FREE PALESTINE
3 mai 2007

Le militarisme dans la société israélienne

Le militarisme dans la société israélienne - 1° partie

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jeudi 3 mai 2007 - Haggai Matar

 

 « Lorsqu’on vous donne un marteau, tous vos problèmes se mettent à ressembler à des clous » (un soldat israélien).

 

C’est un fait connu qu’Israël a un service militaire obligatoire et que tous les jeunes citoyens (à l’exception des Arabes et des juifs ultra-orthodoxes) doivent servir dans l’armée. Les femmes servent deux ans, et les hommes trois. Les actes commis par cette armée que les jeunes rejoignent sont aussi tout à fait connus : alors qu’Israël affirme utiliser son armée comme « force défensive », c’est en réalité, et cela a toujours été le cas, une armée d’occupation et d’oppression.

 

Pourtant malgré la place dans un sens inégalée que l’armée israélienne occupe dans les médias locaux et internationaux, il est très rare que quelqu’un demande comment ces faits affectent la société israélienne. Comment cette présence d’hommes en armes vus comme un élément naturel de la société, dans les rues israéliennes affecte-t-elle la perception des gens par rapport aux armes et à la violence ? Quelles sont les répercussions de l’intégration et de l’infiltration de l’armée dans le système scolaire, les universités, l’économie et la haute politique sur la façon dont les israéliens considèrent l’usage de la force comme un moyen de résoudre des problèmes individuels et à l’échelle nationale ? Quels bénéfices pourraient être tirés d’un état d’esprit non-militariste dans la société ?

 

Ces questions comme beaucoup d’autres illustrent le nouveau discours anti-militariste dans certains cercles de la société israélienne. Les gens en arrivent progressivement à se demander s’il est réellement nécessaire que les politiciens soient d’ex-militaires et si la recherche de solutions pacifiques n’incomberaient pas plutôt à des gens qui n’ont pas consacré toute leur vie à la guerre. Certains contestent l’influence directe sans cesse grandissante que l’armée a sur l’école, alors que de nouveaux programmes permettant à des officiers de l’armée de parler devant des élèves des écoles secondaires à travers tous le pays sont fièrement présentés par l’armée et par le ministre de l’éducation.

 

Ce [nouveau] discours [anti-militariste] peut peut-être être présenté à travers l’activité de l’organisation israélienne Nouveau Profil, un mouvement de femmes militant pour la « civilisation » de la société. Nouveau Profil a travaillé pendant plus de 10 ans en étudiant, questionnant et contestant les modes de pensée militaristes en Israël et est maintenant connue pour ses méthodes éducatives alternatives et son soutien aux objecteurs de conscience qui refusent d’intégrer l’armée.

 

Rela Mazali, une des fondatrices de Nouveau Profil a choisi de débuter l’interview avec Palestine Times dans sa maison à Herzliya, sur un petit point de terminologie. « Je préfère ne pas parler de militarisme, qui est une caractéristique d’une société, mais de militarisation qui est un processus en cours qui requiert un investissement large et constant du côté de la société en terme de conditions de vie des gens, d’éducation, d’argent etc..., » explique-t-elle.

 

« Je pense que la militarisation en elle-même est extrêmement dommageable pour la société juive. Bien sûr, ce n’est pas à la même échelle que pour les Palestiniens, mais c’est considérable. Prenez par exemple le budget de l’état. Le néo-libéralisme est l’idéologie du gouvernement qui conditionne l’évolution des choses ici, mais tout ce que nous entendons c’est que notre argent est directement redirigé vers plus de ‘sécurité’. C’est ce qui autorise la privatisation massive en Israël, mise en pratique plus rapidement que partout ailleurs et le plus souvent sans la moindre résistance populaire. »

 

La faible résistance à la situation socio-économique très détériorée pour la majorité de la société israélienne est explicable selon des analystes par la crainte profondément enracinée chez les juifs israéliens de se sentir menacés dans leurs vies. Cette crainte, une élément crucial et une base solide pour la militarisation, est le résultat d’un mélange de l’histoire juive et des affaires politiques d’aujourd’hui.

 

Les enfants dans les écoles israéliennes étudient une histoire faite de persécutions des populations juives tout autour du monde (et spécialement en Europe), commençant au temps des Pharaons en Egypte et allant jusqu’à l’Holocauste. Ces tendances dans leur éducation culminent dans les établissements supérieurs, avec l’organisation de voyages scolaires dans les camps de concentration en Pologne. Cette histoire est appréhendée simultanément avec l’histoire du conflit arabo-sioniste, et l’image qu’en gardent beaucoup d’étudiants est que les Arabes ne sont qu’une autre facette de l’histoire mondiale de tentative de destruction des juifs pour aucune autre raison qu’une haine aveugle.

