"Le diable s'est suicidé de désespoir"

TERRITOIRES PALESTINIENS - "Le diable s'est suicidé de désespoir"

http://www.courrierinternational.com/article.asp?obj_id=70715#

Pour commenter l'accord interpalestinien conclu le 8 février à La Mecque, le quotidien beyrouthin Al-Akhbar a choisi de relater l'ambiance mi-figue, mi-raisin qui règne dans les Territoires.

Depuis l'accord entre le Fatah et le Hamas, les Territoires occupés sont submergés par une vague de textos qui expriment les sentiments mitigés des Palestiniens. Certains versent dans le sarcasme, comme ce message qui se présente comme une "dépêche de dernière minute" pour annoncer que "la Cisjordanie deviendra Fatah-Land et Gaza Hamas-Land, avec une zone de réserve naturelle pour les Daghmach", un puissant clan résidant à Gaza et connu pour la multiplicité de ses affiliations politiques.

D'autres sont franchement pessimistes quant aux possibilités de parvenir à une entente durable, compte tenu des échecs du passé. Ce qu'exprime cet autre texto : "Un Palestinien frotte la lampe d'Aladin jusqu'à ce qu'apparaisse le génie et qui lui dit : 'Tu peux formuler un voeu et je l'exaucerai... sauf celui d'un gouvernement d'union nationale !'" Un autre résume le sentiment dominant des Palestiniens à l'égard de deux figures politiques importantes participant au dialogue de La Mecque, le ministre des Affaires étrangères Mahmoud Zahar, du Hamas, connu pour son caractère acariâtre, et Mohamed Dahlan, du Fatah, tenu pour responsable de la crise interpalestinienne : "Les anges quittent La Mecque en protestation contre la présence de Zahar, et le diable s'est suicidé de désespoir devant la concurrence de Dahlan."

Beaucoup reprennent ce qu'il faut désormais considérer comme un dicton populaire : "Il est plus facile de regarder son lobe d'oreille que d'imaginer un gouvernement d'union nationale." Selon une jeune Palestinienne de 20 ans que nous interrogeons alors qu'elle s'apprête à envoyer, elle aussi, un texto à ses amis, la situation intérieure est tellement désespérante qu'il ne reste aux habitants de Gaza et de Cisjordanie que la fuite dans le sarcasme.

Raïd Lafi, Al-Akhbar, (Beyrouth)