à faire un Etat.

AIC : Vous occupez un siège au Conseil législatif palestinien pour le Hamas. Après les affrontements dans Gaza, craignez-vous des représailles, ou une attaque du Fatah ou des Israéliens ?

HQ : Nous avons d’autres députés du Hamas qui ont été arrêtés dans les premiers jours des combats. En plus de cela, nos bureaux à Hébron sont fermés ; je fais toutes mes réunions chez moi. Avant cela, ils ont déjà confisqué tous les ordinateurs et les documents des bureaux. A 500 mètres d’ici, il y a une base militaire israélienne, à tout moment ils peuvent venir et m’arrêter. Je suis membre du Conseil législatif, mais je n’ai aucune sécurité, et nous savons que lorsque les Israéliens veulent mettre en application leur politique, ils ne demandent rien à personne.

AIC : Voyez-vous la formation d’un nouveau gouvernement d’union dans un proche avenir ?

HQ : Non, je ne le vois pas mais nous travaillons tous dans ce sens. J’ai besoin de savoir dans quelle direction se dirige Abbas.

26 juillet 2007 - Alternative Information Center - traduction : JPP

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