 

L’alternative face à ce destin de destruction et de mort est offerte par le système éducatif israélien et aussi par les politiciens et les médias : rejoindre l’armée. Les enfants des écoles sont incités à considérer l’armée comme étant la meilleure défense de leur pays, et lors de la dernière année d’étude ils sont intégrés dans un camp militaire pour recevoir un entraînement de base. A la fin de l’année scolaire, on attend d’eux qu’ils s’engagent. Qu’ils le fassent ou qu’ils échappent à cet engagement (comme beaucoup le font), cette leçon sur le rôle important de l’armée concernant leur survie ne sera pas facilement oubliée.

 

Lorsqu’on l’interroge sur les manifestations de la militarisation dans la société, Mazali répond qu’elle est plus intéressée par ce qui est moins visible, moins sous les yeux du public. Selon elle, il est facile de voir les sentiments dominants dans l’élite israélienne, ou les soldats dans les rues, ou la façon dont l’armée se comporte dans les territoires occupés. Mais d’autres choses sont plus « transparentes », nous dit Mazali, et personne n’en parle.

 

« Une de ces choses est le contrôle sur la terre, » explique-t-elle. « Seule une poignée de gens savent que plus de 50% de la terre située à l’intérieur de la ligne verte [ligne de cessez-le-feu de 1949] est contrôlée par l’armée. Nous, la population juive, sommes si habitués à accepter cette situation que nous ne pouvons pas même nous en apercevoir. »

 

Dans ce contexte, Mazali fait référence à l’usine fonctionnant pour l’industrie militaire située à la limite de sa ville : « Presque personne ne pense à protester contre le fait qu’une usine extrêmement dangereuse soit située aussi prêt d’une zone résidentielle. Personne ne demande pourquoi ils sont ici, ou comment nous ne serions pas bombardés par des missiles en situation de guerre si cette usine est placée si prêt. »

 

Une autre manifestation de cette transparence est l’accord général dans le public de ne pas aborder certains sujets et de ne pas rendre les dirigeants responsables de la majeure partie des politiques suivies dans le pays. « Un des exemples les plus clairs à ce sujet est la proportion de notre budget annuel affecté à la sécurité, » explique Mazali. « Il s’agit de la portion la plus importante au niveau budgétaire, mais même les parlementaires ne connaissent pas son utilisation. »

 

« Un autre exemple est le coeur du réacteur atomique. Sa seule existence représente une menace pour la vie de chacun dans ce pays, et les gens s’habituent au fait qu’il n’y ait absolument aucune information accessible à son sujet, et ils acceptent cela. L’obéissance, l’habitude de ne jamais poser de question même sur les sujets cruciaux sont aussi des manifestations de cette militarisation. S’il s’agissait d’un jeu pour les enfants, vous pourriez le définir avec la simple règle ‘la sécurité prend la démocratie’. »

 

Tenter d’isoler tous les aspects militaristes dans le comportement de la société par rapport à toutes les autres fonctions sociales serait une tâche difficile. Un des projets les plus importants de Nouveau Profil était la tenue d’une exposition qui mette en évidence les différentes manières dont l’armée intègre la société, exposant une sorte de fétichisme basé sur des symboles militaires. Sous les appelations de « Divertissement », « Mode », « Annonces » etc..., l’exposition présente des images montrant comment tous les aspects de la vie qui sont « enrôlés » pour servir l’armée sacralisée. Les soldats sont en permanence considérés et présentés dans les médias comme le symbole de tout ce qui est bon dans la société : brave, patriote, fort, toujours beau, et consacrant leur vie à ce que « les autres parmi nous » puissent vivrent en paix.

 

Dans une section spécialement consacrée au système éducatif, l’exposition montre des livres pour enfants sur la vie militaire, premiers exercices de conditionnement par la lecture, avec des enfants habillés en soldats à l’occasion d’une fête juive (Purim) et d’autres escaladant un char lors d’un voyage scolaire. Il y a également des problèmes de calcul du genre : « Beaucoup de ceux qui veulent intégrer les forces israéliennes veulent servir dans des unités de combat. Sur 6340 inscrits, 2470 veulent aller dans les Marines, 1945 choisissent l’Aviation ou la Marine - combien sont allés joindre l’artillerie ? »

28 avril 2007 - Palestine Times - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.times.ps/etemplate.php?i...
Traduction : Claude Zurbach

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